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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 15.1889 (Teil 2)

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Molmenti, Pompeo: Venise qui s'en va
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Hustin, A.: Ludovic-Napoléon Lepic
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https://doi.org/10.11588/diglit.25868#0218
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1Q2

L’ART.

soutenus par des arcades excessivement pesantes, avec
pilastres en bossage, ayant des fenêtres de tous les ordres
et de tous les styles, avec des consoles disproportionnées,
s’élèvent entre quelques petites maisons, où une vanité
présomptueuse et un sot désir d’innover s’unissent d’une
façon monstrueuse.

Mais tout cela est désormais'achevé, il n’y a donc plus
de remède. Aequo, passata non macina più, dit le proverbe
italien; l’important, c’est de penser à ce qu’on doit faire,
et à Venise, où il y a malgré tout tant d’hommes d’une
intelligence d’élite, aimant leur pays, pleins de bonne
volonté, on doit au moins espérer que l’expérience du
passé servira pour l’avenir. Puisque, vraiment, on n’a pu
sauver cet admirable palais Dandolo qui m’a fait écrire
ces lignes, que l’on tâche au moins que le nouvel édifice
des postes jure le moins possible à côté des vieux et admi-
rables palais noircis par le temps. Mais avant tout, que
l’on éloigne de Venise l’inconvénient que présenterait la
mise à exécution de quelques-uns des projets déjà
approuvés. Nous n’en citerons qu’un seul, dont l’accom-

plissement serait une véritable profanation artistique.

Le quai des Esclavons est connu même de ceux qui
n’ont jamais visité Venise, tant il a été reproduit par les
peintres. Ziem suffirait pour la France. Le quai, se déve-
loppant en demi-cercle, est terminé d’un côté par le Palais
Ducal, de l’autre par des chantiers et des maisons rouges
qui se rattachent ensuite aux Jardins publics. D’un côté,
le divin Palais des Doges, de l’autre, la cité, avec son
cachet tout particulier, Venise la rouge, de Musset, le pays
des enthousiasmes et des enchantements, enchantements
de lumière, de couleur, de forme, que la plume et le pin-
ceau sont impuissants à rendre. Eh bien ! parmi les pro-
jets, se trouve aussi celui de détruire les anciens chantiers,
les maisons rouges qui terminent le quai des Esclavons,
pour construire à la place de petites villas blanches à faire
venir l’eau à la bouche... à un badigeonneur.

Mais cela n’arrivera certainement pas. A Venise, le sen-
timent artistique n’est pas encore éteint.

P. G. Molmenti.

LUDOVIC-NAPOLÉON LEPIC

On a enterré cette semaine un artiste qui s’est beau-
coup produit, beaucoup dépensé, un peu dans tous les
genres, sans réussir à conquérir une notoriété : Ludovic-
Napoléon Lepic.

Il est mort subitement, le dimanche 27 octobre, chez
une de ses amies, une étoile chorégraphique de l’Opéra,
rue Notre-Dame-de-Lorette, à dix heures du matin, à l’âge
de cinquante ans.

Il était né, en effet, le 17 septembre 183g, à Paris. Il
était le fils du général comte Lepic et le petit-fils du géné-
ral Louis Lepic, qui s’était distingué dans les guerres de
la République et du premier Empire.

Elevé au Louvre, il lui était facile, de par ses relations
de famille, d’entrer aux Tuileries et de vivre de la vie de
la cour. Il préféra s’adonner à la peinture et, après
quelques années passées sur les bancs de l’Ecole de Droit,
il entra à l’atelier de Gleyre, de Wappers et de Verlat, puis
à celui de Cabanel.

Dessinateur, aquafortiste, il a, en peinture, abordé la
figure, la marine, le paysage et la décoration. Il débuta au
Salon de 1864 avec le Nouveau Diogène, les Pieds dans le
plat et une étude de chien à l’eau-forte, d’après Jadin. Sa
tête de loup mangée par des corbeaux fit quelque bruit,
en 1868, et, depuis, son nom a figuré, jusqu’en 1888, dans
presque tous les livrets du Salon, manifestant, en 1879,
avec le Retour, — le cercueil du prince impérial dans une
barque, — ses attaches avec la famille déchue.

Il avait obtenu une troisième médaille, en 1877, avec
sa tempête et une de ces barques brisées, ensablées sur la
plage de Berck, qu’il aimait à rendre dans leur aspect
décharné.

Un certain nombre de ses toiles figurent dans les
Musées d’Avignon, Grenoble, Reims, Nantes, Amiens,
Lille, Valenciennes. De toutes, celle d’Amiens, représen-
tant un coup de vent soulevant sur la plage de Berck un

nuage de sable, est, à coup sûr, la plus réussie et la plus
vraie.

Esprit chercheur, laborieux, il s’était adonné à l’ar-
chéologie. C’est lui qui découvrit les cavernes ossifères de
Néron, en Ardèche, sur les bords du Rhône. C’est lui qui
retrouva le renne et le rhinocéros en Provence. Il colla-
bora avec autorité aux reconstitutions préhistoriques du
Musée de Saint-Germain et contribua peu brillamment à
la fondation du Musée d’Aix, en faveur duquel Granet
avait fait une importante donation.

Lepic a visité l’Egypte, suivi attentivement les fouilles
de Pompei et rapporté de ses voyages une foule d’études
peintes ou à l’aquarelle, qu’on a pu voir à Paris, réunies
dans une Exposition spéciale. A côté de ces souvenirs,
figuraient des vues de la Bretagne et de grands panneaux
décoratifs, tels que le Déluge, les Inondations du quai de
Bercy, en 1876, la Bouée, le Christ de Berck, sans comp-
ter diverses adaptations des fables de La Fontaine.

Lepic fut un moment peintre du Ministère de la
Marine. Il a dessiné beaucoup de costumes pour l’Opéra
et décoré des services de table pour des céramistes ; un
de ces services en faïence, exécuté par la maison Leveillé,
figure à l’Exposition Universelle.

Il venait de marier l’une de ses filles et la cérémonie
religieuse devait être célébrée le lundi 28. Il est mort la
veille.

Son œuvre est considérable par la quantité. Chez lui,
le graveur vaut mieux, ce qui n’est pas beaucoup dire, que
le peintre. Il n’avait pas le don des ensembles et presque
tous ses tableaux sont médiocres.

Le portrait autographe que nous publions donne, avec
les mille détails dont il a tenu à l’entourer, un aperçu assez
général des ordres de sujets auxquels il a touché.

A. Hdstin.

Le Gérant, E. MÉNARD.
 
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