AH! LES COCHONS... JE LES AURAI!
Deux heures et demie. La blonde Andrée dès Volyère sort de
chez elle en trombe. Après avoir abasourdi sa concierge d’un
verbiage superflu pour demander son courrier et le temps qu’il
fera le jour de l’Assomption, elle se précipite dans la rue avec
rapidité.
Pas le moindre taxi en station. Les autobus invariablement
complets. Reste le métro. C’est le plus sûr moyen de ne pas
rater le rendez-vous du gros Brézemont, 'qui a séduit facile-
ment la belle enfant par l’appât de quelques coupures impor-
tantes. Il faut vivre. Ce ne sont pas les 3 fr. 50 que lui alloue
journellement par contrarie directeur des Folies Impériales qui
peuvent assurer le confort moderne et l’argent de poche d’une
jolie femme.
Elle prend un ticket de première, saute en seconde, pour
arriver plus vite, parait-il ! Après avoir éborgné avec un paradis
de quinze louis un croque-mort rubescent, elle fourre son para-
pluie dans la culotte d’un zouave convalescent et vient échouer
sur les genoux d’une vieille dame somnolente. Tant bien que
mal, elle finit par se caser entre une nourrice en sortie de
détente et un garçon épicier bénévole.
Au bout de trois stations, le nombre et la variété des voya-
geurs deviennent inquiétants, mais cela va si vite que c’est un
bonheur de voyager en commun, c’est du moins ce qu’affirme
un groupe imposant de kabyles en rupture de balai.
— Écoute ! Nous avons fait des provisions de pommes de terre, de
charbon, etc..., etc... Nous pouvons bien faire des provisions d’« objets
de luxe » avant qu’ils soient frappés de cet impôt de 10 0/0.
Dessin de M. Radigüet.
Soudain, la figure de l’élégante voyageuse se contracte et
passe du plaisant au sévère par tous les tons d’un super-camou-
flage. Au premier arrêt, elle bondit hors du wagon en murmu-
rant, sûr une modulation chromatique, le mot qu’illustra un
célèbre général de grande épopée.
Revenue au grand jour, son inquiétude ne fait que s’accroître.
Elle arpente fiévreusement l’asphalte. De paisibles promeneurs
la regardent curieusement ; mais soudain elle s’arrête, semble
avoir découvert ce qu’elle cherchait, au grand ahurissement
d’un employé, du gaz et d’un lancier belge, s’écrie avec un
accent cornélien : « Ah ! les cochons, je les aurai ! » et se pré-
cipite dans un hôtel meublé.
Plus de doute! C’est un drame passionnel! Le fonction-
naire municipal l’affirme à l’homme blond des Flandres qui
cherche l’appui de
cette thèse auprès
d’un vieux mar-
cheur qui s’était
mis à suivre An-
drée des Volyère.
— Faut prévenir
LA VIE N’EST PAS GAIE !...
Interdiction de consommer
dans les pâtisseries.
1 6oo G-1
IrllftVAILUNfô
Dire que nous allons être privés de ce spectacle !
Dessin de O’Galop.
— Chic ! j’ai droit à la ration des grands tra-
vailleurs : je suis le premier de ma classe!
Dessin de Rajky.
Deux heures et demie. La blonde Andrée dès Volyère sort de
chez elle en trombe. Après avoir abasourdi sa concierge d’un
verbiage superflu pour demander son courrier et le temps qu’il
fera le jour de l’Assomption, elle se précipite dans la rue avec
rapidité.
Pas le moindre taxi en station. Les autobus invariablement
complets. Reste le métro. C’est le plus sûr moyen de ne pas
rater le rendez-vous du gros Brézemont, 'qui a séduit facile-
ment la belle enfant par l’appât de quelques coupures impor-
tantes. Il faut vivre. Ce ne sont pas les 3 fr. 50 que lui alloue
journellement par contrarie directeur des Folies Impériales qui
peuvent assurer le confort moderne et l’argent de poche d’une
jolie femme.
Elle prend un ticket de première, saute en seconde, pour
arriver plus vite, parait-il ! Après avoir éborgné avec un paradis
de quinze louis un croque-mort rubescent, elle fourre son para-
pluie dans la culotte d’un zouave convalescent et vient échouer
sur les genoux d’une vieille dame somnolente. Tant bien que
mal, elle finit par se caser entre une nourrice en sortie de
détente et un garçon épicier bénévole.
Au bout de trois stations, le nombre et la variété des voya-
geurs deviennent inquiétants, mais cela va si vite que c’est un
bonheur de voyager en commun, c’est du moins ce qu’affirme
un groupe imposant de kabyles en rupture de balai.
— Écoute ! Nous avons fait des provisions de pommes de terre, de
charbon, etc..., etc... Nous pouvons bien faire des provisions d’« objets
de luxe » avant qu’ils soient frappés de cet impôt de 10 0/0.
Dessin de M. Radigüet.
Soudain, la figure de l’élégante voyageuse se contracte et
passe du plaisant au sévère par tous les tons d’un super-camou-
flage. Au premier arrêt, elle bondit hors du wagon en murmu-
rant, sûr une modulation chromatique, le mot qu’illustra un
célèbre général de grande épopée.
Revenue au grand jour, son inquiétude ne fait que s’accroître.
Elle arpente fiévreusement l’asphalte. De paisibles promeneurs
la regardent curieusement ; mais soudain elle s’arrête, semble
avoir découvert ce qu’elle cherchait, au grand ahurissement
d’un employé, du gaz et d’un lancier belge, s’écrie avec un
accent cornélien : « Ah ! les cochons, je les aurai ! » et se pré-
cipite dans un hôtel meublé.
Plus de doute! C’est un drame passionnel! Le fonction-
naire municipal l’affirme à l’homme blond des Flandres qui
cherche l’appui de
cette thèse auprès
d’un vieux mar-
cheur qui s’était
mis à suivre An-
drée des Volyère.
— Faut prévenir
LA VIE N’EST PAS GAIE !...
Interdiction de consommer
dans les pâtisseries.
1 6oo G-1
IrllftVAILUNfô
Dire que nous allons être privés de ce spectacle !
Dessin de O’Galop.
— Chic ! j’ai droit à la ration des grands tra-
vailleurs : je suis le premier de ma classe!
Dessin de Rajky.