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Le rire rouge: édition de guerre du journal le rire — 1915 (Nr. 7-58)

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https://doi.org/10.11588/diglit.25444#0011
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ÉCHOS DU RIRE

Déplacements... — Nos collaborateurs :
H. Mirande est dans une section franche
et se bat dans les environs de Verdun de-
puis plus de deux mois.

Jean Videmot, parti lieutenantde réserve,
vient d’ètre promu capitaine dans la tran-
chée vers Ypres.

H. Avelot, dont l'âge et la santé auraient
largement justifié l’abstention, s’est engagé
dans l’infanterie. Tous trois vont bien.

... et villégiatures. — Toute une bande
de jeunes cabotins dans les postes pari-
siens : Pradier, qiii joua VAiqlon, au bureau
de recrutement de Passy (A propos, qu’est
devenu son citer ami, Maurice Rostand?);
Silvestre, service de bureau, garage Saint-
Didier; Puylagarde, Got et tutti quanti, sim-
ples civils.

Les collaborateurs de tant de revues
bruyantes se sont, comme dans toute colla-
boration, partagé les rôles. L’un, Rip, s’est
embousquè comme cycliste aux Invalides;
l’autre, Bousquet, est dans la trai chée.

« En temps de guerre, disait un humoriste,
c’est Bousquet qui signe le premier. En
temps de paix, Rip passe devant. »

*

* *

On est très inquiet, tant au Palais de
Justice qu’au Palais-Bourbon, sur le sort
de M. André Hesse, député (le la Charente-
Inférieure ; de petits papiers collés uans les
couloirs du Palais s’en inquiètent ainsi :

« Prière de nous faire savoir au plus vite
ce qu’il est advenu de Me André Hesse,
maréchal des logis au 19e escadron du train
des équipages,dont on est sansnouvelles de-
puis longtemps. »

M. André Hesse ne doit pas être bien
loin de Paris.

*

* *

Dimanche dernier, on vendait dans les
rues de Paris de nombreux petits drapeaux
au profit des Belges. Les vendeuses étaient
nombreuses et les recettes furent fruc-
tueuses.

Parmi les plus célèbres vendeuses, on
remarquait des artistes, des femmes du
monde (entier ou fractionné); il y avait
même d anciennes acquittées de la Cour
d’assises_ comme Mme Bloch.

Remarquée, avenue de Villiers, près de
la rue de Lévis, Mm* Gueydan...

*

* *

. Miss Violet Damorv est une des plus gra-
cieuses actrices londoniennes, de même
que le major Abingdon Bayley est un des
plus valeureux officiers de l’armée britan-
nique... Ils ont un autre point de rappro-
chement,, c est d’ètre conjoints.

Business are business... et les événe-
ments actuels ne sauraient modifier noire
rnodus vivendi. Il ne sera pas dit que le
kaiser, dans sa demenre, aura réussi à per-
turber un ménage anglais.

Ainsi s exprima, approximativement, le
major Abingdon Bayley, appelé à faire
pai tie du corps expéditionnaire.

Ail right my dear, répondit sa toute
gracieuse moitié.

Et, depuis le mois de septembre, tandis
que le vaillant officier du Royal Rifle Corps
se couvre de gloire sur le théâtre de la
guerre, miss Violet Damorv triomphe, cha-
que soir, sur la scène du Queen’s Hall.

*

* *

En ces jours où tant de gens ont fait
flèche de tout bois pour parvenir à s’em-
busquer... loin du front, recourant parfois

à des recommandations qu’ils eussent rougi
d’invoquer en temps normal, il est légitime
et réconfortant de signaler ceux qui refu-
sèrent de taire intervenir en leur faveur
des influences puissantes.

Du nombre est M. Douay!... Peut-être
ignorez-vous jusqu’à son nom? Sachez donc
que M. Douay est un des « chefs » les plus
réputés des cuisines de la Reine douair ière
Alexandra d’Angleterre. Nul doute qu’il
eût pu arguer de ce titre pour se soustraire
à ses ob'igations militaires. Mais M. Douay
qui est Français de naissance et de cœur
ne voulut pas qu’on se battit sans lui et le
quatrième jour de la mobilisation, il quit-
tait Malborough-House pour rejoindre son
régiment à LiLe.

Vatel avait une épée, qu’il ne sortit du
fourreau que pour faire un « harakiri »
désormais historique.

M. Douay n’a qu’un flingot, mais il s’en
est, paraît-il, fort bien servi au cours des
combats dans le Nord.

S'il fait la cuisine dans les tranchées, je
demande à servir à proximité de sa taupi-
nière...

— Je voudrais des cols très élégants.

— Bien, monsieur ! Passez-moi donc l’assorti-
ment de nos <* dirigeables » et de nos « super-
dreadnoughts ». [Punch, Londres.)

*

* *

La guerre suscite des liéroïsmes inatten-
dus...

Quand on a su, à Bruxelles, que le grand
kaiser était dans la ville, chacun s’est
efforcé de le voir, mais en vain. Enfin, le
troisième jour, un grand mouvement mili-
taire se produit aux environs de la gare
du Nord. Curieux et chômeur, le peuple,
toujours redoutable à une garnison qui
tremble, s’est massé aux angles de la place
interdite aux civils, et surveille les offi-
ciers qui sortent du monument derrière
lequel le grand massacreur vient de s’en
aller...

Mais déjà les voitures recommencent à
circuler... D’un estaminet de la rue de
Brabant, sort un cocher de fiacre. Il a beau-
coup bu, il chante et titube... Les lèvres
blanches encore de la mousse du faro, sa
large trogne rubiconde sourit sous le cha-
peau de toile cirée. Du haut de son siège,
où il parvient assez péniblement, il lance
des œillades aux femmes qui rougissent, et
enveloppe amoureusement, du fouet, la
vieille carcasse de sa jument : « Hue, Rosa-
lie!... hue, cocotte! hue!... va à ton aise,
ma vieille, va !... »

Rosalie profite de l’encouragement, flâne
sur ses quatre pattes et finit par s’arrêter
au bord du trottoir, tandis que le cocher,
paternel, se penche pour ramener sur les
flancs squelettiques une large couverture
jaune et rouge...

Mais deux officiers allemands se sont
approchés. L’un d’eux ouvre la portière et
crie : « Gaserne des conatiers! ».

A l’accent, le cocher a tressailli; il dévi-
sage le client qui tient sa portière et, dans
un large lire d'ebrieté, s’ecrie : « Mon car-
rosse pour ta lune?... Ajâàââ... da ! Tu
m’as pas regardé, boestring (hareng-
saur).»

Et, sans réfléchir à la prison, il fouette
Rosalie qui part d’un miraculeux galop au
nez des Barbares éberlués...

*

* *

On vient d’autoriser la réouverture des
théâtres et concerts. Ce n’est pas trop tôt.
Les pauvres artistes en étaient en effet ré-
duits a se faire entendre dans les cours.

C’est ainsi que nous avons reconnu dans
une troupe qui donnait une audition rue
Croix-des-Petns-Champs ;

Un compositeur de musique faisant par-
tie de la Société des Auteurs;

Un musicien de l’Opéra;

Un autre de Tabarin;

Un premier prix du Conservatoire;

Une chanteuse qui eut de grands succès
à la Scala et à l’Alcazar d’Ete;

Un pensionnaire de l’Eldorado;

Un autre du Trianon-Lyrique;

Un lauréat du Conservatoire.

On n'ira pas dire que le Conservatoire
ne mène pas à tout...

*

* *

Un de nos confrères de la grande presse
racontait récemment l’histoire d’un bou:
cher devenu intiimier et vice versa. Apo-
cryphe? Pourquoi donc? L'anecdote que
voici et dont nous pouvons garantir l’authen-
ticité, prouve que rien n'est plus invraisem-
blable en pareille matière.

Au casino de X...-sur-Mer, transformé
en hôpital militaire, est attaché comme
assistant, depuis le début de la guerre,
le fils d’un de nos anciens ministres.

Par décision du médecin en chef de cet
hôpital, l’accès des salles d’opération vient
d’être formellement interdit à cet infir-
mier occasionnel.

Négligence dans son service? Impru-
dence? Vous n’y êtes point !... Tout simple-
ment ce jeune homme a le cœur si sen-
sible que la vue d’une plaie le fait tomber
en syncope et qu’il fallait chaque jour
délaisser les blesses pour lui faire respirer
des sels.

11 se console de la décision administra-
tive dont il a été la victime en promenant
en automobile les dames de la Croix-
Rouge...

Il faut bien se rendre utile!

*

* *

La guerre a particulièrement excité
M. Paul Mounet, et sa vieille haine contre
les Allemands s’est réveillee.

L’autre après-midi, devant la porte du
Théâtre-Français, il lisait, avec intérêt, le
communiqué de trois heures. A son gré,
« ça n’allait pas assez vite ». Il aurait sans
doute voulu que la défaite fût plus com-
plète ; il se retourna vers un ami et lui toni-
trua avec conviction :

— Demain, je m’engage... Et pour leur
faire f... le camp, je combattrai à poil. Au
moins pour un coup, ça les effraiera...

Éole.
 
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