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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 4,1.1901/​1902

DOI Heft:
No.39 (Décembre 1901)
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Klingsor, Tristan: Louis Dejean
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https://doi.org/10.11588/diglit.34268#0140

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L'ART DECORATIF

sufflées au pulvérisateur cette matité qui con-
vient si bien aux statuettes, cette finesse d'émait
qui laisse sensibie ies moindres accents du
modeië, et ii a de pius obtenu des tons gris,
roses ou nacrés, d'une quatitë rare de matière,
comme il en faliait pour rester dans le senti-
ment de ces ravissantes filles-fleurs du sculpteur.
Même il a cherché à les rehausser d'émaux d'or
au moufle, non comme les terres cuites entière-
ment dorées d'Éphèse, mais seulement de quel-
ques notes sur les reliefs des étoffes, ce qui leur
donne un attrait nouveau de richesse et de dis-
crétion tout à la fois. Ainsi André Methey s'est
montré non seulement céramiste habile, mais

encore artiste d'un goût sûr dans l'interprétation
des statuettes exquises du sculpteur. Sèvres
également a voulu acquérir quelques modèles
de Louis Dejean, et traduites de la sorte, ses
figurines, au lieu d'habiter comme leurs sœurs
aînées de Tanagra les tombes silencieuses,
viendront peupler nos demeures, petites femmes
d'étagère ou de vitrine d'un art infiniment pré-
cieux.
Louis Dejean a voulu sculpter aussi le nu.
Il n'est pas seulement ému devant le mystère
du personnage vêtu ; il l'est de même devant la
beauté de la chair dévoilée. Là aussi, il veut
exprimer la floraison merveilleuse du corps
baigné de lumière, mais, ainsi que
dans ses bustes et plus encore que
dans le costume, il a à se défier du
désir de sacrifier la justesse de la mise
en place à l'agrément de la couleur. La
ligne de cette jeune femme couchée est
peut-être trop hésitante malgré le
charme subtil qui s'en dégage, comme
d'autres nus d'une blondeur extrême.
H fait sourire aussi des têtes d'adolesr
cents, car son art est tout sourire; il
saisit le caractère vrai d'une tête de
vieille femme avec la bouche mince et
les yeux plus noirs ; il fait émerger
du marbre, comme semblant sortir à
peine de la terre, une face de faune où
l'intelligence se mêle à la convoitise du
plaisir; il allie la fermeté à la douceur
dans le portrait solide du graveur
Laval, car c'est toujours cette douceur
des ombres qui reste sa qualité domi-
nante, alliée à la poursuite de la vie.
S'il a pris l'art de Tanagra pour guide,
ce n'est pas pour le copier servilement :
il a compris que le véritable moyen
d'imiter les antiques, c'était justement
de regarder la vie. Il l'a fait en mo-
delant ses délicieuses figurines en
robes remuantes; il le fait devant la
troublante beauté du nu. Il n'a pas
laissé obscurcir ses qualités naturelles
de délicatesse par des enseignements
faux ; sa vision très subtile d'artiste a
gardé sa fraîcheur devant la variété des
êtres ; essentiellement sculpteur, il est
surtout épris de la qualité formelle des
choses, et c'est cela, ce désir infini de
traduire par l'argile ou le marbre une
sensation ressentie devant la réalité
séduisante, qui fait naturellement de


LOUiS DHJHAN

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