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que. Un historien a paru si persuadé de la
Vérité de ce fait, qu'il a voulu en accréditer
le récit en rapportant le discours même que
dut faire Agrippa , et le discours contraire
qu'on attribuoil à Mécène. Que l'on parcoure
attentivement le premier , et l'on sera sur-le-
champ convaincu qu'il ne peut être d'Agrippa.
D'ailleurs ce jugement solide, qui a dirigé sa
conduite pendant toute sa vie , ne lui permet-
toit pas de hasarder un conseil qu'il savoit
bien qu'Octave ne pouvoit plus adopter. Ce
prétendu conseil d'Agrippa n'a eu probable-
ment d'autre origine que les rumeurs artifi-
cieuses et les anecdotes controuvées que fai-
soient circuler les courtisans d'Octave sur sa
disposition à se démettre du pouvoir suprême,
et les déclamations des jeunes rhéteurs , qui
se sont avidement saisis d'un sujet tout-à-fait
dans leur goût (i).
(i) Dion, 1. LU, in prînçiptb*.{Comment Agrippa aiiroit-
il pu craindre qu'après les guerres civiles éteintes, cl a près
la conquête de l'Egypte , les revenus d'un si grand empire
ne pussentpas suffire pour l'entrelicn d'une année convena-
ble ? Comment, après soixante ans de guerres civiles, aurol-
il pu dire que le pouvoir des chefs auxquels il faut confier
une partie des forces de l'état est dangereux sous un mo-
narque , et ne l'est point dans une republique ? Comment,
avec les sentiments qu'on lui suppose, auroil-il pu re-
présenter à Octave, qui regnoit effectivement depuis
douze années, que, s'il avoit seulement pour quelques
moments touché à la principauté , il courroit des risques
à s'en dessaisir? Agrippa, qui parle de la sorte , est bien
différent de celui qui fut toute sa vie le plus zélé ser-
que. Un historien a paru si persuadé de la
Vérité de ce fait, qu'il a voulu en accréditer
le récit en rapportant le discours même que
dut faire Agrippa , et le discours contraire
qu'on attribuoil à Mécène. Que l'on parcoure
attentivement le premier , et l'on sera sur-le-
champ convaincu qu'il ne peut être d'Agrippa.
D'ailleurs ce jugement solide, qui a dirigé sa
conduite pendant toute sa vie , ne lui permet-
toit pas de hasarder un conseil qu'il savoit
bien qu'Octave ne pouvoit plus adopter. Ce
prétendu conseil d'Agrippa n'a eu probable-
ment d'autre origine que les rumeurs artifi-
cieuses et les anecdotes controuvées que fai-
soient circuler les courtisans d'Octave sur sa
disposition à se démettre du pouvoir suprême,
et les déclamations des jeunes rhéteurs , qui
se sont avidement saisis d'un sujet tout-à-fait
dans leur goût (i).
(i) Dion, 1. LU, in prînçiptb*.{Comment Agrippa aiiroit-
il pu craindre qu'après les guerres civiles éteintes, cl a près
la conquête de l'Egypte , les revenus d'un si grand empire
ne pussentpas suffire pour l'entrelicn d'une année convena-
ble ? Comment, après soixante ans de guerres civiles, aurol-
il pu dire que le pouvoir des chefs auxquels il faut confier
une partie des forces de l'état est dangereux sous un mo-
narque , et ne l'est point dans une republique ? Comment,
avec les sentiments qu'on lui suppose, auroil-il pu re-
présenter à Octave, qui regnoit effectivement depuis
douze années, que, s'il avoit seulement pour quelques
moments touché à la principauté , il courroit des risques
à s'en dessaisir? Agrippa, qui parle de la sorte , est bien
différent de celui qui fut toute sa vie le plus zélé ser-