L' art: revue hebdomadaire illustrée (9.1883 (Teil 2))

CHARDIN

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a Lorsqu'on entreprend de parler de l'art du xvme siècle,
de toucher à la mémoire de ses artistes, il vous prend au
seuil de cette étude un grand sentiment de tristesse, une
sorte de mélancolique colère. Devant ce prodigieux exemple
d'oubli, devant l'excès d'ingratitude et l'insolence de mépris
d'une première postérité pour le grand siècle d'art de Louis XV
on se prend à douter des justices de la' France. » C'est ainsi
que débute la fort remarquable notice écrite sur Chardin
par MM. de Goncourt.

Oui, cela est vrai, il faut l'avouer à notre honte, la
première moitié du xixe siècle a méconnu de stupide
façon les gloires de son aîné. Oui, les Watteau, les
Boucher, les Chardin, les Fragonard, les Le Moyne, les
La Tour, les Bretonneau et tant d'autres sont tombés
pour un temps dans un impardonnable oubli ; longtemps
les rayons de leur admirable talent sont restés en-
gloutis dans la nuit noire sans en pouvoir percer les lourdes
opacités : leurs œuvres ont traversé les ventes, se sont
accrochées aux murs des bric-à-brac sans parvenir à fixer
l'œil inepte des connaisseurs bourgeois. Oui, sans doute,
elles ont été répudiées par les galeries et nous les avons
vues passer pour un vil prix entre les mains de l'étranger.
Hélas! tout cela est l'exacte vérité. Cela nous indigne et
nous navre, mais ne nous cause aucun étonnement.

Encadrement composé et dessiné pour «l'Art» par j. Habert-Dys