Le rire: journal humoristique: Le rire: journal humoristique (N.S. 1912 (Nr. 466-569))

pour l'aviation militaire
— Avec ce que coûtent trois députés on a deux aéroplanes. La voilà peut-être la réforme électorale.

LE RIRE DE LA SEMAINE

Les questions d'éducation sont éternellement posées ; c'est
dire qu'elles ne seront jamais résolues.

En pareille matière, toutes les opinions sont permises... Ainsi
la plupart des éducateurs recommandent à leurs élèves d'être
très chastes dans leur façon de s'habiller ; il est même des pen-
sionnats où les Claudines sont tenues de ne porter que des pan-
talons fermés...

M. Raymond Duncan,- lui, est d'un autre avis.

— Mesdames et Messieurs, déclare-t-il, soyez nus le plus
possible... et le plus souvent possible !

J'ai entendu l'autre jour une conférence de cet apôtre ou, si
vous préférez, de. ce fumiste. M. Duncan a dit des choses dans
ce genre, mais avec un accent que je ne peux rendre, malheu-
reusement.

— Un gentleman habillé, ce n'est pas joli du tout... Un gen-
tleman tout nu, c'est très joli... Les madames, c'est absolument
parallèle : habillées, elles ne sont pas confortables... Toutes nues,
c'est très agréable !

M. Raymond Duncan s'écria, sublime :

— La nudité n'est pas immorale... Ainsi, moi, si je me mettais
nu devant vous, je ne vous scandaliserais pas !...

Il avait l'air de nous défier, mais personne ne tenait à con-
templer son académie, c'est pourquoi il ne trouva pas de con-
tradicteurs. Ah! si sa sœur, Isadora, nous avait tenu le même
langage! Il est vrai que cette jeune personne ne parlait pas
tant : elle se déshabillait sans faire de phrases... Cette élo-
quence de la chair en vaut une autre.

. Justement, à propos d'éducation, je reçois une revue intitu-
lée : le Nouvel éducateur, organe du féminisme rationnel.
Cette publication contient des choses curieuses. Par exemple,
au chapitre des consultations sentimentales, je lis ceci :

Mère-Grand j'aime beaucoup mon mari, je ne voudrais pas
lui faire de la peine ni le tromper... Mais voilà que j'en aime
un autre. J'ai trente-cinq ans, et je sens que je deviens comme
une pile électrique. Mes enfants ne comptent plus pour moi...
Que faire ?

Question embarrassante ! Que répondre à cette... pile élec-
trique ?

Mére-Grand n'est pas embarrassée. Elle prend sa plume de
Tolède et donne ce conseil :

« A Madame Bl. T... à Paris. — Votre cas est grave. Mais
pas incurable. La guérison peut être assez rapide si vous avez
le moyen de faire comprendre la situation à votre mari et du

faire seule avec lui un voyage d'amoureux. Laissez tout là pen-
dant au moins quinze jours : maison, affaires, enfants, soucis...
La cure en vaut la peine. Quand vous reviendrez, vous serez
peut-être en espérances maternelles, mais vous aurez la force
de ne plus revoirie monsieur en question et vous aurez retrouvé
le calme et la sérénité... Arrangez-vous de façon que votre mari
sache qu'il aurait pu vous perdre... Qu'il s'occupe de vous...
Vous le savez : une femme doit toujours donner de l'occupa-
tion à son mari. »
Et voilà !

Seulement, je me demande si ce conseil suffira à décharger
la pile électrique. Une grande passion ne se guérit pas en quinze
jours, même si le mari s'en occupe!

Et puis, si le mari n'est plus de l'âge où l'on peut s'occuper
utilement? Dans le même numéro, je trouve ceci :

Sois prompt et actif
Flexible et attentif,
Energique et fort.
Laborieux et patient,
Sensible et résistant,
Spontané et réfléchi.

C'est facile à dire... Bien des maris, un peu fatigués, ne
pourraient remplir ce programme. Et c'est peut-être pourquoi,
parmi les femmes mariées, il y a tant de piles électriques !

*

* *

Un grand concours littéraire vient d'être organisé au Japon.
Sur un thème donné, les bardes de J'Empire du Soleil Levant
doivent broder un court poème. Déjà, plus de 6.000 envois sont
parvenus au comité présidé par le mikado en personne.

— Pardon, demandez-vous, quel est le sujet imposé?

C'est très simple; le thème à développer tient en cette for-
mule :

Une grue sur un pin.

— Une grue ?

Parfaitement, une grue ! Mais entendons-nous, il s'agit d'une
vraie grue, d'un de ces oiseaux de passage qui... Ne me faites pas
observer que les autres grues sont aussi des oiseaux de passage :
exemple, les habituées du passage des Panoramas... Ne méta-
phorisons pas !

N'est-ce pas que c'est excitant comme sujet: Une grue sur
un pin ?

M. Rostand écrirait Jà-dessus une ballade, où interviendraient
pour rimer richement avec les laissés pour compte d'une vir-
tuosité facile, Arsène Lupin et Perlinpinpin...

Mais je pense que nombre de nos poètes préféreraient inler-