CB CHER BNFANT
— Alors, vraiment, ça va mieux, papa?... Cette guerre, décidément,
ne m’apporte que des désillusions... Dessin de Mars-Trick.
LA SUITE AU PROCHAIN NUMÉRO
Après le déjeuner, Madame est plongée dans la lecture du
feuilleton, Monsieur fume une cigarette.
monsieur. — Il fait très beau.
madame, lisant. — Hon.
monsieur. — Où allons-nous, aujourd’hui?
madame, lisant. — Hon.
monsieur. — Nom d'un chien, je te parle, tu pourrais me ré-
pondre.
madame. — Tu vois bien que je lis, attends que j’aie fini.
monsieur. — Toujours plongée dans ces maudits romans-feuil-
letons.
madame, jetant violemment le journal par terre. — Zut, zut,
zut !
c’est mon
monsieur.
Quoi
— Quand vous fumez une cigarette roulée dans
du bon papier Zig-Zag, vous vous sentez heureux.
Songez alors à en envoyer quelques cahiers à nos
braves poilus. C’est un devoir.
Dessin de Manfredini.
observation qui te met dans, cet
état?
madame.— Non,
ton observation
m’est tout à fait
indifférente, mais
au moment où
j’arrive à l’endroit
le plus palpitant,
au moment où
j’allais apprendre
le nom de la jeu-
ne fille aveugle,
que le cul-de-jatte
américain avait
écrasée avec sa
voiturette, le ro-
man s’arrête.
monsieur. —
Pourquoi lis-tu
des feuilletons,
puisque ça t’en-
nuie d’être tou-
jours arrêtée au
bon moment? Lis
un roman en en-
tier.
madame.— Cela
m’ennuie et me
plaît tout en mê-
me temps; j'éprouve une sensation délicieuse et angoissante au
moment précis où je palpite d’intérêt d’être arrêtée net. Lire
un roman dont pour savoir la fin je n’aurais qu’à tourner les
derniers feuillets, fi ! Avec mon feuilleton j’ai beau faire : je suis
obligée de m’arrêter et d’attendre à demain...
monsieur. — Bien, bien. Ce que tu peux m’énerver avec ton
amour pour les feuilletons, enfin. Où allons-nous aujourd’hui?
madame. — Où tu voudras.
monsieur. — Allons au théâtre.
madame. — Oh non!
monsieur. — Au concert?
madame. — Oh non!
monsieur. — Où alors?
madame. — Au cinéma.
monsieur. — Bien.
madame. — Mais à celui où l’on donne « les Mystères du Jam-
bon Olida ».
monsieur. — Ah non! celui-là m’énerve : au moment où l’in -
demain !
— Sire, la populace révoltée demande votre tête !
— Dites-leur que je n’en ai jamais eu. Dessin de d’OsioYA.
trigue m’intéresse au plus haut degré, je vois sur l’écran un gi-
gantesque point d’interrogation avec la suite à la prochaine
séance.
madame. — Moi, c’est pour cela que j’y vais, c’est cela qui
m’affole.
monsieur. — Comme pour le feuilleton alors?
madame. — Oui. Allons-y, hein?
monsieur, avec la bonté, la gentillesse et la douceur qui ca-
ractérisent le sexe masculin. — Allons-y.
Le soir. Monsieur et Madame sont dans le lit.
madame. — J’ai passé une soirée délicieuse. Au moment précis
où le maître d’hôtel, dont le bandit avait sophistiqué les larmes,
s’est empoisonné en reniflant ses sanglots, après avoir promis
des révélations à la jeune fille albinos, drac, le point d’interro-
gation, la suite à la prochaine séance; c’est divin.
monsieur. — Laissons le cinéma tranquille, j’ai devant moi
une si jolie réalité.
madame. — Flatteur.
monsieur. — Mais non. Tu es adorable, toute rose et blonde
dans ta chemise; il faut que je t’embrasse.
madame. — Oh! ce baiser!
VERMOUTH
ASTI-SPUMANTE
— Alors, vraiment, ça va mieux, papa?... Cette guerre, décidément,
ne m’apporte que des désillusions... Dessin de Mars-Trick.
LA SUITE AU PROCHAIN NUMÉRO
Après le déjeuner, Madame est plongée dans la lecture du
feuilleton, Monsieur fume une cigarette.
monsieur. — Il fait très beau.
madame, lisant. — Hon.
monsieur. — Où allons-nous, aujourd’hui?
madame, lisant. — Hon.
monsieur. — Nom d'un chien, je te parle, tu pourrais me ré-
pondre.
madame. — Tu vois bien que je lis, attends que j’aie fini.
monsieur. — Toujours plongée dans ces maudits romans-feuil-
letons.
madame, jetant violemment le journal par terre. — Zut, zut,
zut !
c’est mon
monsieur.
Quoi
— Quand vous fumez une cigarette roulée dans
du bon papier Zig-Zag, vous vous sentez heureux.
Songez alors à en envoyer quelques cahiers à nos
braves poilus. C’est un devoir.
Dessin de Manfredini.
observation qui te met dans, cet
état?
madame.— Non,
ton observation
m’est tout à fait
indifférente, mais
au moment où
j’arrive à l’endroit
le plus palpitant,
au moment où
j’allais apprendre
le nom de la jeu-
ne fille aveugle,
que le cul-de-jatte
américain avait
écrasée avec sa
voiturette, le ro-
man s’arrête.
monsieur. —
Pourquoi lis-tu
des feuilletons,
puisque ça t’en-
nuie d’être tou-
jours arrêtée au
bon moment? Lis
un roman en en-
tier.
madame.— Cela
m’ennuie et me
plaît tout en mê-
me temps; j'éprouve une sensation délicieuse et angoissante au
moment précis où je palpite d’intérêt d’être arrêtée net. Lire
un roman dont pour savoir la fin je n’aurais qu’à tourner les
derniers feuillets, fi ! Avec mon feuilleton j’ai beau faire : je suis
obligée de m’arrêter et d’attendre à demain...
monsieur. — Bien, bien. Ce que tu peux m’énerver avec ton
amour pour les feuilletons, enfin. Où allons-nous aujourd’hui?
madame. — Où tu voudras.
monsieur. — Allons au théâtre.
madame. — Oh non!
monsieur. — Au concert?
madame. — Oh non!
monsieur. — Où alors?
madame. — Au cinéma.
monsieur. — Bien.
madame. — Mais à celui où l’on donne « les Mystères du Jam-
bon Olida ».
monsieur. — Ah non! celui-là m’énerve : au moment où l’in -
demain !
— Sire, la populace révoltée demande votre tête !
— Dites-leur que je n’en ai jamais eu. Dessin de d’OsioYA.
trigue m’intéresse au plus haut degré, je vois sur l’écran un gi-
gantesque point d’interrogation avec la suite à la prochaine
séance.
madame. — Moi, c’est pour cela que j’y vais, c’est cela qui
m’affole.
monsieur. — Comme pour le feuilleton alors?
madame. — Oui. Allons-y, hein?
monsieur, avec la bonté, la gentillesse et la douceur qui ca-
ractérisent le sexe masculin. — Allons-y.
Le soir. Monsieur et Madame sont dans le lit.
madame. — J’ai passé une soirée délicieuse. Au moment précis
où le maître d’hôtel, dont le bandit avait sophistiqué les larmes,
s’est empoisonné en reniflant ses sanglots, après avoir promis
des révélations à la jeune fille albinos, drac, le point d’interro-
gation, la suite à la prochaine séance; c’est divin.
monsieur. — Laissons le cinéma tranquille, j’ai devant moi
une si jolie réalité.
madame. — Flatteur.
monsieur. — Mais non. Tu es adorable, toute rose et blonde
dans ta chemise; il faut que je t’embrasse.
madame. — Oh! ce baiser!
VERMOUTH
ASTI-SPUMANTE
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Le rire rouge: édition de guerre du journal le rire
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsdatum
um 1916
Entstehungsdatum (normiert)
1911 - 1921
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
In Copyright (InC) / Urheberrechtsschutz
Creditline
Le rire rouge, 1916, No. 63 (29 Janvier 1916), S. 9
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg