L'ART DECORATIF
de la vasque où coule l'eau crachée par une
tête de lion. Sur une large frise, d'un côté
du hall, des inscriptions historiques vont de
la fondation de la ville à l'inauguration du
Raadhus, le 12 janvier iqo3.
Deux portes à plein cintre, dont l'intra-
dos de l'arc est décoré de faïences émaillées,
donne sur de grands escaliers. Par l'une de
ces portes, que nous reproduisons, se dé-
couvre une charmante arcature double dans
le style roman, arcature ouverte sur l'esca-
lier, et dont les deux arcs très bas sont
portés par une mince colonnette médiane.
Ces belles faïences émaillées, oeuvre de
Koehler, un des maîtres de la merveilleuse
céramique danoise, figurent, au long de ces
portes, des vols stylisés de mouettes ou de
corneilles.
Ces portes sont surmontées de deux
loggias superposées, dont la plus haute a
un balcon, et tout cela, comme on en peut
juger, est d'un dessin très harmonieux, très
pur. Au-dessus de chaque colonne de la gale-
rie, une saillie est sculptée d'une tête, portrait
d'un notable, d'un bourgmestre ou masque de
fantaisie. Les galeries sont en communication
avec les salles du Conseil et de réceptions.
Les bâtiments au sud-ouest du hall,
plus simples de décoration, contiennent les
bureaux principaux. Là, encore un hall
s'élève, mais coupé en plusieurs étages qui,
par des sections rectangulaires de leurs
planchers superposés, prend sa clarté d'en
haut. Des escaliers et un ascenseur roulant,
toujours en marche, l'une des curiosités de
l'Hôtel de Ville, desservent les ditïérents
étages. Cet ascenseur, qui jamais ne s'arrête,
montant et descendant sans relâche, est in-
quiétant, bien que d'une allure modérée. Il
ne peut convenir qu'en ces pays froids, où
les nerfs ont moins d'impatience, plus de
calme que les nôtres. Même à Copenhague,
celui-ci, me dit-on, a causé déjà plusieurs
accidents.
Dans les corridors, dans les escaliers,
des peintures à la chaux présentent une
décoration sobre et délicate, dont les motifs
principaux sont empruntés à l'ornemen-
tation rustique Scandinave, où sont les 3
lignes onduleuses, figurant les 3 Belts, et les
3 tours des armes de la ville.
La place me manque pour décrire les
salles, les bureaux, .le noterai seulement les
beaux lustres électriques de la salie du Con-
seil, en forme de larges couronnes, rappelant
avec leurs longs pendants de petits globes
lumineux, pareils à des pierres précieuses
ou à des perles, les riches couronnes du trésor
gothique de Cluny; et je signalerai aussi
dans le cabinet du bourgmestre une décora-
tion intéressante faite des vues du vieux
Copenhague. Je regrette que notre Hôtel de
Ville ne montre pas, retracés ainsi sur ses
murs, l'histoire du vieux Paris, ses anciens
aspects successifs; ce qui serait plus curieux
peut-être que de vagues tableaux symboliques.
Au delà enfin de la partie centrale de
l'édifice s'étend une cour spacieuse et des
plus pittoresques par l'imprévu de ses lignes,
de ses rencontres de bâtiments, par ses
pignons, par ses tours, ses tourelles, par les
saillants de ces tours et de bow-windows
sur encorbellement, excellemment dessinés et
décorés, par des lucarnes donnant à la toi-
ture comme une silhouette médiévale, par
des zones alternantes là encore de brique
et de pierre.
D'un dessin parfait est ce large bow-
window en encorbellement, surmonté d'une
coupole portant la couronne de la ville, et
sur lui s'arrondissant, ce fronton circulaire.
Là aussi, au-dessous du toit, s'étend une frise
de pierre d'arcatures aveugles où s'ouvrent des
mezzanines. De chaque côté de ces bow-
windows bombant au second étage, très ori-
ginales et toutes Scandinaves, il me semble,
sont ces fenêtres sous des arcatures aveugles
supportées par des colonnes engagées de
briques rouges, et portant un fronton de pierre
triangulaire décoré de deux oiseaux et d'un
arbuste. En un coin rentrant, une large ar-
cade est surmontée d'une loggia et d'un
balcon aux consoles robustes, et cela encore
est d'un beau dessin grave.
Les premiers artistes, les premiers arti-
sans de la ville ont collaboré aux travaux
de ce noble édifice; mais on y sent partout
mm unité de direction, s'imposant aux
moindres détails, une pensée ayant tout
prévu, tout ordonné, choses qui manquent
trop souvent à la création comme à la dé-
coration de beaucoup de nos monuments
publics. On ne voit pas ici l'anarchie, la
confusion artistique, comme en notre Hôtel
de Ville, où tant d'œuvres d'art, si excel-
lentes qu'elles soient, très différentes, tout
opposées même de style et de couleur, rap-
prochées seulement, accordées jamais, ne
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de la vasque où coule l'eau crachée par une
tête de lion. Sur une large frise, d'un côté
du hall, des inscriptions historiques vont de
la fondation de la ville à l'inauguration du
Raadhus, le 12 janvier iqo3.
Deux portes à plein cintre, dont l'intra-
dos de l'arc est décoré de faïences émaillées,
donne sur de grands escaliers. Par l'une de
ces portes, que nous reproduisons, se dé-
couvre une charmante arcature double dans
le style roman, arcature ouverte sur l'esca-
lier, et dont les deux arcs très bas sont
portés par une mince colonnette médiane.
Ces belles faïences émaillées, oeuvre de
Koehler, un des maîtres de la merveilleuse
céramique danoise, figurent, au long de ces
portes, des vols stylisés de mouettes ou de
corneilles.
Ces portes sont surmontées de deux
loggias superposées, dont la plus haute a
un balcon, et tout cela, comme on en peut
juger, est d'un dessin très harmonieux, très
pur. Au-dessus de chaque colonne de la gale-
rie, une saillie est sculptée d'une tête, portrait
d'un notable, d'un bourgmestre ou masque de
fantaisie. Les galeries sont en communication
avec les salles du Conseil et de réceptions.
Les bâtiments au sud-ouest du hall,
plus simples de décoration, contiennent les
bureaux principaux. Là, encore un hall
s'élève, mais coupé en plusieurs étages qui,
par des sections rectangulaires de leurs
planchers superposés, prend sa clarté d'en
haut. Des escaliers et un ascenseur roulant,
toujours en marche, l'une des curiosités de
l'Hôtel de Ville, desservent les ditïérents
étages. Cet ascenseur, qui jamais ne s'arrête,
montant et descendant sans relâche, est in-
quiétant, bien que d'une allure modérée. Il
ne peut convenir qu'en ces pays froids, où
les nerfs ont moins d'impatience, plus de
calme que les nôtres. Même à Copenhague,
celui-ci, me dit-on, a causé déjà plusieurs
accidents.
Dans les corridors, dans les escaliers,
des peintures à la chaux présentent une
décoration sobre et délicate, dont les motifs
principaux sont empruntés à l'ornemen-
tation rustique Scandinave, où sont les 3
lignes onduleuses, figurant les 3 Belts, et les
3 tours des armes de la ville.
La place me manque pour décrire les
salles, les bureaux, .le noterai seulement les
beaux lustres électriques de la salie du Con-
seil, en forme de larges couronnes, rappelant
avec leurs longs pendants de petits globes
lumineux, pareils à des pierres précieuses
ou à des perles, les riches couronnes du trésor
gothique de Cluny; et je signalerai aussi
dans le cabinet du bourgmestre une décora-
tion intéressante faite des vues du vieux
Copenhague. Je regrette que notre Hôtel de
Ville ne montre pas, retracés ainsi sur ses
murs, l'histoire du vieux Paris, ses anciens
aspects successifs; ce qui serait plus curieux
peut-être que de vagues tableaux symboliques.
Au delà enfin de la partie centrale de
l'édifice s'étend une cour spacieuse et des
plus pittoresques par l'imprévu de ses lignes,
de ses rencontres de bâtiments, par ses
pignons, par ses tours, ses tourelles, par les
saillants de ces tours et de bow-windows
sur encorbellement, excellemment dessinés et
décorés, par des lucarnes donnant à la toi-
ture comme une silhouette médiévale, par
des zones alternantes là encore de brique
et de pierre.
D'un dessin parfait est ce large bow-
window en encorbellement, surmonté d'une
coupole portant la couronne de la ville, et
sur lui s'arrondissant, ce fronton circulaire.
Là aussi, au-dessous du toit, s'étend une frise
de pierre d'arcatures aveugles où s'ouvrent des
mezzanines. De chaque côté de ces bow-
windows bombant au second étage, très ori-
ginales et toutes Scandinaves, il me semble,
sont ces fenêtres sous des arcatures aveugles
supportées par des colonnes engagées de
briques rouges, et portant un fronton de pierre
triangulaire décoré de deux oiseaux et d'un
arbuste. En un coin rentrant, une large ar-
cade est surmontée d'une loggia et d'un
balcon aux consoles robustes, et cela encore
est d'un beau dessin grave.
Les premiers artistes, les premiers arti-
sans de la ville ont collaboré aux travaux
de ce noble édifice; mais on y sent partout
mm unité de direction, s'imposant aux
moindres détails, une pensée ayant tout
prévu, tout ordonné, choses qui manquent
trop souvent à la création comme à la dé-
coration de beaucoup de nos monuments
publics. On ne voit pas ici l'anarchie, la
confusion artistique, comme en notre Hôtel
de Ville, où tant d'œuvres d'art, si excel-
lentes qu'elles soient, très différentes, tout
opposées même de style et de couleur, rap-
prochées seulement, accordées jamais, ne
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