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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 6,1.1904

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Leblond, Marius-Ary: Les jouets et la peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.36674#0028

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L'ART DECORATIF

lage de jouets aussi éclatants qu'une cor-
beille de fruits, il est agréable et nécessaire
de méditer sur la nature des jouets: ils sont
les premiers tableaux aux couleurs solides
et rebondies, les premières statues aux formes
fixes habillées de nuances qu'interrogent les
yeux des enfants, pressés de comprendre,

de causer et d'aimer. Ils forment la première
religion des tendres générations humaines
qui adorent passagèrement en eux ce que
les ancêtres adorèrent durant des siècles
sous la forme d'idoles et de fétiches.
La grande révélation de l'art japonais,
qui peignait avec exactitude l'humanité
extrême-orientale quand l'on croyait à des

groupements fantaisistes et presque conven-
tionnels de poupées humaines, contribua
aussi à retenir nos peintres à l'école naïve
du jouet. Les danseuses de Degas, au teint
fardé de rose, aux expressions immobilisées
et rosoyantes, aux petites poitrines de bois,
aux tutus de gaze pailletée, ont une finesse,
cependant fruste, de pou-
pées imposée, croirait-on,
à l'auteur par la psycho-
logie de leur métier qui
est d'amuser un public
d'adultes par des évolu-
tions de marionnettes
aériennes. La grâce des
visages de Renoir, qui
vient du gonflement des
joues en corolles, des
yeux fixes grand'ouverts
sous des fronts étroits
ombragés de cheveux, est,
à l'examen, celle même
des poupées aux visages
incroyablement insufflés
de rose, aux teints de
porcelaine, aux corps de
biscuit élégants dans le
développement d'une taille
sans corsets, aux mouve-
ments rares et peu variés.
De telle sorte que l'homme,
même devant les femmes
ou les fillettes de Renoir,
se retrouve comme devant
les poupées de l'enfance,
fraîches comme des roses,
les longs cils en attente;
et il lui revient la grande
envie de âercer. Paul Gau-
guin, qui ht reconnaître
une nouvelle beauté sculp-
turale du corps humain,
l'avait apprise d'abord aux
formes des idoles poly-
nésiennes, en qui s'éternisa, à travers des
postérités indolentes et oublieuses, une race
jeune aux flancs droits, aux torses amples,
au buste long, à la nuque dense. Et, à ce
propos, ne peut-on se demander si les idoles
ne furent point conçues selon un type de
beauté pure^ inaltérable, que la tradition légua
religieusement aux générations pour que, for-
cées de les contempler par la prière, elles
fussent induites à conserver la vision du type


P. GAUGUtN Eén'c/ZM

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