L'ART DECORATIF
allez donc exiger de lui quelque complai-
sance !
Ici, la photographie, cette secourable
auxiliaire de tant d'artistes médiocres, n'est
de nul secours. Elle donne la silhouette ;
grâce à elle, aussi, on sait mieux comment
court un cheval. Mais, le mérite d'une sta-
tuette de cheval, de cerf, ne réside pas uni-
quement dans le placement des sabots. Il y
a les attaches, les muscles, masqués par le
pelage. Pour deviner la charpente intérieure
et les modifi-
cations que su-
bit cette char-
pente lorsque
la bête est en
mouvement,
l'artistenepeut
compter que
sur lui-même.
Chaque modi-
fication d'atti-
tude est un
documentqu'il
faut fixer. Et
ce n'est qu'a-
prèsmilleétu-
des de mou-
vement que se
révèle l'attitude juste, celle que l'on sentait
essentielle dès le premier jour. L'artiste doit
donc consacrer beaucoup de temps en obser-
vations, en études. La réalisation n'est qu'à
ce prix. On comprend que tant de gens re-
culent devant un art hérissé de difficultés et
se vengent de leur impuissance en souriant
devant les confrères mieux doués et plus
tenaces.
Ce préambule n'est point un inutile
hors-d'œuvre. Il légitimera mieux notre
sympathie pour l'effort de M. Pierre Chris-
tophe et notre estime pour ses productions
que des éloges distribués en détail à propos
des œuvres qui vont être signalées.
M. Pierre Christophe est un véritable
jeune : né en 1880, il a donc vingt-quatre
ans. Mais, depuis fort longtemps déjà, il
dessine et modèle. Toujours ses préférences
ont été à l'animal. Ses premiers essais ont
été montrés à Gardet qui l'a encouragé et
le conseille encore. M. Pierre Christophe
est également un assidu des cours professés
par Frémiet au Muséum. Le grand sculp-
teur fait d'abord dessiner d'après ses mo-
dèles. Puis, lorsque les élèves sont rompus
à cet exercice et sont suffisamment rensei-
gnés sur la forme extérieure et la charpente
intérieure des pensionnaires de la Ménagerie,
Frémiet les mène devant l'animal vivant.
En quelques traits significatifs, Frémiet trace
une silhouette, corrige une ébauche, donne
à l'essai de l'élève cette allure décidée,
vivante, qui caractérise ses œuvres à lui.
Barye, qui l'avait précédé dans les fonctions
de professeur au Muséum, était, de l'aveu
Encrier
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allez donc exiger de lui quelque complai-
sance !
Ici, la photographie, cette secourable
auxiliaire de tant d'artistes médiocres, n'est
de nul secours. Elle donne la silhouette ;
grâce à elle, aussi, on sait mieux comment
court un cheval. Mais, le mérite d'une sta-
tuette de cheval, de cerf, ne réside pas uni-
quement dans le placement des sabots. Il y
a les attaches, les muscles, masqués par le
pelage. Pour deviner la charpente intérieure
et les modifi-
cations que su-
bit cette char-
pente lorsque
la bête est en
mouvement,
l'artistenepeut
compter que
sur lui-même.
Chaque modi-
fication d'atti-
tude est un
documentqu'il
faut fixer. Et
ce n'est qu'a-
prèsmilleétu-
des de mou-
vement que se
révèle l'attitude juste, celle que l'on sentait
essentielle dès le premier jour. L'artiste doit
donc consacrer beaucoup de temps en obser-
vations, en études. La réalisation n'est qu'à
ce prix. On comprend que tant de gens re-
culent devant un art hérissé de difficultés et
se vengent de leur impuissance en souriant
devant les confrères mieux doués et plus
tenaces.
Ce préambule n'est point un inutile
hors-d'œuvre. Il légitimera mieux notre
sympathie pour l'effort de M. Pierre Chris-
tophe et notre estime pour ses productions
que des éloges distribués en détail à propos
des œuvres qui vont être signalées.
M. Pierre Christophe est un véritable
jeune : né en 1880, il a donc vingt-quatre
ans. Mais, depuis fort longtemps déjà, il
dessine et modèle. Toujours ses préférences
ont été à l'animal. Ses premiers essais ont
été montrés à Gardet qui l'a encouragé et
le conseille encore. M. Pierre Christophe
est également un assidu des cours professés
par Frémiet au Muséum. Le grand sculp-
teur fait d'abord dessiner d'après ses mo-
dèles. Puis, lorsque les élèves sont rompus
à cet exercice et sont suffisamment rensei-
gnés sur la forme extérieure et la charpente
intérieure des pensionnaires de la Ménagerie,
Frémiet les mène devant l'animal vivant.
En quelques traits significatifs, Frémiet trace
une silhouette, corrige une ébauche, donne
à l'essai de l'élève cette allure décidée,
vivante, qui caractérise ses œuvres à lui.
Barye, qui l'avait précédé dans les fonctions
de professeur au Muséum, était, de l'aveu
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