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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 6,2.1904

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Mauclair, Camille: Notes sur James Whistler
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https://doi.org/10.11588/diglit.36675#0110

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FART DÉCORATIF

pour rendre ces titres de réalité seconde. Si
Whistler eût prétendu suggérer de la mu-
sique, il eût écrit (avec une prétention ab-
surde d'ailleurs) : AocLmzze 67? y? ^67??o/,
Cfu7*77?077?6 67? /û cf?6{6. H ne désirait qu'une
analogie, et non une transcription qui eût
fait de ses tableaux des couvertures de mu-

sique possible. Son principe de coloris étant,
non comme Monet de juxtaposer des tons
entiers, mais de se jouer des harmoniques
successives d'un même ton ', il usait donc
de cette terminologie avec le tact et la jus-
tesse d'esprit qu'il eut toujours à un degré
admirable, et il nous semble presque incon-
cevable aujourd'hui que cette analogie avec
i J'ai déjà parlé de ce point délicat dans une
précédente étude sur M. Le Sidaner, qui tient
de Whistler par là plus que des impressionnistes
malgré l'apparence de sa facture, et j'ai dit un
mot de l'art analogue de M. Debussy, qui a en
musique tous les caractères esthétiques de
Whistler.

la musique ait tant révolté des Anglais qui
ne voyaient aucun inconvénient à introduire
la poésie dans la peinture au point de trans-
former celle-ci en illustrations peintes.
L'étude des identités entre matériaux
d'art (sons, tons chromatiques, harmonies
syllabiques, valeurs), cette étude qui sera la
base de la critique le jour où celle-ci,
sortie de l'ornière du reportage d'art,
redeviendra une science créatrice,
Whistler donne l'exemple de la mesure
où l'artiste peut s'en servir. C'est cette
disposition de sa sensibilité qui en a
fait un précurseur de l'art moderne,
l'a rapproché de Verlaine et de Mal-
larmé, et lui a préparé ici un public
de symbolistes tout prêts à l'acclamer
et le comprendre. La première phase
de la sympathie française pour Whistler
est due à sa camaraderie avec Courbet
et Fantin-Latour, à sa communion
d'idées avec des peintres qui s'élevaient
contre le sujet littéraire et aimaient
d'abord la matière et le coloris : la
seconde phase de cette sympathie est
due à l'extrême amour de la nuance,
à la progression musicienne des tona-
lités, qui furent à Whistler les moyens
d'exprimer la réalité seconde. Au lieu
de chercher le symbole par construc-
tion préalable de son esprit, par méta-
physique surajoutée au métier de
peintre, il l'atteignait par l'étude elle-
même de la vie intérieure des choses,
par réalisme poussé jusqu'à l'état
contemplatif*. Observez que c'est abso-
lument de cette façon qu'Edgar Poe,
dont il semble le commentateur plasti-
que, nous conduit par degrés, avec
une telle science de composition que nous ne
pouvons nous en apercevoir, de l'envisage-
ment d'un fait ordinaire aux régions sous-
jacentes dont ce fait est l'affleurement exté-
rieur. Toute figure ou tout site n'est pour
Whistler comme pour Poe qu'un prétexte à
faire émerger, à rendre visibles certaines
lois qui s'y recèlent et que cette figure ou
2 En quoi, outre un commun amour de l'en-
veloppe, il se rapproche beaucoup de notre
Eugène Carrière, surtout dans les dernières
œuvres que Whistler ait montrées, notamment,
à l'Exposition de iqoo, son prodigieux portrait
de lui-même.


Le peh? LmiaLex f/LAogrujWe)

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