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Texier, Charles
Asie Mineure: description geographique, historique et archeologique des provinces et des villes de la chersonnése d'Asie — Paris, 1862

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https://doi.org/10.11588/diglit.10179#0695

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ASIE MINEURE.

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sait alors une chasse qui n’était pas
sans danger. Un seul incident se ma-
nifesta : les matelots avaient tué un
énorme sanglier, qu’ils ne pouvaient
transporter à bord ; non-seulement les
indigènes refusèrent leur concours,
mais ils refusèrent même de piêter un
âne pour porter la bête immonde; on
fût obligé de la dépècer sur place : les
Turcs ne font aucune distinction entre
le sanglier et le cochon, proscrit par
Mahomet.
Nous partîmes du port d’Antipliellus,
attaquant la montagne droit au nord.
C’était le chemin des piétons, mais il
était atroce pour les chevaux.
Nous franchîmes la montagne qui
borde la baie de Sévédo. Au bout d’une
demi-heure , nous descendîmes au fond
d’une profonde vallée, pour remonter
immédiatement sur le flanc opposé.
Nous nous trouvâmes bientôt sur la crête
d’une chaîne nord-sud, que nous par-
courûmes dans une assez grande éten-
due. Nous commençâmes dès lors à
jouir du coup d’œil général de la Lycie :
un vaste horizon de montagnes, cou-
ronné par les sommets couverts de
neige du Cragus, se développait à nos re-
gards. Nous voyions çà et là , sous nos
pieds, des plaines couvertes de verdure;
mais aucune habitation ne s’offrait à
nos yeux. Nous avions repris la direc-
tion de l’est pour contourner une haute
montagne sur le penchant de laquelle
sont trois vastes citernes où se désaltè-
rent les caravanes. Nous arrivons au
village d’Agli, composé de cinq maisons.
Au bout d’une heure, nous commen-
çons à nous diriger au nord, et après
une demi-heure de route, nous nous
trouvons dans une vallée étendue,
formant un plateau bien cultivé. C’est
là qu’est situé le village de Tchou-
kourba, appelé aussi Orta keui, le vil-
lage du milieu, parce qu’il est le centre
d’une communauté de cinq hameaux
tous du même nom : nous insistons sur
ce détail, parce que nous retrouverons
bientôt l’ancienne communauté lycienne
de Cyaneæ divisée en différents groupes.
Nous nous reposons un moment dans
ce village, et nous prenons des guides
pour nous rendre aux ruines de Phellus
sur la montagne qui domine; il y a une
heure de route.

Nous montons au milieu des roches
les plus arides : le temps est couvert;
les nuages sont descendus jusque sur le
sommet de la montagne. Longtemps
avant d’arriver au sommet, nous voyions
des traces de constructions gigantes-
ques : ce sont des murs de soutène-
ment des terrasses qui aplanissaient la
pente. La route est encore tracée au
milieu des rochers. Le brouillard est
épais; on n’aperçoit les objets qu’à
travers une petite pluie fine et péné-
trante. Enfin nous entrons dans la ville.
Ce n’est qu’un chaos de murailles et de
rochers éboulés, du milieu desquels
sortent des restes de monuments pelas-
giques et grecs. La ville de Phellus s’é-
tend nord-sud sur toute la crête d’une
montagne fort élevée. Nous arrivons à
la nécropole. Nous sommes dans l’ad-
miration en entrant dans une enceinte
carrée toute taillée dans le roc, au
milieu de laquelle s’élèvent deux édi-
fices monolithes taillés dans la masse
même du rocher. Ce ne sont plus des
colonnes et des frontons; c’est un art
tout à fait en dehors de ce que nous
connaissons de l’antiquité, car il est
aussi éloigné de l’égyptien que du grec.
Un de ces grands tombeaux a trois
portes; son entablement ressemble à
des charpentes posées de front, et sur
les faces latérales, ce sont d’énormes
solives recourbées représentant des becs
d’ancre; tout cela taillé dans le rocher.
Deux autres tombeaux du même style
s’élèvent près du premier; quoique d’une
dimension moindre, ils ne sont pas des-
sinés avec moins de recherche. L’un
d’eux s’est écroulé sous l’influence des
gelées et des neiges; l’autre, encore de-
bout, est composé de deux chambres
contenant des banquettes ou lits funè-
bres.
Pendant que nous étions occupés à
examiner cette architecture si bizarre,
le brouillard se dissipait; le soleil laissa
tomber quelques rayons à travers la
rosée humide; nous jouîmes alors d’un
des plus beaux spectacles qu’il soit
possible d’imaginer : sur le premier
plan, la nécropole avec ses tombeaux
toujours plongés dans les nuages, et
qui ont contracté une couleur verdâtre;
sous nos pieds, un précipice sans fond.
Les sommets des plus grands arbres
 
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