L'ART DÉCORATIF
nécessaires à la vie moderne, qui tend de
plus en plus vers la démocratie, et où de
plus en plus domineront et les besoins du
/mme, et d'autres besoins très larges, ceux
des foules.
La formule du /?om<?, surtout du /?o?7?e
très simple et à bon marché, la formule
applicable à toute maison, somptueuse ou
modeste, et les formules de vastes construc-
tions destinées aux foules qui voyagent,
travaillent, commercent, étudient, se soi-
gnent, se distraient ou rêvent, que de créa-
tions neuves, sans qu'elles cessent cependant
de se rattacher à la tradition, nous avons à
attendre de l'architecture nouvelle.
Pour la foule qui voyage il y a donc
ces deux nouveautés, la gare et Lhôtel, le
grand hôtel, le Pu/uce l'hôtel tendant
à devenir l'un des palais de cette foule, qui
chaque jour davantage a la prétention, ayant
dépossédé les aristocrates et certaines des
monarchies d'autrefois, d'être partout et tou-
jours traitée en souveraine, ce que j'accepte,
surtout si elle en devient digne.
Parmi les artistes du Danemark, de ce
petit pays où s'épanouit en ce moment, je
l'ai montré, une si curieuse et si belle
floraison d'art, d'art simple, sobre, très
personnel, deux architectes, M. Wenck et
M. Vischer, ont construit des gares et un
hôtel, et tels qu'il convient de les construire
aujourd'hui, donnant aux gares et à l'hôtel
toute leur valeur artistique, toute leur déco-
ration nécessaire.
M. Wenck, bien qu'il n'habite pas un
pays démocratique et que les Compagnies
de chemins de fer n'y soient pas riches,
comme les nôtres, a compris qu'il convenait
de donner à une simple petite gare de cam-
pagne autant d'attention qu'à une grande
dans les villes où les monuments abondent;
et puisque dans des villes on se propose jus-
tement, mais sans y réussir toujours, de
faire de toute gare de chemin de fer une
œuvre d'art, M. Wenck a pensé qu'il n'était
pas moins nécessaire, sinon plus, de faire
une œuvre d'art aussi de la plus petite gare
de campagne. Ne doit-on pas commencer
l'éducation esthétique de la démocratie? On
en parle toujours en attendant que l'on v
pense un peu. Ne doit-on pas songer à la
décentralisation artistique dont on ne parle
pas, et à laquelle, il semble, on pourrait pen-
ser davantage?
Et M. Wenck a construit sur la ligne
de Copenhague à Elseneur, dans de très
petites villes ou petits villages, ses gares
d'une architecture élégante, simple, sérieuse
et dont le décor intérieur, charmant aussi
et très sobre, répond harmonieusement au
décor extérieur. Chacune de ses gares diffère
de l'autre. Pourquoi, en effet, comme en
France, seraient-elles les mêmes, attristant,
ennuyant le regard tout le long d'une ligne
par la répétition sans fin d'une laideur uni-
forme? On eût évité cet inconvénient si, ce
qui eût été logique (mais la logique est loin
de diriger les actions des hommes, et surtout
les nôtres), on eût réclamé pour ces petites
gares, des architectes de chacune des pro-
vinces desservies par la ligne, une architec-
ture un peu conforme aux conditions et aux
traditions régionales. Comme à l'ordinaire
Paris sans doute a tout régi, tout ordonné ;
et ainsi que nos grands magasins d'habille-
ments, les Administrations centrales ont fait
tailler un certain nombre de vêtements, je
veux dire de constructions ou façons, les
mêmes pour le Provençal que pour le Bre-
ton, pour le Béarnais que pour le Normand.
Des compliments, en passant, à la Com-
pagnie de l'Ouest, qui me semble avoir au-
jourd'hui le souci que d'autres n'ont pas de
décorer ses petites gares. Et en passant en-
core, je signalerai en Belgique la belle gare
de Fumes, de charmantes gares çà et là en
Allemagne et en Suède.
Ainsi, chacune des gares de la ligne de
Copenhague à Elseneur diffère de sa voisine;
ce n'est pas la même, la gare d'un modèle
unique, répétée tout au long de la ligne.
M. Wenck, leur architecte, me disait :
« Autour des gares se groupent des mai-
sons, trop souvent sans élégance, modestes
ou pauvres, étant plus ou moins loin de la
ville ; il importe donc que la gare donne la
première l'exemple d'un peu d'élégance, d'un
peu d'art et d'une tenue parfaite. Puis, n'est-ce
pas la gare que voit d'une ville d'abord le
voyageur qui passe ou s'arrête? Et le pre-
mier monument qui s'offre à lui doit donc
être autre chose qu'une bâtisse banale et laide.
Les reproductions que nous donnons
montrent le charme de son œuvre. La gare
terminus d'Elseneur a plus d'importance ;
en briques, comme la plupart des monuments
du pays, elle est d'un aspect monumental,
mais simple et grave, digne de la petite ville,
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nécessaires à la vie moderne, qui tend de
plus en plus vers la démocratie, et où de
plus en plus domineront et les besoins du
/mme, et d'autres besoins très larges, ceux
des foules.
La formule du /?om<?, surtout du /?o?7?e
très simple et à bon marché, la formule
applicable à toute maison, somptueuse ou
modeste, et les formules de vastes construc-
tions destinées aux foules qui voyagent,
travaillent, commercent, étudient, se soi-
gnent, se distraient ou rêvent, que de créa-
tions neuves, sans qu'elles cessent cependant
de se rattacher à la tradition, nous avons à
attendre de l'architecture nouvelle.
Pour la foule qui voyage il y a donc
ces deux nouveautés, la gare et Lhôtel, le
grand hôtel, le Pu/uce l'hôtel tendant
à devenir l'un des palais de cette foule, qui
chaque jour davantage a la prétention, ayant
dépossédé les aristocrates et certaines des
monarchies d'autrefois, d'être partout et tou-
jours traitée en souveraine, ce que j'accepte,
surtout si elle en devient digne.
Parmi les artistes du Danemark, de ce
petit pays où s'épanouit en ce moment, je
l'ai montré, une si curieuse et si belle
floraison d'art, d'art simple, sobre, très
personnel, deux architectes, M. Wenck et
M. Vischer, ont construit des gares et un
hôtel, et tels qu'il convient de les construire
aujourd'hui, donnant aux gares et à l'hôtel
toute leur valeur artistique, toute leur déco-
ration nécessaire.
M. Wenck, bien qu'il n'habite pas un
pays démocratique et que les Compagnies
de chemins de fer n'y soient pas riches,
comme les nôtres, a compris qu'il convenait
de donner à une simple petite gare de cam-
pagne autant d'attention qu'à une grande
dans les villes où les monuments abondent;
et puisque dans des villes on se propose jus-
tement, mais sans y réussir toujours, de
faire de toute gare de chemin de fer une
œuvre d'art, M. Wenck a pensé qu'il n'était
pas moins nécessaire, sinon plus, de faire
une œuvre d'art aussi de la plus petite gare
de campagne. Ne doit-on pas commencer
l'éducation esthétique de la démocratie? On
en parle toujours en attendant que l'on v
pense un peu. Ne doit-on pas songer à la
décentralisation artistique dont on ne parle
pas, et à laquelle, il semble, on pourrait pen-
ser davantage?
Et M. Wenck a construit sur la ligne
de Copenhague à Elseneur, dans de très
petites villes ou petits villages, ses gares
d'une architecture élégante, simple, sérieuse
et dont le décor intérieur, charmant aussi
et très sobre, répond harmonieusement au
décor extérieur. Chacune de ses gares diffère
de l'autre. Pourquoi, en effet, comme en
France, seraient-elles les mêmes, attristant,
ennuyant le regard tout le long d'une ligne
par la répétition sans fin d'une laideur uni-
forme? On eût évité cet inconvénient si, ce
qui eût été logique (mais la logique est loin
de diriger les actions des hommes, et surtout
les nôtres), on eût réclamé pour ces petites
gares, des architectes de chacune des pro-
vinces desservies par la ligne, une architec-
ture un peu conforme aux conditions et aux
traditions régionales. Comme à l'ordinaire
Paris sans doute a tout régi, tout ordonné ;
et ainsi que nos grands magasins d'habille-
ments, les Administrations centrales ont fait
tailler un certain nombre de vêtements, je
veux dire de constructions ou façons, les
mêmes pour le Provençal que pour le Bre-
ton, pour le Béarnais que pour le Normand.
Des compliments, en passant, à la Com-
pagnie de l'Ouest, qui me semble avoir au-
jourd'hui le souci que d'autres n'ont pas de
décorer ses petites gares. Et en passant en-
core, je signalerai en Belgique la belle gare
de Fumes, de charmantes gares çà et là en
Allemagne et en Suède.
Ainsi, chacune des gares de la ligne de
Copenhague à Elseneur diffère de sa voisine;
ce n'est pas la même, la gare d'un modèle
unique, répétée tout au long de la ligne.
M. Wenck, leur architecte, me disait :
« Autour des gares se groupent des mai-
sons, trop souvent sans élégance, modestes
ou pauvres, étant plus ou moins loin de la
ville ; il importe donc que la gare donne la
première l'exemple d'un peu d'élégance, d'un
peu d'art et d'une tenue parfaite. Puis, n'est-ce
pas la gare que voit d'une ville d'abord le
voyageur qui passe ou s'arrête? Et le pre-
mier monument qui s'offre à lui doit donc
être autre chose qu'une bâtisse banale et laide.
Les reproductions que nous donnons
montrent le charme de son œuvre. La gare
terminus d'Elseneur a plus d'importance ;
en briques, comme la plupart des monuments
du pays, elle est d'un aspect monumental,
mais simple et grave, digne de la petite ville,
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