RENSEIGNEMENTS INEDITS
SUR LA
GRÉATION DU MONDE
La création du monde n’alla pas sans nom-
breuses dit'licultés. Il serait peut-être temps
de reconnaître enfin la hardiesse de cette
entreprise et, malgré de petites erreurs, le
génie de Celui qui en régla les mondres dé-
tails.
Le Créateur ne disposait que d’un nombre
assez restreint de matériaux encore informes;
il était nécessaire, tout d’abord, de les classer
et de les mettre à peu près en ordre. Il fallait
creuser des mers, élever des continents en
terrassements, régler le cours des fleuves, as-
surer1 l’empoissonnement des rivières, élever
du gibier sur terre et dans l’air, créer l’homme,
eniin, si possible, le tout en l’espace de six
jours aux termes d’un cahier des charges
secret ou de quelque mystérieux pari. Au
surplus, je passe tous ces détails techniques.
Certains esprits légers diront : « Mais avec
de l’argent on peut tout, on met les travaux
en adjudication par chantiers, on travaille de
nuit à l’électricité... » Gros malins! pites-moi,
je vous prie, comment on aurait pu faire,
puisqu'il s’agissait justement de créer les ad-
judicataires, l'électricité et le reste. Et puis,
qui vous dit que Dieu avait tant d’argent! Ces
objections sont vraiment trop peu sérieuses
pour que je m’y
attarde plus
longtemps.
La grosse dif-
ficulté qui de-
vait, avant tout,
retenir l’atten-
tion du Créateur
était de savoir
*_ =. quelle forme il
fallait donner à
la Terre. N’ayant aucune raison de favo-
riser un côté plutôt que l’autre, il décida
de la faire ronde. Puis, incontinent, il créa
les plantes, les animaux, enfin l’homme
avec ce qui lui restait, et s'e reposa.
Mais voici que bientôt s’élevèrent de la
Terre des plaintes et des gémissements.
Dieu regarda et voici ce qu’il vit :
Les hommes placés sur le haut de la
Terre, du côté du Soleil, succombant à la
chaleur, noircissaient. Certains étaient
même à moitié carbonisés. Par contre, les
hommes placés sous la Terre, la tète en
bas, horriblement congestionnés, présen-
taient une figure épouvantablement rouge
et commençaient à étouffer.
Les hommes placés sur le côté étaient
restés blancs. Toutefois, un grand nombre,
plongés dans une profonde obscurité,
étaient jaunes de terreur.
Le Créateur vit qu’il n’y avait pas
un moment à perdre; les trois quarts
des hommes étaient déjà abîmés. Af-
folés, l’es anges se précipitaient aux
machines, ne sachant que faire, attendant des ordres.
— Roulez! cria enfin la voix divine; et en même temps,une
formidable impulsion envoyait rouler la Terre dans l’espace.
Cependant, le mal n’était qu’à moitié conjuré ; dans quelques
heures, les derniers hommes blancs allaient se trouver sous
la Terre, la tête en bas, guettés, eux aussi, par l’apoplexie.
C’est alors que le Tout-Puissant, en sa sagesse, parla ainsi :
(i Voici, hommes, ce que vous ferez : vous resterez debout et
travaillerez tant que vous serez en haut de la Terre, sous les
rayons bienfaisants du Soleil; mais quand viendra le soir, vous
vous coucherez à plat sur des lits et resterez ainsi toute la nuit
pendant que vous
passerez au-dessous
de la Terre. Il ne
vous arrivera ainsi
aucun mal ! »
Los hommes fi-
rent depuis ce jour ce
que Dieu leur avait
commandé. Quand
vient la nuit, ils se
couchent et passent
ainsi sans encombre
sous la Terre. Quant
aux nègres, aux Peaux-
aux Chinois,
cette pratique leur évite
de nouveaux accidents,
niais la couleur qui leur
vient de leurs pères n’en
subsiste pas moins. 11 y
a là une malfaçon qu’l1
faut se contenter de dé
plorer.
) La morale de tout cela,
c’est qu’il faut se .coucher
le soir et ne pas ressem-
bler à cês hommes impies
et désobéissants qui res-
tent levés toute la nuit,
malgré les ordres de Dieu,
ce dont ils sont du reste
bien punis, car ils devien-
nent forcément rouges et
apoplectiques.
W. DE P.WVLOWSKI.
— Très bien, votre tableau, mon garçon ; mais
ça ne vaut pas le tableau d’avancement !
Dessin de L. Lebéiïue.
LE CHAPEAU CACHE-POV
' Ali ça, qu’est-ce qu’ils ont donc à me regarder
comme une bète curieuse ? Dessin de G. Delaw.
Tout ça, mon vieux colon, c’est des mots en
I a’1'- Dessin de J. Dépaquit.
SUR LA
GRÉATION DU MONDE
La création du monde n’alla pas sans nom-
breuses dit'licultés. Il serait peut-être temps
de reconnaître enfin la hardiesse de cette
entreprise et, malgré de petites erreurs, le
génie de Celui qui en régla les mondres dé-
tails.
Le Créateur ne disposait que d’un nombre
assez restreint de matériaux encore informes;
il était nécessaire, tout d’abord, de les classer
et de les mettre à peu près en ordre. Il fallait
creuser des mers, élever des continents en
terrassements, régler le cours des fleuves, as-
surer1 l’empoissonnement des rivières, élever
du gibier sur terre et dans l’air, créer l’homme,
eniin, si possible, le tout en l’espace de six
jours aux termes d’un cahier des charges
secret ou de quelque mystérieux pari. Au
surplus, je passe tous ces détails techniques.
Certains esprits légers diront : « Mais avec
de l’argent on peut tout, on met les travaux
en adjudication par chantiers, on travaille de
nuit à l’électricité... » Gros malins! pites-moi,
je vous prie, comment on aurait pu faire,
puisqu'il s’agissait justement de créer les ad-
judicataires, l'électricité et le reste. Et puis,
qui vous dit que Dieu avait tant d’argent! Ces
objections sont vraiment trop peu sérieuses
pour que je m’y
attarde plus
longtemps.
La grosse dif-
ficulté qui de-
vait, avant tout,
retenir l’atten-
tion du Créateur
était de savoir
*_ =. quelle forme il
fallait donner à
la Terre. N’ayant aucune raison de favo-
riser un côté plutôt que l’autre, il décida
de la faire ronde. Puis, incontinent, il créa
les plantes, les animaux, enfin l’homme
avec ce qui lui restait, et s'e reposa.
Mais voici que bientôt s’élevèrent de la
Terre des plaintes et des gémissements.
Dieu regarda et voici ce qu’il vit :
Les hommes placés sur le haut de la
Terre, du côté du Soleil, succombant à la
chaleur, noircissaient. Certains étaient
même à moitié carbonisés. Par contre, les
hommes placés sous la Terre, la tète en
bas, horriblement congestionnés, présen-
taient une figure épouvantablement rouge
et commençaient à étouffer.
Les hommes placés sur le côté étaient
restés blancs. Toutefois, un grand nombre,
plongés dans une profonde obscurité,
étaient jaunes de terreur.
Le Créateur vit qu’il n’y avait pas
un moment à perdre; les trois quarts
des hommes étaient déjà abîmés. Af-
folés, l’es anges se précipitaient aux
machines, ne sachant que faire, attendant des ordres.
— Roulez! cria enfin la voix divine; et en même temps,une
formidable impulsion envoyait rouler la Terre dans l’espace.
Cependant, le mal n’était qu’à moitié conjuré ; dans quelques
heures, les derniers hommes blancs allaient se trouver sous
la Terre, la tête en bas, guettés, eux aussi, par l’apoplexie.
C’est alors que le Tout-Puissant, en sa sagesse, parla ainsi :
(i Voici, hommes, ce que vous ferez : vous resterez debout et
travaillerez tant que vous serez en haut de la Terre, sous les
rayons bienfaisants du Soleil; mais quand viendra le soir, vous
vous coucherez à plat sur des lits et resterez ainsi toute la nuit
pendant que vous
passerez au-dessous
de la Terre. Il ne
vous arrivera ainsi
aucun mal ! »
Los hommes fi-
rent depuis ce jour ce
que Dieu leur avait
commandé. Quand
vient la nuit, ils se
couchent et passent
ainsi sans encombre
sous la Terre. Quant
aux nègres, aux Peaux-
aux Chinois,
cette pratique leur évite
de nouveaux accidents,
niais la couleur qui leur
vient de leurs pères n’en
subsiste pas moins. 11 y
a là une malfaçon qu’l1
faut se contenter de dé
plorer.
) La morale de tout cela,
c’est qu’il faut se .coucher
le soir et ne pas ressem-
bler à cês hommes impies
et désobéissants qui res-
tent levés toute la nuit,
malgré les ordres de Dieu,
ce dont ils sont du reste
bien punis, car ils devien-
nent forcément rouges et
apoplectiques.
W. DE P.WVLOWSKI.
— Très bien, votre tableau, mon garçon ; mais
ça ne vaut pas le tableau d’avancement !
Dessin de L. Lebéiïue.
LE CHAPEAU CACHE-POV
' Ali ça, qu’est-ce qu’ils ont donc à me regarder
comme une bète curieuse ? Dessin de G. Delaw.
Tout ça, mon vieux colon, c’est des mots en
I a’1'- Dessin de J. Dépaquit.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Le rire: journal humoristique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Objektbeschreibung
Bildunterschrift:
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsdatum (normiert)
1899 - 1899
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
In Copyright (InC) / Urheberrechtsschutz
Creditline
Le rire, 5.1898-1899, No. 227 (11 Mars 1899), S. 4
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg