Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Ducuing, François [Hrsg.]
L' Exposition Universelle de ... illustrée (Band 2) — Paris, 1867

DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.1336#0402
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
/.02

L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1867 ILLUSTRÉE.

partante par ses manufactures presque
toutes consacrées à la production des ar-
ticles de cotoD. II s'y établit comme chef
d'une maison d'impression. Sur ce Ibéâtre,
il put observer les mauvais effets du sys-
tème qualifié, on ne sait trop pourquoi,
do protecteur, où l'on se propose de résoudre
le problème insolub'e de vendre aux étran-
gers sans leur acheter, comme si ceux-ci
pouvaient payer nos marchandises par un
autre moyen qu'en nous envoyant les leurs.
La puissance do production déjà acquise aux
manufactures de Manchester leur rendait né-
cessaire d'avoir des débouchés au dehors,
surtout dans les temps où la consommation
intérieure venait à languir. Or les étrangers,
rebutés, mécontents de ce que PAnglelcrre
fermait son marché à leurs vins, à leurs cé-
réales et même à leurs articles manufactu-
rés,quoique le plus souvent elle y excellât,
prenaient ou croyaient prendre leur revanche
en excluant les produits des ateliers anglais.
De là,de t mps en temps, de cruelles épreuves
pour la classe ouvrière de Manchester.

En outre, l'ouvrier de cette ville, comme
de toute l'Angleterre, souffrait du haut prix
qu'atteignaient fréquemment les céréales et le
pain, par l'effet d'une législation faite dans
l'intérêt des propriétaires fonciers parmi les-
quels les familles aristocratiques de la Grande
lîretagne occupent une large place.

La liberté commerciale se présentait donc
comme offrant aux populations ouvrières le
double avantage d'un travail plus assuré et du
pain à meilleur marché. C'est ainsi qu'il le
forma à Manchester, sous les auspices de la
chambre de commerce, une association con-
nue sous le nom de Ligue pour l'abolition des
lois sur les céréales (Anli-Corn-Laio Leagae) ;
qui, non contente de poursuivre la réforme
indiquée par son nom, se proposait l'établis-
sement du libre commerce en tout genre e"tre
l'Angleterre et le reste du monde. Un des
traits caractéristiques des doctrines de cette
association, était de ne pas exiger des autres
peuples la réciprocité, non-seulement parce
que pour obtenir celle-ci il aurait fallu des
négociations épineuses et lentes (on en avait
déjà fait l'expérience), mais aussi parce que
la liberté du commerce, même sans récipro-
procité, est avantageuse au pays qui la pra-
tique, et qu'enfin, pour avoir la réciprocité,
le meilleur procédé consiste non pas à la de-
mander, mais à prêcher d'exemple.

La fondation de la Ligue date de 1838; il
y avait alors huit ans que Richard Cobden
était à Manchester, livré aux travaux de sa
profession et faisant, de temps en temps,pour
ses affaires, des voyages qui l'amenèrent,par
exemple, en Russie et en Turquie. 11 était alors
membre de la chambre de commerce qui avait
pour président M. Benjamin Smith avec le-
quel il a été uni d'une étroite amitié jusqu'à
la fin de ses jours. Dès l'origine de l'entre-
prise, il se trouva l'associé de M. John Bright,
autre manufacturier avec lequel il contracta

une intimité qui s'est manifestée par une
communauté d'efforts à jamais célèbre.

L histoire de la L'guc fut une suite de
combats, ou, pour mieux dire, de discours
dans des réunions publiques, qui eurent
aussitôt la \ogue, parce que les orateurs qui
s'y faisaient entendre avaient un talent égal
à la force de leurs convictions et que leur
tentative venait à point. La Ligue devint
bientôt populaire; des personnes de toutes
les classes lui apportèrent leurs souscriptions
et leur appui. L'élite de ses membres entra
dans le Parlement, où R:chard Cobden, John
Bright et quelques auires furent très-écoutés
et acquirent une influence croissante. Enfin
au mois de février 1846, le parti Tory,
dont la masse était opposée à la réforme
douanière, étant au pouvoir depuis quelques
années déjà, en la personne de Robert Peel
et de Wellington, le gouvernement vint pro-
poser à la chambre des Communes de voter
la réforme douanière et l'adoption de la
liberté du commerce, tant Robert Peel avait
été impressionné par les raisonnements de
Cobden et de Bright, et tant Wellington qui,
tout duc de fer (iron duke) qu'il était, ne
laissait pas que d'observer le mouvement de
l'opinion, avait reconnu à des sigr.es certai s
qu'il fallait céder. Robert Peel, qui à l'ori-
gine avait été quelquefois amer, dans les dis-
cussions du Parlement, envers Richard
Cobden, reconnut, le jour où il se déclara
converti à la liberté du commerce, que l'ad-
hésion de l'opinion publique à la nou-
velle doctrine, était principalement l'ouvrage
de Richard Cobden.

Le principe de la liberté du commerce a été
à partir de ce moment, la base de la législa-
tion commerciale de l'Angleterre. Le résultat
était grand, ma<s il ne devait pas entraîner
immédia'ement la conversion des autres
peuples. L'Angleterre qui, dans l'ensemble,
est mieux gouvernée et mieux administrée
que la plupart des autres nations, n'a cepen-"
dant pas le privilège de déterminer, par sa
pratique, la conviction dis autres, peut-être
parce que se considérant comme faisant bande
à part elle est envisagée de même dans le
monde.

A la suite de ce. brillant et solide succès,
Richard Cobden fitsur lecontinent un voyage
où il fut personnellement accueilli avec une
grande distinction. A Paris en particulier, la
Société d'Économie Politique lui donna un
banquet où il prononça un discuurs sage
autant que spirituel, qui fut fort applaudi. De
l'impulsion ainsi donnée à l'opinion, il ne
résulta cependant, de la part du gouverne-
ment, qu'un projet fort timide, mal accueilli,
malgré son excessive réserve, par la majo-
rité protectionniste de la chambre desDéputés,
et dont larévolution de 1848 empêcha la dis-
cussion.

En 1856, après l'Exposition universelle de
Paris qui avait mis en relief la puissance et
l'habileté de l'industrie française, le gouver-

nement impérial crut que le moment était op-
portun pour modifier profondément le tarif
des douanes françaises qui était hérissé non-
seulement de droits exorbitants, mais même
de prohibitions absolues, en nombre indé-
fini, héritage de l'époque où la guerre était
portée à la dernière violence entre la France
et l'Angleterre. Ce dessein parfaitement rai-
sonnable vint cependant échouer au Corps
législatif. Deux ans après la formation do la
Ligue en Angleterre, des manufacturiers fian-
çais, persuadés que l'industrie nationale no
pourrait jamais supporter le choc de celle de
l'Angleterre, avaient fondé une association
dont le butétait tout juste l'opposé, la perpé-
tuité du système prohibitif. L'influence de
cette association était fort grande, et ce fut
elle qui fit échouer le projet du gouvernement.
Il fallut même que celui-ci prît l'engage-
ment, qui fut inséré au Moniteur, de ne rien
faire pendant cinq ans à l'encontredes prohi-
bitions.

Heureusement, il y avait dans la Constitu-
tion de l'Empire un article qui autorisait
l'Empereur à faire les traités de commerce
sans avoir à les soumettre à la sanction du
Corps législatif. Celui qui écrit ces lignes,
s'était lié avec Cobden dès 1846; il l'inter-
rogea alors sur la question de savoir si l'An-
gleterre serait disposée à passer avecla France
un traité de commerce dont la base serait,
du côté de la France, la levée de toutes les
prohibitions et leur remplacement par des
droits modérés, et, du côté de l'Angleterre,
une très-forte diminution des droits énor-
mes dont elle frappait les vins de France, avec
l'abandon des droits qui restaient sur un cer-
tain nombre de produ ts français et particu-
lièrement sur les soieries.

Richad Cobden résista d'abord, alléguant
que, sur le terrain où était placé le gouverne-
ment anglais, il ne lui était pas possible de né-
gocier un traité de commerce particulier avec
une autre nation, quelle qu'elle fût. La corres-
pondance ayant continué, Cobden changea
d'avis, ayant compris'que le traité de com-
merce entre les deux pays pourrait stipuler
que les modifications consenties parl'Angle-
terre, à l'égard des vins et de certains pro-
duits manufacturés, serait applicable non à
la France seule mais bien à tous les États in-
distinctement. Une fois ces bases convenues,
je merendisen Angleterre. 11 devint possible
d'aborder le gouvernement anglais et de lui
faire officieusement la proposition d'un traité
de commerce, sauf à obtenir ensuite l'agré-
ment du gouvernement français. A cette épo-
que, le Cabinet anglais, qui avait pour chef
lord Palmerston, pour ministre des affaires
étrangères lord John Russell et pour chance-
lier de l'échiquier, M. Gladstone, s'appuyait
dans la chambre des Communes, sur une majo-
rité numériquement faible, à laquelle Richard
Cobden, John Bright et leurs amis de l'École
de Manchester fournissaient un appoint indis-
pensable.
 
Annotationen