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Le rire rouge: édition de guerre du journal le rire — 1915 (Nr. 7-58)

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https://doi.org/10.11588/diglit.25444#0023
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ÉCHOS DU RIRE

Tous nos lecteurs connaissent le beau
talent de Henri Lanos, peintre et illustra-
teur. Ils apprendront donc avec plaisir que
le grand artiste vient augmenter encore la
brillante cohorte de nos collaborateurs. Il
nous apporte, pour son entrée au Rire,
une page magistrale : La Dernière Etape,
qu’ils trouveront dans ce numéro.

*

* ■*

Une superbe limousine s’arrêtait, l’autre
jour, devant une grande confiserie du bou-
levard des Capucines. Toute emmitouflée
de fourrures, une dame, jeune encore, en
descendit et, traversant la foule, entra dans
le magasin où elle acheta une boîte de
chocolats.

Après avoir soldé son emplette, qui se
montait à la somme de dix francs, la
dame regagna son auto. Elle défit rapide-
ment la boîte et, pendant que la voiture
commençait à rouler, xroqua avec plai-
sir un des chocolats.

Est-ce que Mme P.in.a.é serait gour-
mande ?

*

* *

Relevé dans un édicule de la place Saint-
Augustin cette inscription :

« Les cabinets restent ouverts pendant
la guerre. »

Heureusement !

*

* *

Motif : Quatre jours de salle de police :
n’a pas su, malgré les ordres du général
commandant ep chef (lus au rapport), em-
pêcher sa femme de débarquer à Châlons.
(Bon sujet, lre fois.)

Six jours de salle de police : a, malgré
les ordres du général en chef, fait venir sa
maîtresse à Châlons.

*

* *

MUe C..., de l’Opéra-Comique, est une su-
perbe femme et possède une belle voix;
mais elle a un caractère déplorable et ou-
blie qu’aux temps où nous vivons un peu
de modestie et de gentillesse sont indispen
sables à tous et à toutes.

Ayant accepté de chanter à la séance
d’ouverture des concerts donnés chaque
jour au Palais de glace au profit des bles-
sés, Mlle C... n’a pas craint de manquer à
sa promesse. Une autre artiste, fort belle,
ayant déclamé la Marseillaise, que MUe C...
devait chanter, celle-ci, sans respect pour
le public qui s’était dérangé pour l’en-
tendre, a commis l’incorrection fâcheuse
de tout planter là, sans souci du préjudice
que son acte pouvait causer à une œuvre
exclusivement charitable. Ce n’est d’ail-
leurs pas le seul geste fâcheux de cette
irascible personne, et il en est d’autres que
rapporte l’écho des plages normandes et
qui mériteraient d’être publiés.

*

* *

Ee toujours jeune compositeur de la Fille
de Mma Angot nous envoie les vers sui-
vants :

K ou B.

Le beau nom de Kaiser, dont Guillaume se

[pare

Commence par un K, facile à déguiser
En un B. Tout à coup, le sinistre barbare,
L’hypocrite Kaiser se transforme en Bai-

[ser !...

Wilhelm ist krank.

S’il crève dans son lit, sans gloire,

D’un mal ignoble et purulent,

C’est qu’il fut toujours — c’est notoire —
De corps et d’âme, un pur Uhlan.

Charles Lecocq, octogénaire.

*

* *

Depuis l’occupation allemande, le boule-
vard Botanique, à Bruxelles,estbien morne,

avec ses maisons aux volets abaisses « poui

cause d’agrandissement ». Peu de passants,

mais un groupe de ketjes qui jouent aux
billes sur le terre-plein...

Un coup douteux vient d’amener une dis-
cussion où l’on se jette à la tête les « sa e
Boche ! », « tripe de Prussien ! » quand, tout
à coup, le rude parler cesse ; un uhlan s est
approché et demande :

— Jardin botanique, s’il vous plaît !

Le plus grand de la bande se détache,
assène un coup de poing à sa casquette
graisseuse, se campe, les jambes écartées,
les mains dans les trous de son pantalon et,
regardant dans les yeux, voyou, effronté,
gouailleur, le Barbare qui attend .

— Jardin botanique !... ah ! ah !... W eil,
gij zijt er op, smeerlap !...

Ce qui veut dire : « Eh bien ! mais vous y
êtes!... » Quant à smeerlap, pour en tra-
duire le sens ordurier, il faudrait la ver-
deur de langue d’un Cambronne. _

Alors, ô joie des ketjes, sous 1 injure, 1 of-
ficier a souri avec suavité, fait le salut mili-
taire et murmure, en s’en allant :

— Danke, schoen!...

*

* *

Son père est un des hommes de finance
les plus en vue de Paris. Lui-même, sports-

le vicaire [qui reoient d’un bureau de recru-
tement). — Vous engagez-vous à prendre cette
femme pour légitime épouse... pour trois ans
ou pour la durée de la guerre?

[Punch, Londres.)

man accompli, n’avait dû, en 1910, d’être
versé dans l’armée auxiliaire qu’à l’action...
directe et énergique du piston.

Lorsque éclata la guerre, notre jeune
athlète affecta le plus morne accablement
à l’idée que l’on allait se battre sans lui. Le
jour où parut le décret relatif au nouveau
conseil de révision des auxiliaires, sa na-
vrance se changea en inquiétude. Il passa
devant ledit conseil et — qui dira par quel
hasard la pression paternelle resta sans
effet ?—; il fut versé dans le service armé.

Trois jours durant, il demeura invisible
pour ses intimes, en raison de certaines
démarches urgentes. Le quatrième jour, il
reparut et annonça qu’il s’était commandé
un chandail...

Et quel chandail? Blanc et bleu-ciel, aux
couleurs de son ancien club sportif. C’était
se désigner aux balles ennemies, à 1.800 mè-
tres ! On le traita de fou, de fanfaron de la
bravoure. Il résista à tous les conseils, à
toutes les prières de ses amis et, la veille
de son départ, triomphalement, il exhiba
le chandail héroïque dans un bar des envi-
rons de la Madeleine.

Pourquoi fallut-il, hélas ! que, cinq jours
plus tard, on apprit qu’il avait rejoint sou
poste... à Antibes, comme infirmier?...

*

* *

La scène représente un de ces camps de
concentration où la plus élémentaire pru-
dence nous a obligés à grouper Austro-
Hongrois et autres Boches.

L’un d’eux, pour avoir été le directeur
de ce fameux hôtel des Champs-Elysées
où, comme par hasard, la T. S. F. se trou-
vait installée, n’en est pas moins d’une
naïveté toute... poméranienne.

Ainsi, l’autre jour, il avisa à terre une
minuscule tortue égarée là, à la suite de
quels avatars — Dieu seul le sait! Il s’em-
para de l’amphibie, qui devint pour lui une
bête favorite. « Oh ! la c/iolie dordue, la
eûolie dordue ! » ne faisait-il que clamer.
Cela agaça un sous-off gardien qui, Mont-
martrois facétieux, échafauda une bonne
blague. Il se procura des tortues de diffé-
rentes grandeurs. Et, chaque soir, il subti-
lisait au Boche la tortue qu’il remplaçait
immédiatement par une autre plus grosse.
A son réveil, le Prussien poussait des cris
de joie. Sa tortue grossissait à vue d’œil.
En une huitaine, elle avait quintuplé!

Vous pensez si les soldats français se
faisaient du bon sang !

— Il est trop heureux, ce Boche-là, dit
alors notre sous-off. Faut maintenant qu’il
déchante !

Et, faisant machine en arrière, il fit
redescendre aux tortues l’échelle de leur
gradation — si j’ose ainsi dire.

Le Boche en perdait le boire et le man-
ger. Il croyait devenir fou et prenait à tout
instant son Dieu à témoin.

Enfin la petite tortue redevint... elle-
même et notre sous-off donna le dernier
coup de fion à sa facétie: il métamorphosa
la bête en.., une superbe betterave !

Le Boche a-t-il compris? C’est probable.
Dans tous les cas, on a bien ri pendant
une quinzaine au camp de concentration
du M. . .s.

*

* - *

Telle son homonyme du Français, elle
passa de chez Sarah à un théâtre du bou-
levard pour y créer une comédie de Ri-
chepin.

La guerre étant déclarée, elle voulut
jouer un rôle dans le grand drame. Elle se
fit infirmière. Là, elle obtint autant de suc-
cès que dans le Tango. Se trouvant dans
un train, près d’un blessé dont elle avait
la garde, ce dernier, soit l’influence du
voyage ou de la fièvre, devint fou auprès
de notre belle Yvonne. « Fou d’amour ! me
direz-vous? » Hélas, non!... et notre comé-
dienne, se souvenant, sans doute, de ses
classiques, se trouva mal dans les bras des
infirmiers venus à son appel.

Pauvre soldat... et heureux infirmiers!

*

* *

H... B... au front.

Extrait d’une lettre de soldat, datée du
30 novembre:

« ... Il y a dix jours environ, on me dit
qu’un homme de lettres connu, employé à
l’état-major avec le grade de capitaine,
allait passer dans nos tranchées, histoire
de se documenter...

« Le monsieur passa, à la fin de la jour-
née, très rapidement, dans son uniforme
en drap tricolore...

« Je parvins plus tard à savoir qu’il s’ap-
pelait H... B.... Je plains ses lecteurs.
En fait de documentation exacte, ce fut
pour lui bien maigre, s’il n’a pas visité
d’autres lieux que ceux de par ici : un bourg
démoli, des champs dévastés, — cela devient
banal.

« H... B... a bien sûr choisi l’heure
de sa visite à nos tranchées. Le soir, les
canonnades cessent. Mais, vers midi, il au-
rait pu, couché sous nos abris de paille,
savourer longuement cette sensation inouïe
de se dire, à chaque « picrate » que Ton
écoute venir : <> Celui-ci est pour nous... »

Eole.

DENTIFRICE

à ia GLYCÉRINE
 
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