LA REPRISE DES AFFAIRES
ELYNE COLLECTIONNE...
Avec les deux, grasses colombes au bec de corail rose qu’elle
a sur la poitrine, son col de cygne, et le charmant nid, sombre
et secret, de son corps blanc, qui attire tous les désirs comme
des oiseaux hardis, cette petite volaille d’Elyne, qui ne fut
jamais une oie blanche, est une véritable dinde, — une charmante
dinde d’ailleurs, truffée de noir où il faut, et que maint canapé
accueillerait avec le gémissement d’aise de tous ses ressorts.
Mais elle est d’une naïveté prodigieuse !
Pour l’heure, elle a comme protecteur M. de Caposte, un
vieux noble dont l’œil retient un hautain monocle dans les griffes
d’une cruelle patte d’oie. C’est un acharné collectionneur et
comme son arrière-grand-oncle fut colonel sous le Premier Em-
pire, il n’est en quête que de glorieux débris de cette époque,
de souvenirs napoléoniens. 11 est toujours en train de fureter
chez les antiquaires, quand il n'est point dans les bras d’Elyne,
dont il a fait la connaissance voici peu de temps. Le bonhomme
à patte d’oie et la
délicieuse petite
les étrennes dinde s’accordent
au mieux. Il l’a
mise dans son pou-
lailler, — pardon !
dans ses meubles.
LA PAIX EST SIGNÉE
le russe. — Et maintenant je rentre chez moi! Et toi?
le bociie. — Teufel ! Moi, on m’envoie sur le front occidental!
Dessin de Marcel Arnac.
Toutefois, jusqu’au mois dernier, il n’avait pas admis sa jolie
conquête à visiter la célèbre colleotion qui l’a fait membre de
l’Institut. 11 y a enfin consenti. Elyne a dédaigné les casques,
les baudriers, les sabres, tous les uniformes en proie aux mites,
un petit chapeau même de Napoléon. Mais elle a été tout de
suite captivée par une magnifique collection de bonnets à poil,
l’orgueil de M. de Caposte. 11 y en a d’une taille prodigieuse
avec des plumets géants. Certains, tout dépoilés, avec de larges
plaques chauves, semblent atteints d’une sublime et inguéris-
sable pelade. Le temps a passé dessus sa pâte épilatoire. Ils sont
alignés dans des vitrines.
— Ça, c’est rigolo! murmure Elyne en extase.
— Ce sont des bonnets d’ourson, explique M. de Caposte.
Le lendemain, lorsque M. de Caposte se présente chez Elyne,
celle-ci le reçoit avec une amoureuse gentillesse, mais elle
refuse formellement de le laisser pénétrer au salon.
— C’est vous, le vidangeur? C’est une plaisan-
terie: avec toutes les restrictions, vous avez encore
quelque chose à faire, vous?...
Dessin de M. Rauiguet.
— Qui est-ce donc?... Caillaux?
— Non : du tabac. Dessin de Raymond Pai.uer.
Adresse à conserver. — Le Docteur Calluce, 8, rue Villebois-Mareuil, Paris, affirme
que l’électricité seule détruit les poils et duvets, radicalement et pour toujours. Traite
difformités, .rides, cicatrices. Consulter ou écrire.
ELYNE COLLECTIONNE...
Avec les deux, grasses colombes au bec de corail rose qu’elle
a sur la poitrine, son col de cygne, et le charmant nid, sombre
et secret, de son corps blanc, qui attire tous les désirs comme
des oiseaux hardis, cette petite volaille d’Elyne, qui ne fut
jamais une oie blanche, est une véritable dinde, — une charmante
dinde d’ailleurs, truffée de noir où il faut, et que maint canapé
accueillerait avec le gémissement d’aise de tous ses ressorts.
Mais elle est d’une naïveté prodigieuse !
Pour l’heure, elle a comme protecteur M. de Caposte, un
vieux noble dont l’œil retient un hautain monocle dans les griffes
d’une cruelle patte d’oie. C’est un acharné collectionneur et
comme son arrière-grand-oncle fut colonel sous le Premier Em-
pire, il n’est en quête que de glorieux débris de cette époque,
de souvenirs napoléoniens. 11 est toujours en train de fureter
chez les antiquaires, quand il n'est point dans les bras d’Elyne,
dont il a fait la connaissance voici peu de temps. Le bonhomme
à patte d’oie et la
délicieuse petite
les étrennes dinde s’accordent
au mieux. Il l’a
mise dans son pou-
lailler, — pardon !
dans ses meubles.
LA PAIX EST SIGNÉE
le russe. — Et maintenant je rentre chez moi! Et toi?
le bociie. — Teufel ! Moi, on m’envoie sur le front occidental!
Dessin de Marcel Arnac.
Toutefois, jusqu’au mois dernier, il n’avait pas admis sa jolie
conquête à visiter la célèbre colleotion qui l’a fait membre de
l’Institut. 11 y a enfin consenti. Elyne a dédaigné les casques,
les baudriers, les sabres, tous les uniformes en proie aux mites,
un petit chapeau même de Napoléon. Mais elle a été tout de
suite captivée par une magnifique collection de bonnets à poil,
l’orgueil de M. de Caposte. 11 y en a d’une taille prodigieuse
avec des plumets géants. Certains, tout dépoilés, avec de larges
plaques chauves, semblent atteints d’une sublime et inguéris-
sable pelade. Le temps a passé dessus sa pâte épilatoire. Ils sont
alignés dans des vitrines.
— Ça, c’est rigolo! murmure Elyne en extase.
— Ce sont des bonnets d’ourson, explique M. de Caposte.
Le lendemain, lorsque M. de Caposte se présente chez Elyne,
celle-ci le reçoit avec une amoureuse gentillesse, mais elle
refuse formellement de le laisser pénétrer au salon.
— C’est vous, le vidangeur? C’est une plaisan-
terie: avec toutes les restrictions, vous avez encore
quelque chose à faire, vous?...
Dessin de M. Rauiguet.
— Qui est-ce donc?... Caillaux?
— Non : du tabac. Dessin de Raymond Pai.uer.
Adresse à conserver. — Le Docteur Calluce, 8, rue Villebois-Mareuil, Paris, affirme
que l’électricité seule détruit les poils et duvets, radicalement et pour toujours. Traite
difformités, .rides, cicatrices. Consulter ou écrire.