LE PRÉSIDENT NOËL
... et, comme de juste, il est accompagné de l’oncle Fouettard.
LE RIRE DE LA SEMAINE
Alfred Capus a parlé de ces salons où règne le snobisme révo-
lutionnaire... Ce sont de grandes dames, de très grandes darnes
qui, recevant chez elles des bolchevistes du monde et de la poli-
tique, disent avec orgueil :
— J’ai mon petit Soviet!
Où le snobisme va-t-il se nicher?
Dans ces salons qui, pour être classés, n’en organisent pas
moins la lutte des classes, on jongle avec les paradoxes les plus
extraordinaires.
la baronne. — Avez-vous remarqué les toits de mon hôtel ?
Rien de plus confortable pour des mitrailleuses !
le cercleux. — Ce serait amusant de voir la panique des bour-
geois !
la reine du tango. — Oui, nous les ferions danser!
la baronne. — Cela m’amuserait d’assister au grand soir...; je
me mettrais en peau!
le vieux beau. — Au fond, la révolution sociale, ce serait plus
amusant que la guerre !
la baronne. — Je m’engage comme infirmière dans la garde
rouge...
le député extrémiste. — Chère madame, nous allons orga-
niser ça... Le dernier cotillon, — avec des bombes comme acces-
soires !
la baronne. — Oui, mais dépêchez-vous, car je vais partir
pour la Côte d’azur!...
Ces « décadents » n’ont pas l’air de se douter qu’ils seraient
les premières victimes d’un bolchevisme qui leur paraît pitto-
resque, fantaisiste et rigolo.
La baronne n’a donc pas entendu parler des grandes dames
de Petrograd qui, en échange de deux harengs quotidiens, sont
obligées de balayer la neige et de vider les poubelles?
Certes, de tout temps, il y a, à Paris, des cénacles mondains
où l’anarchie est de bon ton, où l’on ne passe pour avoir de
l’esprit qu’à la condition d’admirer Marat et Robespierre, où
d’élégantes personnes, tout en minaudant autour des tasses de
thé, déclarent tranquillement ‘.
— Ce Ravachol avait quelque chose là... Et quel dommage
qu’on ne m’ait jamais présenté Louise Michel !...
Tant qu’il ne s’agit que d’attitudes et de boutades, cela n’est
pas grave (bien que...). Mais il ne faudrait rien exagérer. En
Russie, le bolchevisme a commencé à la cour du tsar : des
grands-ducs trouvaient très drôle d’inviter Caliban à faire des
siennes...
Prenons garde, ne jouons pas avec le feu, n’agitons pas le
chiffon rouge, — cela pourrait exciter le taureau populaire.
Et dame, alors, il faudrait se réfugier bien vite derrière la
barrière.
S’il y en a encore une...
* * * On voit, on entend, on lit des choses extraordinaires.
L’autre jour, dans l'Information, je lis sous la signature de
M. Roland Chavenon, fils de notre éminent confrère Léon Cha-
venon, qui, depuis 1914, et même avant, a tout prédit, et que
nous avons eu bien tort de ne pas bombarder chef suprême des
armées de terre et de mer :
« La musique est un art, la peinture est un art; la littérature
n’existe pas. 11 n’y a pas d’art d’assembler les mots. Il suffit que
le mot corresponde à la pensée. 11 suffit de penser. La vérité, la
modernité, c’est de restituer enfin sa place à la pensée. On trou-
vera la forme dans les arts plastiques, le son dans la musique.
« Le théâtre me paraît un non-sens. Une pièce doit être lue.
La musique doit être entendue à part, le décor vu à part (domaine
de la peinture).
« Roland Chavenon. »
C’est un rien, mais ce rien est admirable.
« La littérature n’existe pas, » — et allez donc! « Il suffit de
penser. »... Comme c’est simple... On pense, on trouve les mots
qu’il faut, et voilà la littérature, pas plus, pas moinss...
Et ceci : « Le théâtre me paraît un non-sens. »
Tout simplement.
Un non-sens, le Cid, le Misanthrope, le Mariage de Figaro;
un non-sens, cette forme merveilleuse du génie humain qui fait
rire, pleurer, vivre sous nos yeux les personnages de Shakes-
peare, de Racine, de Hugo.
« Une pièce doit être lue, » et voilà!
« La musique doit etre entendue à part, le décor vu à part •
Nous irons .écouter la partition à la salle Caveau, puis nous
irons au Salon contempler la toile de fond et les portants.
Dire que personne n’avait encore pensé à cela !
Notre confrère Roland Chavenon est un penseur hardi, mais
... et, comme de juste, il est accompagné de l’oncle Fouettard.
LE RIRE DE LA SEMAINE
Alfred Capus a parlé de ces salons où règne le snobisme révo-
lutionnaire... Ce sont de grandes dames, de très grandes darnes
qui, recevant chez elles des bolchevistes du monde et de la poli-
tique, disent avec orgueil :
— J’ai mon petit Soviet!
Où le snobisme va-t-il se nicher?
Dans ces salons qui, pour être classés, n’en organisent pas
moins la lutte des classes, on jongle avec les paradoxes les plus
extraordinaires.
la baronne. — Avez-vous remarqué les toits de mon hôtel ?
Rien de plus confortable pour des mitrailleuses !
le cercleux. — Ce serait amusant de voir la panique des bour-
geois !
la reine du tango. — Oui, nous les ferions danser!
la baronne. — Cela m’amuserait d’assister au grand soir...; je
me mettrais en peau!
le vieux beau. — Au fond, la révolution sociale, ce serait plus
amusant que la guerre !
la baronne. — Je m’engage comme infirmière dans la garde
rouge...
le député extrémiste. — Chère madame, nous allons orga-
niser ça... Le dernier cotillon, — avec des bombes comme acces-
soires !
la baronne. — Oui, mais dépêchez-vous, car je vais partir
pour la Côte d’azur!...
Ces « décadents » n’ont pas l’air de se douter qu’ils seraient
les premières victimes d’un bolchevisme qui leur paraît pitto-
resque, fantaisiste et rigolo.
La baronne n’a donc pas entendu parler des grandes dames
de Petrograd qui, en échange de deux harengs quotidiens, sont
obligées de balayer la neige et de vider les poubelles?
Certes, de tout temps, il y a, à Paris, des cénacles mondains
où l’anarchie est de bon ton, où l’on ne passe pour avoir de
l’esprit qu’à la condition d’admirer Marat et Robespierre, où
d’élégantes personnes, tout en minaudant autour des tasses de
thé, déclarent tranquillement ‘.
— Ce Ravachol avait quelque chose là... Et quel dommage
qu’on ne m’ait jamais présenté Louise Michel !...
Tant qu’il ne s’agit que d’attitudes et de boutades, cela n’est
pas grave (bien que...). Mais il ne faudrait rien exagérer. En
Russie, le bolchevisme a commencé à la cour du tsar : des
grands-ducs trouvaient très drôle d’inviter Caliban à faire des
siennes...
Prenons garde, ne jouons pas avec le feu, n’agitons pas le
chiffon rouge, — cela pourrait exciter le taureau populaire.
Et dame, alors, il faudrait se réfugier bien vite derrière la
barrière.
S’il y en a encore une...
* * * On voit, on entend, on lit des choses extraordinaires.
L’autre jour, dans l'Information, je lis sous la signature de
M. Roland Chavenon, fils de notre éminent confrère Léon Cha-
venon, qui, depuis 1914, et même avant, a tout prédit, et que
nous avons eu bien tort de ne pas bombarder chef suprême des
armées de terre et de mer :
« La musique est un art, la peinture est un art; la littérature
n’existe pas. 11 n’y a pas d’art d’assembler les mots. Il suffit que
le mot corresponde à la pensée. 11 suffit de penser. La vérité, la
modernité, c’est de restituer enfin sa place à la pensée. On trou-
vera la forme dans les arts plastiques, le son dans la musique.
« Le théâtre me paraît un non-sens. Une pièce doit être lue.
La musique doit être entendue à part, le décor vu à part (domaine
de la peinture).
« Roland Chavenon. »
C’est un rien, mais ce rien est admirable.
« La littérature n’existe pas, » — et allez donc! « Il suffit de
penser. »... Comme c’est simple... On pense, on trouve les mots
qu’il faut, et voilà la littérature, pas plus, pas moinss...
Et ceci : « Le théâtre me paraît un non-sens. »
Tout simplement.
Un non-sens, le Cid, le Misanthrope, le Mariage de Figaro;
un non-sens, cette forme merveilleuse du génie humain qui fait
rire, pleurer, vivre sous nos yeux les personnages de Shakes-
peare, de Racine, de Hugo.
« Une pièce doit être lue, » et voilà!
« La musique doit etre entendue à part, le décor vu à part •
Nous irons .écouter la partition à la salle Caveau, puis nous
irons au Salon contempler la toile de fond et les portants.
Dire que personne n’avait encore pensé à cela !
Notre confrère Roland Chavenon est un penseur hardi, mais