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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 3)

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Genevay, Antoine: Sir Thomas Lawrence, P. R. A. (1769-1830)
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https://doi.org/10.11588/diglit.16676#0438
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SIR THOMAS LAWRENCE, P. R. A. 395

année, il avait largement usé ses forces dans une existence de travail et de plaisir, ayant mené de
front la vie d'artiste, de courtisan et d'homme du monde; de plus les préoccupations matérielles l'as-
siégèrent toujours. Malgré les guinées qu'il avait retirées de ses portraits et du droit de les graver qu'il
vendait fort cher, il était très-gêné, ayant dépensé des sommes folles pour sa galerie. D'autres malheurs
étaient venus l'assaillir: après son père et sa mère, moururent ses frères tendrement aimés; une perte
plus cruelle encore le frappa. — Il y avait bien des années, une charmante femme entrait dans l'atelier
de l'artiste pour lui demander son portrait, elle n'en sortit plus; elle devint la compagne de sa vie.
Mistress Wolfe s'éteignit en 1829, ce fut un coup mortel pour Lawrence. Cependant il travaillait tou-
jours ; à la fin de 1829, il exécutait pour le club l'Athenaeum, dont il était membre, un portrait de
George IV; il présidait régulièrement les séances de l'Académie Royale de peinture, et, quoiqu'il fût
très-souffrant, on ne croyait point sa fin si prochaine. Il eut une heureuse mort : le 7 janvier 1830, il
écoutait la lecture d'un article du New Monthly Magazine, écrit par Campbell, appréciant et célébrant
le talent de Flaxman, lorsqu'il fut pris de suffocation, et, après une crise douloureuse mais courte, il
cessa de souffrir. Il ne pouvait pas souhaiter une fin plus douce.

Aussi bien avait-il vécu sous une étoile heureuse ; sauf les embarras qu'il s'était créés et les maux
inséparables de toute existence humaine, tout lui avait souri. Parti d'une condition difficile, il en était
rapidement sorti, et sa carrière artistique n'avait connu que le succès. Dans les salons du monde il ne
rencontra pas une moindre fortune : la fière aristocratie anglaise l'avait adopté comme un des siens, il
tenait d'ailleurs de George des lettres de noblesse. Par le pinceau et la coquetterie de son esprit il
régna dans le monde des femmes. Ses confrères l'aimèrent, sa renommée lui donna pour clients toutes
les têtes couronnées et les hommes les plus célèbres de son temps ; depuis Canning jusqu'à Sir Robert
Peel, depuis Walter Scott jusqu'à Thomas Moore et au prince Léopold de Saxe-Cobourg, tous furent
ses amis.

Président de l'Académie Royale, membre de nombre d'instituts artistiques de l'Europe et de
lAmérique, premier peintre du Rx>i, décoré de la Légion d'honneur, aucun titre ne lui avait manqué.
Sa mort fut un deuil que portèrent toutes les classes de la société anglaise, ses obsèques eurent lieu
avec une grande pompe et son corps fut déposé à côté de ceux de ses amis Joshua Reynolds et
Benjamin West.

Wilkie lui succéda en qualité de premier peintre du Roi, et Arthur Shee comme président de
l'Académie Royale.

Lawrence laissa un testament, il contenait cette clause :

« La galerie de tableaux des anciens maîtres que je possède est par le nombre et la valeur sans
rivale en Europe. D'après moi elle vaut 20,000 liv. Je désire qu'elle soit offerte d'abord à sa très-
gracieuse Majesté George IV pour la somme de 18,000 liv. Si elle ne lui convenait pas, elle serait
présentée au commissaire du Musée anglais, puis au très-honorable Robert Peel et au très-honorable
Comte de Dudley ; sur leur refus, je désire qu'elle soit annoncée dans toutes les capitales de l'Europe,
et après un laps de deux ans, s'il ne se présente aucun acquéreur pour le prix de 20,000 liv., qu'elle
soit livrée aux enchères publiques. » — Les volontés de Lawrence furent exécutées ; définitivement
mise sous le marteau, la célèbre galerie produisit 15,445ls- i7sh 6p- Elle avait certainement coûté
plus cher à son propriétaire.

On a recueilli de Lawrence quelques lettres, quelques vers et des allocutions prononcées par lui
en qualité de président de l'Académie ; ce mince bagage littéraire vaut peu de chose. La plume à la
main, il aime à l'excès le raffiné, le galant ; il vise à l'esprit, au chatoiement des mots. Ne peut-on pas
adresser le même reproche à son pinceau ?

A. Genevay.
 
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