Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Texier, Charles
Asie Mineure: description geographique, historique et archeologique des provinces et des villes de la chersonnése d'Asie — Paris, 1862

DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.10179#0107

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
ASIE MINEURE.

97

de Hache et le comte Herman, firent
construire une machine appelée le Re-
nard, faite en bois de chêne, et recou-
verte de claies d’osier et de cuir. Cet
appareil, qui pouvait contenir vingt
hommes , devait être approché des mu-
railles pour en saper les fondements;
mais, pendant qu’on le traînait, tous
les bois s’affaissèrent et écrasèrent les
hommes qui s’y étaient renfermés.
Quoique les murailles ne fussent bâties
que de briques, les machines des Francs
étaient si imparfaites, qu’ils purent à
peine entamer le ciment qui les reliait.
Cependant, à force d’attaques réitérées,
ils parvinrent à pratiquer quelques fentes
dans les murs. La résistance désespérée
des Turcs arrêtait l’élan des chrétiens,
et dès qu’une muraille était entamée,
on en rebâtissait une autre derrière. Ils
combattaient du haut de leurs remparts
avec un zèle infatigable, et lançaient
sur les chrétiens de la poix, de l’huile,
des torches enflammées, et toutes les
matières propres à incendier les machines
des assiégeants.
En voyant les efforts de courage dé-
ployés dans ce siège mémorable, en
comptant le nombre des assiégeants,
qui devait s’élever au moins à quatre
cent mille hommes effectifs, il y a lieu
de s’étonner qu’une place comme Nicée
n’ait pas été enlevée : car située en
plaine, elle n’est défendue que par des
ouvrages d’art, sans que la disposition
des lieux vienne ajouter à la difficulté
de l’attaque. Elle a été néanmoins re-
gardée par les historiens des croisades
comme la place la plus forte de toute
l’Anatolie. Robert le moine regarde la
reddition de Nicée comme une preuve
de la protection divine : « Car, dit-il,
nulle force humaine n’aurait pu l’em-
porter sans le secours de Dieu, et il
était bien juste que cette ville, qui avait
vu sanctionner tous les dogmes de l’É-
glise catholique, fut enlevée aux ennemis
de notre sainte foi et réconciliée au
Seigneur, et qu’elle rentrât dans le sein
de notre sainte mère Église comme un
de ses membres. » Malheureusement,
la croix ne brilla pas longtemps sur les
églises de Nicée, car peu d’années après,
elle retomba entre les mains des Otto-
mans.
Cependant les chrétiens, voyant que
7“ Livraison. (Asie Mineuse.)

la ville était constamment ravitaillée
par les navires, jugèrent qu’elle ne tom-
berait jamais entre leurs mains, s’ils ne
parvenaient à fermer cette voie. En
conséquence, ils s’adressèrent à l’em-
pereur pour qu’il leur fût donne des
barques, qui furent transportées sur
des traîneaux tirés par des chevaux et
par des hommes, du port de Civitot
j usqu’au lac de Nicée, dans une longueur
de sept milles; les bâtiments étaient
assez grands pour contenir jusqu’à cent
combattants. Cette entreprise fut ache-
vée dans l’espace d’une nuit.
L’histoire mentionne plusieurs faits
de ce genre. Au siège de Tarente, les
Romains, maîtres de la citadelle, in-
vestis de tous côtés par l’armée d’An-
nibal, avaient cependant la mer libre,
et reçurent de Metaponte assez de ren-
forts pour détruire les ouvrages avancés
des Carthaginois. Annibal, pour inter-
cepter toute communication entre la
citadelle et la mer, fit fabriquer des
machines pour traîner les galères, qui
furent transportées à travers la ville,
du port jusqu’à la pleine mer (1). Dans
la guerre contre Mithridate, Lucullus
étant venu pour délivrer Cyzique, blo-
quée par l’arméede ce prince, fit prendre
sur le lac Dascylitis une grande barque
qu’il fit traîner sur un chariot jusque
dans la mer, et ayant embarqué des
soldats, il l’introduisit dans la ville (2).
Plus tard, au siège de Constantinople
par Mahomet II, les Ottomans, vou-
lant s’emparer du port, dont l’entrée
était fermée par des chaînes, firent
passer sur des chariots des barques
armées en guerre, depuis le point du
Bosphore appelé aujourd’hui Château
d’Europe (3), jusqu’à la partie supé-
rieure de la Corne d’Or. Mais de
toutes ces entreprises, celle des croisés
fut la plus difficile, puisqu’en une nuit
les barques parcoururent sept milles de
chemin par terre. Ils suivirent proba-
blement la vallée d’écoulement du lac
au pied des collines, où coulait la ri-
vière appelée par les anciens fleuve As-
canius.
(1) Tite-Live, II, chap. III.
(2) Plutarcli., in Lucul/o.
(3) Roumili-Hissar. Hanimer, ilLt. des Ot-
tomans, tom. II.
T. II.

7
 
Annotationen