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REVUE COMIQUE
19 novembre 1871.
COUPS DE LORGNETTE
SOUVENIRS D'EÎSFANCE
Dans la crainte, bien illusoire d'ailleurs, de passer pour
un refiel, ,je ne nie suis jamais donné, que je sache, com-
me ami du poète Coppée. Le moment est venu d'éclairer le
public sur cotte importante affaire.
Eh bien ! oui, depuis ma plus tendre enfance jusqu'à l'âge
de cinq ans, Coppée a été pour moi comme un frère. A cette
époque, les carrières différentes que nous embrassâmes
nous tirent perdre de vue, et de cette première affection
il ne m'est resté qu'un souvenir, c'est le scénario ou plutôt
l'idée première do l'Abandonnée, écrite à l'âge de quatre
ans par ce précoce chatouilleur de la Muse,
Voici la pièce dans toute sa naïveté :
I,' AIIA X D O \ M10 B'1
Drame en deux actes, à mettre en vers.
ACTE PREMIER
Le théâtre représente le boulevard d'Enfer en «810. A drnile, un Arbre ;
à gauche, un arbre ; au milieu, un banc (si on en a). Pendant tout le pre-
mier acte, l'orchestre joue en sourdine des airs de danse.
Personnages : JULIEN, carabin ; LOUISE, grisetto;
plusieurs ETUDIANTS et AUTANT le GRISETTES
SCÈNE PREMIÈRE
• Julien, Louise. Etudiants, grisettes.
Chœur des étudiants et des grisettes.
Messieurs les étudiants
M'en vont à la Chaumière
Pour danser le cancan
Et la Robert M araire.
Toujours, toujours,
La nuit comme le jour.
SCÈNE 11.
Julien (assis ou debout. — Louise debout ou assise.)
Julien (rêveur). — Mademoiselle est seule ?
Louise (timide). — Mais, monsieur...
Julien (fredonnant). — Voulez-vous (ter) accepter mon
bras ?
Louise. — Mais monsieur..., je suis toujours seule, mémo
quand je vais au bois de Moudon.
Julien. — Eh bien ! nous irons ensemble au bois do Viro-
llay. ça vous changera et d'ailleurs ça ne vous engage à rien.
Louise. — Soit ! essayons.
SCÈNE III.
Etudiants et grisettes (en chœur )
Messieurs les étudiants
S'en vont a la Chaumière, etc.
(Voir la scène première.)
ACTE II
DOl'/.F. ans APRES
La théâtre représente un hôpital. — A droite, un fauteuil; ft gauche, un
abbé ; au fond, une garde-malade. — Pendant tout le second acte, l'or-
chestre exécute un trémolo d'Amédée Artus.
Le manuscrit de M. Coppée, âgé de quatre ans, s'arrête
malheureusement là, et j'ai dû, pour ne pas laisser le lec-
teur en plan, combler cette lacune par un fait divers em-
prunté à une feuille spéciale.
On lisait dans la Gazelle des Tribunaux du 13 novembre
1842 :
Un incident des plus dramatiques s'est produit hier à l'hôpi-
tal de la Pitié. Le célèbre docteur Julien faisait sa tournée
quotidienne, lorsque son attention fut attirée par une jeune
malade arrivée seulement depuis le matin à l'hospice. Les
traits de cette femme portaient visiblement tes traces d'une
horrible maladie résultant des veilles et de la débauche. En
apercevant le docteur, la malheureuse poussa un cri déchirant.
« C'est toi, Julien ! » fit-elle. « C'est toi, Louise ! » répondit le
médecin.
La jeune femme venait de reconnaître dans la personne de
l'éminent praticien l'homme qui le premior l'avait détournée
du devoir et de la vertu.
La malade ne put supporter une telle secousse et succomba
bientôt entre les bras de son ancien amant.
Cet incident a produit une vive impression sur le docteur
Julien, et nous croyons savoir que le mariage de ce pilier
considérable de science avec Mlle V.. , une de nos plus riches
héritières, va se trouver, pour cette raison, retardé de quelques
jours.
Ce fait divers cependant n'est ni neuf ni consolant et con-
tient une moralité frappante : à savoir que les grisettes doi-
vent se mélier des étudiants. Cette vérité, que M. Coppée a
développée en deux actes et en vers, fut jadis formulée
d'une façon beaucoup plus simple par le philosophe Hector
Crémieux, dans ses Conseils aux Femmes : .
« L'homme est un animal intelligent et lâche.
Jeunes il vous prend, vieilles il vous lâche. »
Crispino.
REVUE COMIQUE
19 novembre 1871.
COUPS DE LORGNETTE
SOUVENIRS D'EÎSFANCE
Dans la crainte, bien illusoire d'ailleurs, de passer pour
un refiel, ,je ne nie suis jamais donné, que je sache, com-
me ami du poète Coppée. Le moment est venu d'éclairer le
public sur cotte importante affaire.
Eh bien ! oui, depuis ma plus tendre enfance jusqu'à l'âge
de cinq ans, Coppée a été pour moi comme un frère. A cette
époque, les carrières différentes que nous embrassâmes
nous tirent perdre de vue, et de cette première affection
il ne m'est resté qu'un souvenir, c'est le scénario ou plutôt
l'idée première do l'Abandonnée, écrite à l'âge de quatre
ans par ce précoce chatouilleur de la Muse,
Voici la pièce dans toute sa naïveté :
I,' AIIA X D O \ M10 B'1
Drame en deux actes, à mettre en vers.
ACTE PREMIER
Le théâtre représente le boulevard d'Enfer en «810. A drnile, un Arbre ;
à gauche, un arbre ; au milieu, un banc (si on en a). Pendant tout le pre-
mier acte, l'orchestre joue en sourdine des airs de danse.
Personnages : JULIEN, carabin ; LOUISE, grisetto;
plusieurs ETUDIANTS et AUTANT le GRISETTES
SCÈNE PREMIÈRE
• Julien, Louise. Etudiants, grisettes.
Chœur des étudiants et des grisettes.
Messieurs les étudiants
M'en vont à la Chaumière
Pour danser le cancan
Et la Robert M araire.
Toujours, toujours,
La nuit comme le jour.
SCÈNE 11.
Julien (assis ou debout. — Louise debout ou assise.)
Julien (rêveur). — Mademoiselle est seule ?
Louise (timide). — Mais, monsieur...
Julien (fredonnant). — Voulez-vous (ter) accepter mon
bras ?
Louise. — Mais monsieur..., je suis toujours seule, mémo
quand je vais au bois de Moudon.
Julien. — Eh bien ! nous irons ensemble au bois do Viro-
llay. ça vous changera et d'ailleurs ça ne vous engage à rien.
Louise. — Soit ! essayons.
SCÈNE III.
Etudiants et grisettes (en chœur )
Messieurs les étudiants
S'en vont a la Chaumière, etc.
(Voir la scène première.)
ACTE II
DOl'/.F. ans APRES
La théâtre représente un hôpital. — A droite, un fauteuil; ft gauche, un
abbé ; au fond, une garde-malade. — Pendant tout le second acte, l'or-
chestre exécute un trémolo d'Amédée Artus.
Le manuscrit de M. Coppée, âgé de quatre ans, s'arrête
malheureusement là, et j'ai dû, pour ne pas laisser le lec-
teur en plan, combler cette lacune par un fait divers em-
prunté à une feuille spéciale.
On lisait dans la Gazelle des Tribunaux du 13 novembre
1842 :
Un incident des plus dramatiques s'est produit hier à l'hôpi-
tal de la Pitié. Le célèbre docteur Julien faisait sa tournée
quotidienne, lorsque son attention fut attirée par une jeune
malade arrivée seulement depuis le matin à l'hospice. Les
traits de cette femme portaient visiblement tes traces d'une
horrible maladie résultant des veilles et de la débauche. En
apercevant le docteur, la malheureuse poussa un cri déchirant.
« C'est toi, Julien ! » fit-elle. « C'est toi, Louise ! » répondit le
médecin.
La jeune femme venait de reconnaître dans la personne de
l'éminent praticien l'homme qui le premior l'avait détournée
du devoir et de la vertu.
La malade ne put supporter une telle secousse et succomba
bientôt entre les bras de son ancien amant.
Cet incident a produit une vive impression sur le docteur
Julien, et nous croyons savoir que le mariage de ce pilier
considérable de science avec Mlle V.. , une de nos plus riches
héritières, va se trouver, pour cette raison, retardé de quelques
jours.
Ce fait divers cependant n'est ni neuf ni consolant et con-
tient une moralité frappante : à savoir que les grisettes doi-
vent se mélier des étudiants. Cette vérité, que M. Coppée a
développée en deux actes et en vers, fut jadis formulée
d'une façon beaucoup plus simple par le philosophe Hector
Crémieux, dans ses Conseils aux Femmes : .
« L'homme est un animal intelligent et lâche.
Jeunes il vous prend, vieilles il vous lâche. »
Crispino.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
La revue comique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
ZST 3069 C RES::1.1871
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
In Copyright (InC) / Urheberrechtsschutz
Creditline
La revue comique, 1.1871, Nr. 6, S. 72
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg