CARTES DE GUERRE
— Tu perdras, Germania! Tes rois ne sont que des valets et j’ai tous les as.
A Vescadrille des cigognes.
LE RIRE DE LA SEMAINE
Réflexion peu galante d’un monsieur qui, en soirée, lorgne la
poitrine d’une dame maigre :
— Herriot triomphe...: le voilà bien, le régime des deux
plats !
Heureusement, il y a nombre de bonnes Françaises qui ne
poussent pas jusque-là le respect des décisions ministérielles.
D’ailleurs, les deux plats peuvent être très appétissants... Il
sera même plus difficile qu’auparavant pour les restaurants de
se maintenir à la hauteur de leur réputation en bornant, pour
chaque client, leur menu à deux plats. C’est que la médiocrité
ne leur sera plus permise, le gourmet ne pouvant faire emporter
le veau trop cuit pour le remplacer par une poularde sur crous-
tades. Ce qui est servi est servi !
Adieu,^veau, vache, cochon, couvée! Il faudra se borner à
deux, au plus, de ces plats du jour...
Et comme si ces privations n’étaient pas assez douloureuses
pour les estomacs de nos sybarites, voilà que c’en est fait, deux
fois par semaine, des petits pâtés.
En dépit de l’union sacrée, les religieuses seront proscrites le
lundi et le mardi ; il est vrai que les conservateurs pourront con-
tinuer à déguster tous les jours les pets-de-nonne... A l’Inté-
rieur, il n’y aura d’éclairs que cinq jours par semaine ; au front,
sous les tirs de barrage, nos poilus, plus privilégiés, en auront
tout le temps. Et les babas? Deux jours sans babas... C’est
affreux ! Mais, à cause du rhum, la ligue antialcoolique trouve
que c’est très bien.
Seulement, voilà, toutes ces mesures, excellentes dans leurs
principes, seront à peu près inefficaces dans leur application.
Il y a toujours des cafés où les habitués peuvent, discrètement,
siroter leur absinthe, laquelle s’est transformée en « élixir de la
maison ». Il y aura, de même, des restaurants où, après un col-
loque mystérieux avec le maitre d’hôtel, le client pourra se
faire apporter un troisième petit plat — lequel sera compté
sur la carte comme dessert.
L élixir de la maison se vend trente ou quarante sous ; le troi-
sième plat, même s’il est froid, sera plutôt chaud... Mais qu’im-
porte? Il paraîtra exquis, car il sera le plat défendu 1
* * Certes, il n’y a pas de disette, mais, en France, on
constate la disparition fâcheuse de beaucoup de cochons.
En 1914, lors de la mobilisation, nous comptions sous notre
beau ciel 7.5U0.000 cochons.
Pas plus, non, madame.
Aujourd’hui, il n’y en a plus que 4 millions. Et ce dernier
carré fond à vue d’œil sous le coutelas des charcutiers.
11 est temps, vraiment, de parer à cette crise des compagnons
de saint Antoine. Je propose la création d'une Ligue des Amis
du Cochon (L. A. C.) que nous placerons sous la présidence
d’honneur de feu Monselet.
Or, quoi de plus facile que de repeupler quand il s’agit de
cochons ?
Les cochons, c’est comme les lapins, c’est toujours prêt à
croître et à multiplier. Ils ne font pas de manières et ne s’em-
barrassent pas de préjugés.
Exemple : j’ai connu un cochon qui, confronté avec une co-
chonne, lui fit six ou huit petits. Après quoi, il fut enfermé dans
un cabinet particulier avec sa mère, à laquelle, sans vergogne,
il fit également une demi-douzaine de petits cochons. Comme il
' était en verve, on vous lui fit faire des cochonneries avec ses
sœurs... Résultats : je ne sais combien de petits cochons. Entre
temps, ses filles avaient grandi. Elles étaient à peine pubères
que déjà il les avait toutes fécondées : ci, un nombre incalcu-
lable de petits cochons.
Voilà, n’est-ce pas, un fâcheux cochon?
Eh bien, le Président de la République, bien loin de le faire
condamner à une peine afflictive et infamante, avec privation de
ses droits civils et politiques, l’a distingué au milieu de tous les
cochons de France et de Navarre et lui a remis une belle mé-
daille.
Ce fut une cérémonie très émouvante. J’y ai assisté... : cela se
passait au Concours agricole.
* * * « Les Français, disait Henri Heine, sont les comédiens
ordinaires du bon Dieu. »
M’est avis qu’ils sont encore meilleurs dans la tragédie et que
les Allemands sont plutôt les pitres ordinaires du vieux bon
Dieu... Quoi de plus comique que ce kaiser qui, après avoir dé-
chaîné l’horrible guerre, joue maintenant les petits saints et sou-
pire :
— Tu perdras, Germania! Tes rois ne sont que des valets et j’ai tous les as.
A Vescadrille des cigognes.
LE RIRE DE LA SEMAINE
Réflexion peu galante d’un monsieur qui, en soirée, lorgne la
poitrine d’une dame maigre :
— Herriot triomphe...: le voilà bien, le régime des deux
plats !
Heureusement, il y a nombre de bonnes Françaises qui ne
poussent pas jusque-là le respect des décisions ministérielles.
D’ailleurs, les deux plats peuvent être très appétissants... Il
sera même plus difficile qu’auparavant pour les restaurants de
se maintenir à la hauteur de leur réputation en bornant, pour
chaque client, leur menu à deux plats. C’est que la médiocrité
ne leur sera plus permise, le gourmet ne pouvant faire emporter
le veau trop cuit pour le remplacer par une poularde sur crous-
tades. Ce qui est servi est servi !
Adieu,^veau, vache, cochon, couvée! Il faudra se borner à
deux, au plus, de ces plats du jour...
Et comme si ces privations n’étaient pas assez douloureuses
pour les estomacs de nos sybarites, voilà que c’en est fait, deux
fois par semaine, des petits pâtés.
En dépit de l’union sacrée, les religieuses seront proscrites le
lundi et le mardi ; il est vrai que les conservateurs pourront con-
tinuer à déguster tous les jours les pets-de-nonne... A l’Inté-
rieur, il n’y aura d’éclairs que cinq jours par semaine ; au front,
sous les tirs de barrage, nos poilus, plus privilégiés, en auront
tout le temps. Et les babas? Deux jours sans babas... C’est
affreux ! Mais, à cause du rhum, la ligue antialcoolique trouve
que c’est très bien.
Seulement, voilà, toutes ces mesures, excellentes dans leurs
principes, seront à peu près inefficaces dans leur application.
Il y a toujours des cafés où les habitués peuvent, discrètement,
siroter leur absinthe, laquelle s’est transformée en « élixir de la
maison ». Il y aura, de même, des restaurants où, après un col-
loque mystérieux avec le maitre d’hôtel, le client pourra se
faire apporter un troisième petit plat — lequel sera compté
sur la carte comme dessert.
L élixir de la maison se vend trente ou quarante sous ; le troi-
sième plat, même s’il est froid, sera plutôt chaud... Mais qu’im-
porte? Il paraîtra exquis, car il sera le plat défendu 1
* * Certes, il n’y a pas de disette, mais, en France, on
constate la disparition fâcheuse de beaucoup de cochons.
En 1914, lors de la mobilisation, nous comptions sous notre
beau ciel 7.5U0.000 cochons.
Pas plus, non, madame.
Aujourd’hui, il n’y en a plus que 4 millions. Et ce dernier
carré fond à vue d’œil sous le coutelas des charcutiers.
11 est temps, vraiment, de parer à cette crise des compagnons
de saint Antoine. Je propose la création d'une Ligue des Amis
du Cochon (L. A. C.) que nous placerons sous la présidence
d’honneur de feu Monselet.
Or, quoi de plus facile que de repeupler quand il s’agit de
cochons ?
Les cochons, c’est comme les lapins, c’est toujours prêt à
croître et à multiplier. Ils ne font pas de manières et ne s’em-
barrassent pas de préjugés.
Exemple : j’ai connu un cochon qui, confronté avec une co-
chonne, lui fit six ou huit petits. Après quoi, il fut enfermé dans
un cabinet particulier avec sa mère, à laquelle, sans vergogne,
il fit également une demi-douzaine de petits cochons. Comme il
' était en verve, on vous lui fit faire des cochonneries avec ses
sœurs... Résultats : je ne sais combien de petits cochons. Entre
temps, ses filles avaient grandi. Elles étaient à peine pubères
que déjà il les avait toutes fécondées : ci, un nombre incalcu-
lable de petits cochons.
Voilà, n’est-ce pas, un fâcheux cochon?
Eh bien, le Président de la République, bien loin de le faire
condamner à une peine afflictive et infamante, avec privation de
ses droits civils et politiques, l’a distingué au milieu de tous les
cochons de France et de Navarre et lui a remis une belle mé-
daille.
Ce fut une cérémonie très émouvante. J’y ai assisté... : cela se
passait au Concours agricole.
* * * « Les Français, disait Henri Heine, sont les comédiens
ordinaires du bon Dieu. »
M’est avis qu’ils sont encore meilleurs dans la tragédie et que
les Allemands sont plutôt les pitres ordinaires du vieux bon
Dieu... Quoi de plus comique que ce kaiser qui, après avoir dé-
chaîné l’horrible guerre, joue maintenant les petits saints et sou-
pire :