PROTESTATION ET BOUDDHERIE DE LA CHINE
— Alors, quoi ? même entre vieux dieux il n’y a pas moyen de s’entendre?
LE RIRE DE LA SEMAINE
On chante dans un opéra italien :
La donna è mobile.
Bien mieux, elle ne tardera pas à être mobilisée... Si je com-
prends bien la situation, voici où nous en serons bientôt :
Tous les hommes jeunes au front.
Tous les vieillards à l’arrière.
Toutes les femmes à l’intérieur (c’est d’ailleurs la place des
honnêtes femmes).
Tout le monde mobilisé, sauf les enfants, et encore !
Et dire que nos grands prophètes en matière d’art militaire
déclaraient doctement avant 1915 :
— La guerre ne durera pas trois mois, aucun peuple ne pou-
vant supporter plus longtemps le fardeau moral et financier de
la mobilisation générale.
La mobilisation générale, c’était celle des premiers jours, et
elle n’était que particulière. Depuis, nous l’avons singulière-
ment renforcée... Ce n’est pas fini. Il y en a même qui disent
que cela ne fait que commencer.
Or, nous tenons, nos ennemis tiennent, tout le monde tient,
et il y aura bientôt trois ans que dure cette situation à laquelle
nos prophètes accordaient tout juste le délai d’un trimestre.
Cette guerre a renversé toutes les idées admises jadis comme
d’incontestables vérités.
J ai comme une idée qu’il en sera de même de la paix.
La paix ne ressemblera pas plus à la paix que nous entre-
voyons que la guerre n’a ressemblé à la guerre qu’on nous pro-
phétisait.
Les conditions matérielles et morales de 1’ « âge d’or » qui nous
est promis seront certainement fort extraordinaires.
— Quelles seront-elles ? me demandez-vous.
Ab ! non ; il suffirait qu’on risque des pronostics, pour que
l’avenir se charge de faire tout le contraire.
Je crois cependaut que la situation des hommes sera toute
nouvelle; celle des femmes aussi...
Quant à celle des Auvergnats, elle a déjà changé et en mieux,
car le commerce du charbon les a tous transformés en million-
naires.
* * ^ Il faut bien que tous les millions que nous dépensons
aillent quelque part...
Certes, un certain nombre d’entre eux émigrent chez les
neutres ; mais les autres ?
Les autres s’embusquent chez les « installés de la guerre »
ne faudra-t-il pas un jour les débusquer?
Je connais un charmant confrère, d’ailleurs mobilisé dans les
« services de propagande », qui a obtenu pour sa maîtresse un
bon de commande de 400 camions automobiles américains.
La « petite dame » n’a touché que mille francs de commission
par camion, — car elle est patriote et même honnête.
Ci, 400.000 francs.
Comme petit cadeau, c’est assez gentil, même si la poulette
doit compter avec une ristourne à son petit ami.
Le nombre de jeunes personnes qui se sont fait offrir ainsi
par Marianne un gentil mobilier en acajou tend à devenir con-
sidérable...
L’une d’elles me disait :
— Que voulez-vous? Je ne peux cependant pas vivre avec
l’allocation de 1 fr. 25 par jour, surtout au prix où sont mainte-
nant les cigarettes égyptiennes !... Alors, il y a les affaires.
Jadis les affaires, ça entravait plutôt leur petite industrie. Mais
la guerre a changé cela aussi...
Le tout, en ces temps de lutte, est de savoir se débrouiller :
système D...! Mais vous verrez qu’après la victoire, les plus
cyniques débrouillards renieront cette initiale pour revenir aux
classiques R. F... Cette blague ! Ils avaient monopolisé la lettre
D : ils remonopoliseront les lettres R. F. Il n’y aura rien de
changé en France : il n’y aura qu’a? Français de moins.
* * * En attendant, nous voici obligés — sans métaphore —
à laver notre linge sale en famille.
Les blanchisseuses, reine en tête, ont lâché, faute de charbon,
le fer à repasser, lequel fer à repasser va se transformer en
obus...
Nous subissons, dans toute sa sévérité, la loi du linge... Telle
professional beauty adopte pour ses chemises la couleur isa-
belle, voire kaki : qu’allez-vous devenir, mousselines vapo-
reuses, dessous immaculés, galantes expositions de blanc?
Comme au temps de la reine Anne, la plus coquette aura deux
— Alors, quoi ? même entre vieux dieux il n’y a pas moyen de s’entendre?
LE RIRE DE LA SEMAINE
On chante dans un opéra italien :
La donna è mobile.
Bien mieux, elle ne tardera pas à être mobilisée... Si je com-
prends bien la situation, voici où nous en serons bientôt :
Tous les hommes jeunes au front.
Tous les vieillards à l’arrière.
Toutes les femmes à l’intérieur (c’est d’ailleurs la place des
honnêtes femmes).
Tout le monde mobilisé, sauf les enfants, et encore !
Et dire que nos grands prophètes en matière d’art militaire
déclaraient doctement avant 1915 :
— La guerre ne durera pas trois mois, aucun peuple ne pou-
vant supporter plus longtemps le fardeau moral et financier de
la mobilisation générale.
La mobilisation générale, c’était celle des premiers jours, et
elle n’était que particulière. Depuis, nous l’avons singulière-
ment renforcée... Ce n’est pas fini. Il y en a même qui disent
que cela ne fait que commencer.
Or, nous tenons, nos ennemis tiennent, tout le monde tient,
et il y aura bientôt trois ans que dure cette situation à laquelle
nos prophètes accordaient tout juste le délai d’un trimestre.
Cette guerre a renversé toutes les idées admises jadis comme
d’incontestables vérités.
J ai comme une idée qu’il en sera de même de la paix.
La paix ne ressemblera pas plus à la paix que nous entre-
voyons que la guerre n’a ressemblé à la guerre qu’on nous pro-
phétisait.
Les conditions matérielles et morales de 1’ « âge d’or » qui nous
est promis seront certainement fort extraordinaires.
— Quelles seront-elles ? me demandez-vous.
Ab ! non ; il suffirait qu’on risque des pronostics, pour que
l’avenir se charge de faire tout le contraire.
Je crois cependaut que la situation des hommes sera toute
nouvelle; celle des femmes aussi...
Quant à celle des Auvergnats, elle a déjà changé et en mieux,
car le commerce du charbon les a tous transformés en million-
naires.
* * ^ Il faut bien que tous les millions que nous dépensons
aillent quelque part...
Certes, un certain nombre d’entre eux émigrent chez les
neutres ; mais les autres ?
Les autres s’embusquent chez les « installés de la guerre »
ne faudra-t-il pas un jour les débusquer?
Je connais un charmant confrère, d’ailleurs mobilisé dans les
« services de propagande », qui a obtenu pour sa maîtresse un
bon de commande de 400 camions automobiles américains.
La « petite dame » n’a touché que mille francs de commission
par camion, — car elle est patriote et même honnête.
Ci, 400.000 francs.
Comme petit cadeau, c’est assez gentil, même si la poulette
doit compter avec une ristourne à son petit ami.
Le nombre de jeunes personnes qui se sont fait offrir ainsi
par Marianne un gentil mobilier en acajou tend à devenir con-
sidérable...
L’une d’elles me disait :
— Que voulez-vous? Je ne peux cependant pas vivre avec
l’allocation de 1 fr. 25 par jour, surtout au prix où sont mainte-
nant les cigarettes égyptiennes !... Alors, il y a les affaires.
Jadis les affaires, ça entravait plutôt leur petite industrie. Mais
la guerre a changé cela aussi...
Le tout, en ces temps de lutte, est de savoir se débrouiller :
système D...! Mais vous verrez qu’après la victoire, les plus
cyniques débrouillards renieront cette initiale pour revenir aux
classiques R. F... Cette blague ! Ils avaient monopolisé la lettre
D : ils remonopoliseront les lettres R. F. Il n’y aura rien de
changé en France : il n’y aura qu’a? Français de moins.
* * * En attendant, nous voici obligés — sans métaphore —
à laver notre linge sale en famille.
Les blanchisseuses, reine en tête, ont lâché, faute de charbon,
le fer à repasser, lequel fer à repasser va se transformer en
obus...
Nous subissons, dans toute sa sévérité, la loi du linge... Telle
professional beauty adopte pour ses chemises la couleur isa-
belle, voire kaki : qu’allez-vous devenir, mousselines vapo-
reuses, dessous immaculés, galantes expositions de blanc?
Comme au temps de la reine Anne, la plus coquette aura deux