le corps de ballet anglais, et si, comme il est plus que probable,
le « traître » est bulgare!
Comment tous ces gens-là chanteront-ils en mesure? Comment
consentiront-ils à respecter l’union sacrée qui est une condition
essentielle pour la parfaite interprétation d’une oeuvre lyrique?
Imposera-t-on au baryton belge le supplice de presser sur son
cœur la forte chanteuse boche, et à la basse russe de mourir
d’amour pour la roucouleuse de Vienne?
Ne bénéficiera guère de cet état de choses que la grande scène
finale où la basse moscovite, le ténor français et le baryton belge
exécuteront, au dernier acte, le traître bulgare, avec accompa-
gnement de la fauvette italienne et manifestations chorégraphi-
ques de la troupe britannique.
Vous me direz qu’en choisissant un régisseur et un chef d’or-
chestre neutres on aura des chances de s’en tirer. Le directeqr
lui-même paraît en douter, puisqu’il a fait afficher dans le foyer
de son théâtre l’avis suivant, qui est un pendant à notre fameux
Taisez-vous ! Méfiez-vous !
« 1° Ne pas discuter la force et la valeur militaires des armées
en campagne. Ménagez plutôt votre voix pour la représentation;
« 2° Ne pas s’inquiéter des souverains qui pourraient perdre
leur trône. Songez plutôt à ne pas perdre votre engagement ici
même ;
« 3° Nous avons déjà la guerre des œuvres musicales; cela
suffit. »
Il est inutile d’insister sur l’opportunité de ces recommanda-
tions. L’auteur de ce règlement est évidemment un sage doublé
d’un humoriste, quelque chose comme un Solon qui aurait beau-
coup fréquenté Alphonse Allais.
Grâce à ces conseils raisonnables, peut-être évitera-t-on que
le foyer de l’Opéra de Chicago ne devienne un foyer de discorde.
*
* *
Qui donc soutenait que le prix des œufs augmente? Un journal
raconte une anecdote qui prouve qu’il y a des endroits où les
œufs sont pour rien... Pour rien, à la lettre!
PETIT MONTÉNÉGRO VIT ENCORE
— Après un an et demi, je croyais pourtant bien lui avoir cassé un
doigt.
— Le premier de ces messieurs!
Dessins de L. Métivet.
Il est vrai qu’il s’agit d’un marché aux œufs tout à fait parti-
culier, comme vous allez voir, et que beaucoup de consommateurs
préféreront continuer à les payer cinq ou six sous pièce plutôt
que de réclamer le bénéfice de la gratuité dans de semblables
conditions.
Le décor représente un champ entre les lignes russes et les
lignes allemandes. Dans ce champ, un soldat boche est tombé
avec une blessure qui l’immobilise à peu près, cependant que,
pour une quantité de raisons, les unes percutantes, les auti es
fusantes, personne n’ose venir le chercher.
Le temps passe, et le Boche commence à croire que c’est de
faim plutôt que de sa blessure qu’il va périr, lorsqu’il entend
un gloussement... Serait-ce un nouveau cri de ralliement des
ambulanciers? Il ouvre l’œil, et que voit-il? Il voit arriver une
brave poule, une dame de la Crête-Rouge, sans brassard, qui là,
dans le champ, à quelques pas de lui, pond un œuf!... Après
quoi elle s’en va tranquillement à ses occupations...
Se traîner jusqu’à l’œuf, le gober sans mouillettes, sans coque-
tier, et sans addition, est pour l’affamé Boche l’affaire d’un
instant.
Le lendemain, même manœuvre de la poule samaritaine, qui
récidive le surlendemain, et ainsi de suite pendant sept jours,
c’est-à-dire pendant tout le temps que le Teuton reste, comme
dit l’argot, en carafe... frappée ! Cet œuf, à la fois unique, gra-
tuit, quotidien et providentiel, sauva de la mort le soldat du
kaiser, et ainsi fut confirmée la grande valeur nutritive de
l’œuf et découvert le caractère charitable des poules.
L’histoire ne dit pas ce qu’a fait l’Allemand le jour de sa
délivrance pour témoigner sa reconnaissance à la volaille ravi-
tailleuse, mais, étant donné ce que l’on sait de l’àme boche, et
étant donnés certains précédents, il est facile de se l’imaginer.
Des Allemands, chacun sait cela, ont plusieurs fois, au cours de
cette campagne, massacré des majors français, des infirmiers,
des brancardiers, qui avaient recueilli ou relevé leurs blessés;
ils ont assassine Miss Cavell, qui avait aussi soigné les leurs... A
plus forte raison est-il permis de supposer que l’affamé n’a pas dû
s’embarrasser de scrupules surannés ! La poule qui l’a sauvé?
Soyez certain que le dernier jour il l’a mangée !
Et comme le mensonge fait partie du paquetage de tout
Austro-Boche, il est fort probable que, revenu en Allemagne,
l'amoché, prenant des airs avantageux pour « épater »> les
gretchens, racontera :
— La Russie? Le pays de l'immoralité!... Tel que vous me
voyez, j’y ai été nourri par une vieille cocotte qui me faisait les
yeux doux !
Troilà ce qu’il dira, au lieu de la vérité qui serait ceci : « J’ai
été miraculeusement sauvé en Russie par une poule qri me
faisait les œufs doux ! » le guetteur.
le « traître » est bulgare!
Comment tous ces gens-là chanteront-ils en mesure? Comment
consentiront-ils à respecter l’union sacrée qui est une condition
essentielle pour la parfaite interprétation d’une oeuvre lyrique?
Imposera-t-on au baryton belge le supplice de presser sur son
cœur la forte chanteuse boche, et à la basse russe de mourir
d’amour pour la roucouleuse de Vienne?
Ne bénéficiera guère de cet état de choses que la grande scène
finale où la basse moscovite, le ténor français et le baryton belge
exécuteront, au dernier acte, le traître bulgare, avec accompa-
gnement de la fauvette italienne et manifestations chorégraphi-
ques de la troupe britannique.
Vous me direz qu’en choisissant un régisseur et un chef d’or-
chestre neutres on aura des chances de s’en tirer. Le directeqr
lui-même paraît en douter, puisqu’il a fait afficher dans le foyer
de son théâtre l’avis suivant, qui est un pendant à notre fameux
Taisez-vous ! Méfiez-vous !
« 1° Ne pas discuter la force et la valeur militaires des armées
en campagne. Ménagez plutôt votre voix pour la représentation;
« 2° Ne pas s’inquiéter des souverains qui pourraient perdre
leur trône. Songez plutôt à ne pas perdre votre engagement ici
même ;
« 3° Nous avons déjà la guerre des œuvres musicales; cela
suffit. »
Il est inutile d’insister sur l’opportunité de ces recommanda-
tions. L’auteur de ce règlement est évidemment un sage doublé
d’un humoriste, quelque chose comme un Solon qui aurait beau-
coup fréquenté Alphonse Allais.
Grâce à ces conseils raisonnables, peut-être évitera-t-on que
le foyer de l’Opéra de Chicago ne devienne un foyer de discorde.
*
* *
Qui donc soutenait que le prix des œufs augmente? Un journal
raconte une anecdote qui prouve qu’il y a des endroits où les
œufs sont pour rien... Pour rien, à la lettre!
PETIT MONTÉNÉGRO VIT ENCORE
— Après un an et demi, je croyais pourtant bien lui avoir cassé un
doigt.
— Le premier de ces messieurs!
Dessins de L. Métivet.
Il est vrai qu’il s’agit d’un marché aux œufs tout à fait parti-
culier, comme vous allez voir, et que beaucoup de consommateurs
préféreront continuer à les payer cinq ou six sous pièce plutôt
que de réclamer le bénéfice de la gratuité dans de semblables
conditions.
Le décor représente un champ entre les lignes russes et les
lignes allemandes. Dans ce champ, un soldat boche est tombé
avec une blessure qui l’immobilise à peu près, cependant que,
pour une quantité de raisons, les unes percutantes, les auti es
fusantes, personne n’ose venir le chercher.
Le temps passe, et le Boche commence à croire que c’est de
faim plutôt que de sa blessure qu’il va périr, lorsqu’il entend
un gloussement... Serait-ce un nouveau cri de ralliement des
ambulanciers? Il ouvre l’œil, et que voit-il? Il voit arriver une
brave poule, une dame de la Crête-Rouge, sans brassard, qui là,
dans le champ, à quelques pas de lui, pond un œuf!... Après
quoi elle s’en va tranquillement à ses occupations...
Se traîner jusqu’à l’œuf, le gober sans mouillettes, sans coque-
tier, et sans addition, est pour l’affamé Boche l’affaire d’un
instant.
Le lendemain, même manœuvre de la poule samaritaine, qui
récidive le surlendemain, et ainsi de suite pendant sept jours,
c’est-à-dire pendant tout le temps que le Teuton reste, comme
dit l’argot, en carafe... frappée ! Cet œuf, à la fois unique, gra-
tuit, quotidien et providentiel, sauva de la mort le soldat du
kaiser, et ainsi fut confirmée la grande valeur nutritive de
l’œuf et découvert le caractère charitable des poules.
L’histoire ne dit pas ce qu’a fait l’Allemand le jour de sa
délivrance pour témoigner sa reconnaissance à la volaille ravi-
tailleuse, mais, étant donné ce que l’on sait de l’àme boche, et
étant donnés certains précédents, il est facile de se l’imaginer.
Des Allemands, chacun sait cela, ont plusieurs fois, au cours de
cette campagne, massacré des majors français, des infirmiers,
des brancardiers, qui avaient recueilli ou relevé leurs blessés;
ils ont assassine Miss Cavell, qui avait aussi soigné les leurs... A
plus forte raison est-il permis de supposer que l’affamé n’a pas dû
s’embarrasser de scrupules surannés ! La poule qui l’a sauvé?
Soyez certain que le dernier jour il l’a mangée !
Et comme le mensonge fait partie du paquetage de tout
Austro-Boche, il est fort probable que, revenu en Allemagne,
l'amoché, prenant des airs avantageux pour « épater »> les
gretchens, racontera :
— La Russie? Le pays de l'immoralité!... Tel que vous me
voyez, j’y ai été nourri par une vieille cocotte qui me faisait les
yeux doux !
Troilà ce qu’il dira, au lieu de la vérité qui serait ceci : « J’ai
été miraculeusement sauvé en Russie par une poule qri me
faisait les œufs doux ! » le guetteur.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Petit Monténégro vit encore; La Femme coiffeur
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
Le rire rouge: édition de guerre du journal le rire
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsdatum
um 1916
Entstehungsdatum (normiert)
1911 - 1921
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
Public Domain Mark 1.0
Creditline
Le rire rouge, 1916, No. 64 (5 Février 1916), S. 4
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg