L'ART DEC O R AT [F
A. RENOIR
LA FERME
Le AfoM/nz Je /a Ga/ette est peint sans
méticulosité, avec de longues touches cares-
santes comme les taches de soleil qui diaprent
les vestons bleus, les robes de jaconas et les
verdures de ce bal tournoyant. Manet garda
toujours une certaine sympathie pour le noir,
dont il fut d'ailleurs un virtuose supérieur :
M. Renoir l'exclut, et le bleu de Prusse suffit
à la base de ses tonalités. Au fond de ce ta-
bleau, les figures d'arrière-plan, mêlées dans
le mouvement de la valse, sont indiquées
tout juste par leur mouvement essentiel, ce-
lui que le spectateur de la scène réelle pour-
rait discerner. Ce ne sont plus des êtres,
mais des attitudes d'êtres, des valeurs, -
c'est-à-dire la réalité, contrairement aux pré-
ceptes de la peinture sage qui entraînent par
exemple M. Détaillé, dans ses tableaux mili-
taires, à dessiner aussi minutieusement ses
personnages lointains que ceux du premier
plan, en sorte qu'ils semblent être aussi au
premier plan, mais comme des enfants au-
près d'adultes, plus petits mais non plus
éloignés. La Jezzzze yz//e J Lz jtrozzzezztzJe est
peinte avec très peu de couleur, presque en
transparence sur une toile fine, avec une al-
lure d'esquisse qui allège son charme ; c'est
moins un être qu'un reflet, avec un ou deux
accents. Enfin, la troisième série des œuvres
de M. Renoir, ou du moins celle qu'arbi-
trairement nous nous sommes permis d'éta-
blir pour déguiser notre embarras critique
devant un si ondoyant peintre, est d'une fac-
ture de nouveau semblable où les deux pre-
mières se retrouvent parfois pour s'unir ou
contraster. Les fleurs se voient tour à tour
traiter selon leur caractère propre; les glaïeuls
s'empâtent magnifiquement, un treillis de pe-
tites touches cruciales définit les grêles Aeurs
des champs. Les têtes de jeunes filles sont
influencées par l'ombre mauve des chapeaux
fleuris à larges bords, peintes sur des toiles
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A. RENOIR
LA FERME
Le AfoM/nz Je /a Ga/ette est peint sans
méticulosité, avec de longues touches cares-
santes comme les taches de soleil qui diaprent
les vestons bleus, les robes de jaconas et les
verdures de ce bal tournoyant. Manet garda
toujours une certaine sympathie pour le noir,
dont il fut d'ailleurs un virtuose supérieur :
M. Renoir l'exclut, et le bleu de Prusse suffit
à la base de ses tonalités. Au fond de ce ta-
bleau, les figures d'arrière-plan, mêlées dans
le mouvement de la valse, sont indiquées
tout juste par leur mouvement essentiel, ce-
lui que le spectateur de la scène réelle pour-
rait discerner. Ce ne sont plus des êtres,
mais des attitudes d'êtres, des valeurs, -
c'est-à-dire la réalité, contrairement aux pré-
ceptes de la peinture sage qui entraînent par
exemple M. Détaillé, dans ses tableaux mili-
taires, à dessiner aussi minutieusement ses
personnages lointains que ceux du premier
plan, en sorte qu'ils semblent être aussi au
premier plan, mais comme des enfants au-
près d'adultes, plus petits mais non plus
éloignés. La Jezzzze yz//e J Lz jtrozzzezztzJe est
peinte avec très peu de couleur, presque en
transparence sur une toile fine, avec une al-
lure d'esquisse qui allège son charme ; c'est
moins un être qu'un reflet, avec un ou deux
accents. Enfin, la troisième série des œuvres
de M. Renoir, ou du moins celle qu'arbi-
trairement nous nous sommes permis d'éta-
blir pour déguiser notre embarras critique
devant un si ondoyant peintre, est d'une fac-
ture de nouveau semblable où les deux pre-
mières se retrouvent parfois pour s'unir ou
contraster. Les fleurs se voient tour à tour
traiter selon leur caractère propre; les glaïeuls
s'empâtent magnifiquement, un treillis de pe-
tites touches cruciales définit les grêles Aeurs
des champs. Les têtes de jeunes filles sont
influencées par l'ombre mauve des chapeaux
fleuris à larges bords, peintes sur des toiles
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