Julien à l'Opéra-Comique. d'un prêtre (encore, dirait Jaurès, l'union du sabre et du gou-
Des prénoms suffisent a M. Gustave Charpentier pour baptiser pillon!), une comtesse jette son rejelon, séminariste chaste et
ses œuvres. pur, dans les draps d'une actrice, afin que celle-ci lui donne les
Après la petite ouvrière Louise, voici Julien le grand artiste ; premières leçons d'articulation et de maintien,
en attendant, sans doute, Materna, courtisane, et tsaac, banquier... Lors de là création, il y eut grand bruit dans le Landerneau
Ne vous fiez pas, bonnes gens, à cette apparente simplicité : aristocratique; des douairières s'émurent; et l'une d'elles fit
chaque œuvre du maître contient un symbole; chaque person- demander à l'auteur de prêter un emploi moins ridicule, et plus
nage est une entité. respectueux à M. le curé.
Icile héros est un incompris. Aussi son caractère et ses actions — J'y consentirai, déclara Feydeau, quand Mme la duchesse
sont-ils parfois incompréhensibles : c'est un symbole. d'U..s renoncera à faire bénir sa meute parles représentants du
Mais Gustave Charpentier n'est pas seulement faiseur de vers culte,
et compositeur de musique. Il joint encore (dualité rare) le don Et il n'y eut rien de changé à ce Bourgeon gentilhomme,
de l'observation à celui du rêve. Aussi trois tableaux de sa pièce
sont-ils situés dans le Rêve et les cinq autres dans la Vie.
M. Charpentier, vulgaire à son Aux Ambassadeurs : Non, pas les
cœur défendant, est sublime sans le . mains!
faire exprès. Comme son héros, Julien, Au mépris de ce titre, les specta-
il ne semble pas maître de son génie. teurs applaudissent des deux mains
Il cherche la perfection, ce brave / v_jH j (ce qui est encore la meilleure façon
monsieur Julien ; et comme la perfec- l ÏT^Ï ^Jr d'applaudir), la meilleure Revue don-
tion n'est pas de ce monde, il fuit notre \ _^^^1 née, depuis longtemps, sur la scène de
fangeux bitume pour escalader les Ç ^-^r ? /"^3P"/i Paris la plus exiguë et la moins favo-
sommets de l'Empyrée. (L'Empyrée, x oj^ %.*■/'S (l I rable aux changements et défilés. Il y
c'est la paix; et un sommet sans dé- vO*-r /jlp ^ a m I en a pourtant, parfaitement réglés,
fauts vaut seul un long poème.)... (|/J f\i I grâce à l'ingéniosité si artiste de P. L.
Hélas! le Doute (D majuscule, ô typo- y\ïl \l / Fiers et de son complice Eugène Hé-
graphe !) et la Désillusion (D majuscule ( cyiS 7 1 ros.
encore, s. t. p.) précipitent notre ami \ r*Ç^ VA1^» ^-^\ x Revue luxueuse, vivante, variée. Pas
Julien au pied du Moulin-Rouge, sur \ \ jh^Js^^K, i ^e l°nSueurs dans le dialogue ni dans
cette place Blanche où Willette voit •<^^~^^B* /V\, ~/,y les couplets ; avec l'alternance, syste-
farandoler des Pierrettes, mais où rô- Ç \k \ jBÊÊr / - °^\\ o/l matique et traditionnelle, des scènes
dent surtout des pierreuses ; et Julien, \ \\—: -~J4fBÈsi&^ / ^ \ c, ' °/ comiques ou charmantes,
sublime incompris, se livre aux plus N I ° x c /Jl Du charme, en voici avec le clair
crapuleuses vadrouilles. -, J0&F^\ \ \ l c sourire et la voix non moins claire de
Une aventure de ce genre (toute? \ \ \ „ l'adorable Mary Massart, et les grâces,
proportions gardées) advint jadis au w. 1 ut 1 \ L / 0^^L^ r \S callipyges ou fluettes, de MIIes Brienz,
jeune garçon de L'architecte Dédale, \ \H___ ////t /^/^^ÊÈtS^ May Blossom, Coligny et Serana.
un nomme Icare, lequel brûla ses ai- u—' ~~ \'m////// tpfl ^ Rollin, Moriss, Duval, mettent en
lerons aux feux redoutables du soleil. J'--//J?é////A^^^SÉk. J°^e l'assistancc- Mais il faut citer,
Le sort du poète Julien, ce Jean W/0M/^//^Bk surtout, la scène de bouffonnerie épi-
Icare, ne sera pas partage par son S-----'-^-^il//^^v^^^^Sw 'lue 011 Dranem. nous apparaît en
illustre auteur. Une fois de plus va *-iT"""Tr . u' '//////w/////,■ /^Wm Alfred de Vigny. Avec, une mélancolie
triompher notre Gustave Charpentier ^> i ii ~~~ \fr/// M//^/^^S^ cocasse, notre comique populaire re-
montmartrois et national,- car il y a __\___1 / Jr v/wW/ÀvI&l trace les petites misères posthumes
de la gaîté, delà roublardise, des lar- " I \\ waes grands hommes. On ne s'attendait
mes, de l'orgue de Barbarie, de la I \\ (\ É^^^^^Ê^' guère à voir le chanteur des Petits
grosse caisse et des symboles... Que f| \\Ti-~ l~-^~~J(/' ' f Pois sous les traits du chantre d'Eloa.
demander de plus ? ■ ' J-p ' Mais le devoir du revuiste est de
_, mue ève lavallière, s1arroger tous les droits; et une fois
Avec La Dame * cA« MaxMs „„ °"- * **• * *~ «—* « V^ tj™ " ~~ * ^
fait le maximum aux Variétés. Dessin do de losqles. qu6 ^pQ de cette merVeilleuse dan-
Cette pièce possède la solidité d'une seuse : Carmelita Ferrer ?... On gai-
farce classique. Elle a même le leitmotiv qui s'ancre dans les vaude l'expression « sensation d'art », au point qu'on ne peut
mémoires : si Molière a trouvé le « Sans dot ! » et << Qu'allait-il l'entendre sans sourire. C'est cependant le terme qu'il convient
faire dans cette galère? » Georges Feydeau a inventé le « Et d'employer à l'égard de cette Andalouse au talent inégalable,
allez donc! c'est pas mon père!... » Le mot fit fortune; et la
pièce aussi : elle a même fait, cette pièce, la fortune de bien
d'autres vaudevilles dont on pourrait dire : «Etaliez donc! c'est Interprétations loufoques.
elle leur mère!... » Bien que l'on s'épate difficilement, à Marseille, M. Silvain et
Comme pour Hamlet, une grave question se pose au sujet de sa dame ont réussi à stupéfier la Cannebière ; et, de fait, il y a
la môme Crevette : doit-elle être blonde et grasse ou maigre et de quoi : dans le Louis XI de Casimir Delavigne, comme
brune?... s'il ne suffisait pas de voir le vice-doyen représenter, avec sa
Pour trancher la question, Lavallière s'est perruquée d'étoupe, stature gigantesque et son ventre faistaffien, le roi chétif et
histoire de ne pas trop faire oublier Cassive; et il en résulte que recroquevillé, le rôle de Nemours est joué par son épouse;
ses grands yeux noirs écarquillés paraissent plus énormes — cependant que le dauphin (tenu toujours par un travesti) a
encore. Elle est trépidante, joyeuse, cordiale. Galipaux reste le un acteur pour interprète.
plus jeune des quinquagénaires. Il est probable qu'à son retour de tournée, M. Silvain de nou-
_ veau menacera M. Jules de sa démission, si celui-ci ne consent
pas à montrer Louise dans Saint-Vallier et lui, Silvain, dans
L'Athénée reprend le Bourgeon. Avec un cynisme souriant et Chérubin. M. Claretie cédera; et les habitués, qui en ont vu
une prestigieuse habileté, Georges Feydeau a osé l'une des bien d'autres, souriront avec mansuétude,
situations les plus périlleuses. Sur les'conseils d'un major et Ragotin.
Des prénoms suffisent a M. Gustave Charpentier pour baptiser pillon!), une comtesse jette son rejelon, séminariste chaste et
ses œuvres. pur, dans les draps d'une actrice, afin que celle-ci lui donne les
Après la petite ouvrière Louise, voici Julien le grand artiste ; premières leçons d'articulation et de maintien,
en attendant, sans doute, Materna, courtisane, et tsaac, banquier... Lors de là création, il y eut grand bruit dans le Landerneau
Ne vous fiez pas, bonnes gens, à cette apparente simplicité : aristocratique; des douairières s'émurent; et l'une d'elles fit
chaque œuvre du maître contient un symbole; chaque person- demander à l'auteur de prêter un emploi moins ridicule, et plus
nage est une entité. respectueux à M. le curé.
Icile héros est un incompris. Aussi son caractère et ses actions — J'y consentirai, déclara Feydeau, quand Mme la duchesse
sont-ils parfois incompréhensibles : c'est un symbole. d'U..s renoncera à faire bénir sa meute parles représentants du
Mais Gustave Charpentier n'est pas seulement faiseur de vers culte,
et compositeur de musique. Il joint encore (dualité rare) le don Et il n'y eut rien de changé à ce Bourgeon gentilhomme,
de l'observation à celui du rêve. Aussi trois tableaux de sa pièce
sont-ils situés dans le Rêve et les cinq autres dans la Vie.
M. Charpentier, vulgaire à son Aux Ambassadeurs : Non, pas les
cœur défendant, est sublime sans le . mains!
faire exprès. Comme son héros, Julien, Au mépris de ce titre, les specta-
il ne semble pas maître de son génie. teurs applaudissent des deux mains
Il cherche la perfection, ce brave / v_jH j (ce qui est encore la meilleure façon
monsieur Julien ; et comme la perfec- l ÏT^Ï ^Jr d'applaudir), la meilleure Revue don-
tion n'est pas de ce monde, il fuit notre \ _^^^1 née, depuis longtemps, sur la scène de
fangeux bitume pour escalader les Ç ^-^r ? /"^3P"/i Paris la plus exiguë et la moins favo-
sommets de l'Empyrée. (L'Empyrée, x oj^ %.*■/'S (l I rable aux changements et défilés. Il y
c'est la paix; et un sommet sans dé- vO*-r /jlp ^ a m I en a pourtant, parfaitement réglés,
fauts vaut seul un long poème.)... (|/J f\i I grâce à l'ingéniosité si artiste de P. L.
Hélas! le Doute (D majuscule, ô typo- y\ïl \l / Fiers et de son complice Eugène Hé-
graphe !) et la Désillusion (D majuscule ( cyiS 7 1 ros.
encore, s. t. p.) précipitent notre ami \ r*Ç^ VA1^» ^-^\ x Revue luxueuse, vivante, variée. Pas
Julien au pied du Moulin-Rouge, sur \ \ jh^Js^^K, i ^e l°nSueurs dans le dialogue ni dans
cette place Blanche où Willette voit •<^^~^^B* /V\, ~/,y les couplets ; avec l'alternance, syste-
farandoler des Pierrettes, mais où rô- Ç \k \ jBÊÊr / - °^\\ o/l matique et traditionnelle, des scènes
dent surtout des pierreuses ; et Julien, \ \\—: -~J4fBÈsi&^ / ^ \ c, ' °/ comiques ou charmantes,
sublime incompris, se livre aux plus N I ° x c /Jl Du charme, en voici avec le clair
crapuleuses vadrouilles. -, J0&F^\ \ \ l c sourire et la voix non moins claire de
Une aventure de ce genre (toute? \ \ \ „ l'adorable Mary Massart, et les grâces,
proportions gardées) advint jadis au w. 1 ut 1 \ L / 0^^L^ r \S callipyges ou fluettes, de MIIes Brienz,
jeune garçon de L'architecte Dédale, \ \H___ ////t /^/^^ÊÈtS^ May Blossom, Coligny et Serana.
un nomme Icare, lequel brûla ses ai- u—' ~~ \'m////// tpfl ^ Rollin, Moriss, Duval, mettent en
lerons aux feux redoutables du soleil. J'--//J?é////A^^^SÉk. J°^e l'assistancc- Mais il faut citer,
Le sort du poète Julien, ce Jean W/0M/^//^Bk surtout, la scène de bouffonnerie épi-
Icare, ne sera pas partage par son S-----'-^-^il//^^v^^^^Sw 'lue 011 Dranem. nous apparaît en
illustre auteur. Une fois de plus va *-iT"""Tr . u' '//////w/////,■ /^Wm Alfred de Vigny. Avec, une mélancolie
triompher notre Gustave Charpentier ^> i ii ~~~ \fr/// M//^/^^S^ cocasse, notre comique populaire re-
montmartrois et national,- car il y a __\___1 / Jr v/wW/ÀvI&l trace les petites misères posthumes
de la gaîté, delà roublardise, des lar- " I \\ waes grands hommes. On ne s'attendait
mes, de l'orgue de Barbarie, de la I \\ (\ É^^^^^Ê^' guère à voir le chanteur des Petits
grosse caisse et des symboles... Que f| \\Ti-~ l~-^~~J(/' ' f Pois sous les traits du chantre d'Eloa.
demander de plus ? ■ ' J-p ' Mais le devoir du revuiste est de
_, mue ève lavallière, s1arroger tous les droits; et une fois
Avec La Dame * cA« MaxMs „„ °"- * **• * *~ «—* « V^ tj™ " ~~ * ^
fait le maximum aux Variétés. Dessin do de losqles. qu6 ^pQ de cette merVeilleuse dan-
Cette pièce possède la solidité d'une seuse : Carmelita Ferrer ?... On gai-
farce classique. Elle a même le leitmotiv qui s'ancre dans les vaude l'expression « sensation d'art », au point qu'on ne peut
mémoires : si Molière a trouvé le « Sans dot ! » et << Qu'allait-il l'entendre sans sourire. C'est cependant le terme qu'il convient
faire dans cette galère? » Georges Feydeau a inventé le « Et d'employer à l'égard de cette Andalouse au talent inégalable,
allez donc! c'est pas mon père!... » Le mot fit fortune; et la
pièce aussi : elle a même fait, cette pièce, la fortune de bien
d'autres vaudevilles dont on pourrait dire : «Etaliez donc! c'est Interprétations loufoques.
elle leur mère!... » Bien que l'on s'épate difficilement, à Marseille, M. Silvain et
Comme pour Hamlet, une grave question se pose au sujet de sa dame ont réussi à stupéfier la Cannebière ; et, de fait, il y a
la môme Crevette : doit-elle être blonde et grasse ou maigre et de quoi : dans le Louis XI de Casimir Delavigne, comme
brune?... s'il ne suffisait pas de voir le vice-doyen représenter, avec sa
Pour trancher la question, Lavallière s'est perruquée d'étoupe, stature gigantesque et son ventre faistaffien, le roi chétif et
histoire de ne pas trop faire oublier Cassive; et il en résulte que recroquevillé, le rôle de Nemours est joué par son épouse;
ses grands yeux noirs écarquillés paraissent plus énormes — cependant que le dauphin (tenu toujours par un travesti) a
encore. Elle est trépidante, joyeuse, cordiale. Galipaux reste le un acteur pour interprète.
plus jeune des quinquagénaires. Il est probable qu'à son retour de tournée, M. Silvain de nou-
_ veau menacera M. Jules de sa démission, si celui-ci ne consent
pas à montrer Louise dans Saint-Vallier et lui, Silvain, dans
L'Athénée reprend le Bourgeon. Avec un cynisme souriant et Chérubin. M. Claretie cédera; et les habitués, qui en ont vu
une prestigieuse habileté, Georges Feydeau a osé l'une des bien d'autres, souriront avec mansuétude,
situations les plus périlleuses. Sur les'conseils d'un major et Ragotin.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Le rire au théatre
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
Le rire: journal humoristique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsdatum
um 1913
Entstehungsdatum (normiert)
1908 - 1918
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
In Copyright (InC) / Urheberrechtsschutz
Creditline
Le rire, N.S. 1913, No. 541 (14 Juin 1913), S. 10
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg