LB PAUV^Ë PECHEUR ou leâ triôteé conséquences d'une ambition démesurée
CONTE DE NOËL
—• Il habitait, en compagnie de sa femme Isabelle, dans un vieux tonneau.
Il y avait une fois un pauvre pêcheur qui s'appelait Pierre. Il reluisait au bout de la cuisine et Isabelle installée devant le feu
était si pauvre qu'il habitait, en compagnie de sa femme Isabelle, surveillait un ragoût qui avait un délicieux parfum d'oignon et de
dans un vieux tonneau. , poireau.
C'était là sa chaumière. Tous deux ne se nourrissaient que de
poissons et de pain sec.
Les jours où Pierre ne rapportait rien, ils se couchaient triste-
ment sur leur froide paille.
Un jour de Noël, Pierre était resté comme d'habitude de longues
heures à jeter la ligne sans que le moindre goujon mordit à son
hameçon.
11 faut dire qu'il avait au préalable cassô un peu la glace sur la
rivière, car, comme au Pôle Nord, il faut briser à coup de pioche
la banquise pour harponner les poissons.
Pierre songeait déjà au lamentable retour à la maison, je veux
dire au tonneau, avec le panier vide, quand tout à coup, il sentit
une légère secousse au bout de sa ligne et il tira — ô quelle joie!
— un petit poisson bien gras qui se débattit en vain. .
r r o ~> — Lne jolie maisonnette avec des volets verts.
Pierre raconta à sa femme l'aventure, mais, à son grand éton-
neraient, loin d'en être ravie, Isabelle devenait sombre et pensive.
Aussi mangea-t-il son ragoût avec amertume.
« Tu n'as été qu'un imbécile, lui dit Isabelle, tu aurais bien pu
lui demander un bel hôtel, des voitures, des domestiques. Est-ce
qu'il ne te doit pas la vie? »
Pierre trouva Isabelle bien exigeante et il déclara que la mai-
sonnette'était suflisante. Mais Isabelle lui répéta tant et tant qu'elle
voulait un bel bôtel que Pierre se décida à retourner à la rivière et
à appeler le petit poisson.
Après avoir crié trois fois, Pierre vit que l'eau se troublait.
— Un petit poisson bien pras qui se débattit vainement.
« Il sera bon frit », dit-il, en se parlant à lui-môme, et il claqua de
la langue, car il avait la faiblesse d'être gourmand.
Sa femme Isabelle obtenait de lui tout ce qu'elle désirait rien
qu'en lui offrant une bonne friture.
Au moment de coucher le petit poisson bien gras sur les herbes , . .
fraîches de son panier, Pierre entendit que la malheureuse bête ~ U tête du pGt,t polsson émergea des grands ronds'
lui parlait ainsi :
Rends-moi la vie Bientôt la tête du petit poisson émergea des grands ronds qui se
Qui m'est ravie. tonnèrent à la surface de l'eau.
a__* i 4. -ii p j l ! i i H faut dire que Pierre avait encore cassé la glace de la rivière.
Pieue dont le cœur est sensible, fut ému de la voix douce et „ Que me veux-tu? .» lui demanda le poisson,
suppliante du poisson, et il oublia spontanément sa misère et les Pierre, tout penaud, s'exprima comme il suit : « Ma femme vou-
reproenes certains de sa lemme. _ drait etre une grande dame> »
Aussi rejeta-t-il le poisson dans 1 eau froide. Ceci fait, i prit sa Le petit poisson fronça l«s écailles, mais répondit gentiment:
RENTRE C EST FAIT
casquette et voulut partir, mais une voix douce et suppliante le
rappela. C'était celle du poisson qui, la tête sortie de l'eau, lui
Demande-moi
N'importe quoi!
parlait é • poisson qui, la tete sortie de 1 eau, lui Que] fut son étonnement lorsqu'il trouva en entrant à la place de
Demande moi ^ l,et*te maison modeste, un superbe hôtel avec un concierge.
— Un superbe hôtel avec un concierge.
Dans l'escalier un tapis rouge et sur les frises des murs et des
plafonds, des guirlandes de petites poires en verre qui s'allumaient
— Demande-moi n'importe quoi. d'elles-mêmes.
Au premier étage, de beaux messieurs et de belles personnes, en
Pierre, trop simple pour s'étonner d'un miracle, ne réfléchit pas grande toilette, prétendaient tous être ses amis et le remerciaient
longtemps. de les avoir invités à diner chez lui.
« Je suis très mal logé dans mon tonneau, ma femme Isabelle On lui passa un habit à la boutonnière duquel il trouva un petit
aussi; une habitation un peu meilleure nous ferait plaisir », répondit ruban rouge.
Pierre. • Un maître d'hôtel, que Pierre avait pris d'abord pour un prince
« RENTRE, C'EST FAIT », rétorqua le petit poisson. royal, lui indiqua sa place dans la salle à manger auprès d'une
Pierre n'en crut pas ses yeux lorsqu'il vit, en entrant, à la place opulente dame aux cheveux jaunes, frisés et ondulés, qui .le re-
du vieux tonneau une jolie maisonnette avec des volets verts et des gardait en souriant, avec une longue machine qu'elle tenait devant
pots de fleurs aux fenêtres. Une armoire à glace était dans la les yeux.
chambre et une pendule ornait la cheminée. Un fourneau allumé C'est à peine s'il reconnut Isabelle, tant elle avait changé. Et il
CONTE DE NOËL
—• Il habitait, en compagnie de sa femme Isabelle, dans un vieux tonneau.
Il y avait une fois un pauvre pêcheur qui s'appelait Pierre. Il reluisait au bout de la cuisine et Isabelle installée devant le feu
était si pauvre qu'il habitait, en compagnie de sa femme Isabelle, surveillait un ragoût qui avait un délicieux parfum d'oignon et de
dans un vieux tonneau. , poireau.
C'était là sa chaumière. Tous deux ne se nourrissaient que de
poissons et de pain sec.
Les jours où Pierre ne rapportait rien, ils se couchaient triste-
ment sur leur froide paille.
Un jour de Noël, Pierre était resté comme d'habitude de longues
heures à jeter la ligne sans que le moindre goujon mordit à son
hameçon.
11 faut dire qu'il avait au préalable cassô un peu la glace sur la
rivière, car, comme au Pôle Nord, il faut briser à coup de pioche
la banquise pour harponner les poissons.
Pierre songeait déjà au lamentable retour à la maison, je veux
dire au tonneau, avec le panier vide, quand tout à coup, il sentit
une légère secousse au bout de sa ligne et il tira — ô quelle joie!
— un petit poisson bien gras qui se débattit en vain. .
r r o ~> — Lne jolie maisonnette avec des volets verts.
Pierre raconta à sa femme l'aventure, mais, à son grand éton-
neraient, loin d'en être ravie, Isabelle devenait sombre et pensive.
Aussi mangea-t-il son ragoût avec amertume.
« Tu n'as été qu'un imbécile, lui dit Isabelle, tu aurais bien pu
lui demander un bel hôtel, des voitures, des domestiques. Est-ce
qu'il ne te doit pas la vie? »
Pierre trouva Isabelle bien exigeante et il déclara que la mai-
sonnette'était suflisante. Mais Isabelle lui répéta tant et tant qu'elle
voulait un bel bôtel que Pierre se décida à retourner à la rivière et
à appeler le petit poisson.
Après avoir crié trois fois, Pierre vit que l'eau se troublait.
— Un petit poisson bien pras qui se débattit vainement.
« Il sera bon frit », dit-il, en se parlant à lui-môme, et il claqua de
la langue, car il avait la faiblesse d'être gourmand.
Sa femme Isabelle obtenait de lui tout ce qu'elle désirait rien
qu'en lui offrant une bonne friture.
Au moment de coucher le petit poisson bien gras sur les herbes , . .
fraîches de son panier, Pierre entendit que la malheureuse bête ~ U tête du pGt,t polsson émergea des grands ronds'
lui parlait ainsi :
Rends-moi la vie Bientôt la tête du petit poisson émergea des grands ronds qui se
Qui m'est ravie. tonnèrent à la surface de l'eau.
a__* i 4. -ii p j l ! i i H faut dire que Pierre avait encore cassé la glace de la rivière.
Pieue dont le cœur est sensible, fut ému de la voix douce et „ Que me veux-tu? .» lui demanda le poisson,
suppliante du poisson, et il oublia spontanément sa misère et les Pierre, tout penaud, s'exprima comme il suit : « Ma femme vou-
reproenes certains de sa lemme. _ drait etre une grande dame> »
Aussi rejeta-t-il le poisson dans 1 eau froide. Ceci fait, i prit sa Le petit poisson fronça l«s écailles, mais répondit gentiment:
RENTRE C EST FAIT
casquette et voulut partir, mais une voix douce et suppliante le
rappela. C'était celle du poisson qui, la tête sortie de l'eau, lui
Demande-moi
N'importe quoi!
parlait é • poisson qui, la tete sortie de 1 eau, lui Que] fut son étonnement lorsqu'il trouva en entrant à la place de
Demande moi ^ l,et*te maison modeste, un superbe hôtel avec un concierge.
— Un superbe hôtel avec un concierge.
Dans l'escalier un tapis rouge et sur les frises des murs et des
plafonds, des guirlandes de petites poires en verre qui s'allumaient
— Demande-moi n'importe quoi. d'elles-mêmes.
Au premier étage, de beaux messieurs et de belles personnes, en
Pierre, trop simple pour s'étonner d'un miracle, ne réfléchit pas grande toilette, prétendaient tous être ses amis et le remerciaient
longtemps. de les avoir invités à diner chez lui.
« Je suis très mal logé dans mon tonneau, ma femme Isabelle On lui passa un habit à la boutonnière duquel il trouva un petit
aussi; une habitation un peu meilleure nous ferait plaisir », répondit ruban rouge.
Pierre. • Un maître d'hôtel, que Pierre avait pris d'abord pour un prince
« RENTRE, C'EST FAIT », rétorqua le petit poisson. royal, lui indiqua sa place dans la salle à manger auprès d'une
Pierre n'en crut pas ses yeux lorsqu'il vit, en entrant, à la place opulente dame aux cheveux jaunes, frisés et ondulés, qui .le re-
du vieux tonneau une jolie maisonnette avec des volets verts et des gardait en souriant, avec une longue machine qu'elle tenait devant
pots de fleurs aux fenêtres. Une armoire à glace était dans la les yeux.
chambre et une pendule ornait la cheminée. Un fourneau allumé C'est à peine s'il reconnut Isabelle, tant elle avait changé. Et il
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Le Pauvre Pêcheur où les tristes conséquences d’une ambition démesurée. Conte de Noël
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
Le rire: journal humoristique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsdatum (normiert)
1897 - 1897
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
In Copyright (InC) / Urheberrechtsschutz
Creditline
Le rire, 4.1897-1898, No. 164 (25 Décembre 1897), S. 2
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg