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Première année. — N° 9

LE NUMERO : 15 CENTIMES

26 Juin 1887

L'ART FRANÇAI

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Texte par Firmin Javel

Illustrations de MM. SILVESTRE & C‘% par leur procédé de Glvptographie

Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris

ABONNEMENTS. — Paris : un an, 9 fr. ; six mois, 5 francs.

Départements : un an, ÎO fr., six mois, 6 francs.

SALON DE 1887

(Huitième article)

Il n’est décidément pas impossible de classer nos paysagistes
modernes, comme nous
en avions exprimé l’in-
tention, en deux groupes
distincts : les méditants
et les consciencieux. Il
est évident que M. Jan-
Monchablon, un tout
jeune homme, paraît-il,
entend s’enrôler dans le
second de ces groupes,
puisqu’il ne nous fait
grâce d’aucun détail dans
ses deux ouvrages ; les
Regains et les Champs.

C’est grand dommage de
voir ainsi le talent se
fourvoyer, et ceux de nos
confrères qui ont contri-
bué, par leurs imprudents
éloges, au succès très
vif de cet artiste en herbes,
se préparent pour l’avenir
les remords les plus cui-
sants. Ce sont eux, pro-
bablement, qui ont accla-
mé les premiers travaux
de M. Victor Binet, un
autre photographe cham-
pêtre. Je les renvoie aux
deux toiles qu’expose ce
dernier, une Après-Midi
de Septembre et la Bièvre
près xArcueil, où il n’y a
plus rien, mais rien du
tout. Nous verrons ce
que fera M. Jan-Moncha-
blon, l’an prochain, s’il
persiste dans sa « manière
devoir... »

Dans la classification

dont nous parlons, M. Heilbuth ne saurait être rangé que parmi
les méditants. Ce peintre des élégantes parisiennes est un paysa-
giste très personnel. Danssesaquarelles, comme dans ses tableaux,
il excelle à encadrer ses charmantes figures dans des sous bois
ensoleillés; il sait l’art de faire glisser une yole légère sur une

PRIX DU SALON

R.-G. VERLET.

La

rivière transparente, et il note fidèlement les lueurs mouvantes,
miroitantes, si fugitives, des eaux profondes obscurcies par des
retombées de feuillages. Il procède par masses, il voit large et
grand, mais il s’attache surtout aux exquisités naturelles. Les

splendeurs de l’orage, le
courroux céleste, la tem-
pête ne lui disent rien qui
vaille. Ses goûts sont plus
calmes, et il se plaît à
rendre la sérénité des élé-
ments, l’onde endormie
reflétant un ciel pur, l’im-
mobilité des rameaux épa-
nouis souriant aux cares-
ses crépusculaires.

Dans ces cadres tou-
jours séduisants, M. Heil-
buth aime à placer de
jeunes femmes aux toi-
lettes exquises, des patri-
ciennes qui ont déserté le
faubourg Saint-Germain
pour venir respirer l’air
des champs, toutes rayon-
nantes encore de l’indes-
criptible éclat de la vie
heureuse. Le peintre d’une
Journée d’été est un opti-
miste. Il croit au bonheur
possible et il a raison,
puisqu’il ne voit que des
gens heureux de vivre...
Et, cependant, avec quelle
discrétion ne traite-t-il
pas ce côté de son sujet?

Cette jeune femme,
assise sur un banc rusti-
que, près d’un homme
étendu à ses pieds et dont
elle est séparée par un
caniche, ami dévoué et
fidèle, celui-là !, — voyez
Douleur d’Orphée. quelle expression d’indif-

férence il lui a donnée,
ainsi qu’au gentlemen qui l’accompagne. Il lui eût été possible,
facile même, de peindre sur leur visage l’impertinent sourire des
« satisfaits ». Mais M. Heilbuth a préféré nous montrer des gens
qui pensent.

Peut-être ces « riches » se remémorent-ils la parabole de
 
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