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Le rire rouge: édition de guerre du journal le rire — 1916 (Nr. 59-111)

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https://doi.org/10.11588/diglit.25445#0025
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LÀ LETTRF DD PAPA

« ... J’ai la joie de vous annoncer que je viens d’être nommé capi-
taine...

toto. — Grand’ papa, je suis fier de ton fils. Dessin de Lucien Ruilland.

La Chambre portugaise a décidé de prendre
part au conjlit européen. (Havas.)

L’EXPLOIT DE MICIiAUD

L’anecdote est assez grasse, mais elle est
authentique et s’est passée sur le front... Et
puis l’on sait que nos braves ne redoutent
pas la plaisanterie rabelaisienne. Ils ont
bien raison...

Michaud, titi parisien, « tête brûlée, mais
brave cœur », suivant le cliché bien connu,
était le boute-en-train de sa compagnie.
Quand on avait le cafard — ce que dans le
civil on appelle le vague-à-l’âme — il suffi-
sait de venir causer un instant avec lui
pour que le malaise aussitôt disparût. Il
avait le mot drôle, la repartie cocasse, l’en-
train imperturbable du gamin de Paris.
Mais il avait aussi le goût des bêtises et, si
quelque projet, même absurde, lui passait
par la tête, il ne pouvait pas ne pas l’ac-
complir. On le savait. Aussi la discipline
était-elle pour lui moins sévère que pour
les camarades.

Or — chose étrange — depuis quelques
jours Michaud semblait préoccupé. 11 ne

— Pourquoi qu’il est dans l’auxiliaire?

— Je crois qu’il est un peu marteau... : il paie son

terme. Dessin de Djilio.

riait plus, ne blaguait plus, passait des
heures entières en de sombres réflexions.
Lorsqu’on s’informait auprès de lui des
causes de son souci.

— T’inquiète pas, disait-il. C’est rapport
aux Boches.

D’autres fois il répondait vaguement :

— C’est un projet...

Mais nul ne savait ce qu’il méditait.

Enfin, un soir, Michaud recouvra sa
gaîté. Sa résolution était prise. La journée
avait été calme et, seul, un échange plato-
nique de fusillades d’avant-postes en avait
rompu la monotonie. On s’ennuyait. Mi-
chaud, songeant sans doute que le mo-
ment était venu de distraire ses camarades,
dit simplement :

— Vous allez voir.

Après quoi il grimpa sur le parapet, choi-
sit un endroit devant les fils de fer, tourna
le dos aux Boches et là, tranquillement,
comme chez lui, posa culotte...

La suite ne se fit pas attendre. Les
Boches, aussi délibérément provoqués, es-
sayèrent leur adresse sur la cible natu-
relle et la fusillade crépita. Dans la tran-
chée, le lieutenant, furieux, invectivait Mi-
chaud :

— Es-tu fou? Veux-tu descendre? Qui
m’a flanqué un saligaud comme toi?

Michaud, avec un sourire olympien,
s’appliquait sans hâte... Cela dura cinq
bonnes minutes. Enfin, ayant terminé, il
se releva et d’un bond sauta parmi ses
camarades.

On devine l’accueil qu’il reçut. Comme
le lieutenant, malgré son envie de rire,
continuait pour la forme de « l’enlever »
sans aménité, Michaud, humble et contrit
répondit :

— Oui, mon lieutenant, c’est idiot, je
suis le premier à le reconnaître. Mais
quand j’ai une idée, faut que je l’accom-
plisse ; ça me fait trop de mal... Et puis,
c’est pas ça : j’ai voulu montrer aux Boches
que je n’avais pas peur.

— Envovez-lui de la gelée de groseille à votre soldat!

— Vous êtes fou ! Il a déjà bien assez froid comme ça, le pauvre petit.

Dessin d’André Fot.

Tityre.
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