Cinquième année. — N° 219.
LE NUMÉRO : 25 CENTIMES
SAMEDI 4 JUILLET 1891
L'ART FRANÇAIS
Revue Artistique Hebdomadaire
Directeur littéraire: Directeurs artistiques:
FIRMIN JAVEL
Bureaux : 91 , rue Oberkampf, à Paris
SILVESTRE & Cie
ABONNEMENTS. — Pauis N Départements : un an, 12 francs; six mois, 7 francs. — Union Postale:
un an, 15 francs; six mois, 8 francs
SALON DU CHAMP-DE-MARS
Dans le nombre relativement restreint des ouvrages
de sculpture exposés au Champ-de-Mars, ceux de
M. Jean Hugues se distinguent par un sentiment et un
charme pénétrants : une ‘Romaine du Borgo, buste,
marbre; un Tireur, statuette, bronze; Jean-Louis, sta-
tuette, bronze; %ieuse, buste, bronze; Buste de
'M. Ernest Reyer, terre cuite; Femme jouant avec son-
enfant, groupe, marbre ; Y Immortalité, statue, bronze,
et enfin cette statuette de plâtre que le jeune maître a
intitulée Indolence, alors que le mot « grâce » eût tout
aussi bien caractérisé la ravissante figure, — tels sont
les envois de M. Hugues.
Cette Indolence est, à notre avis, parmi les oeuvres
sensationnelles du Salon National. Elle exprime réelle-
ment la séduction indescriptible d’une belle jeune
femme qui s’abandonne à une lassitude naissante, qui
cède à un caprice de doux far ni ente. Elle est modelée
avec un goût qui exclut tout effort laborieux. Aucun
détail, aucun accident n’arrête le regard qui, du pre-
mier coup, enveloppe l’oeuvre toute entière. C’est une
apparition, c’est une belle figure, radieuse de poésie et
de jeunesse, que le statuaire a évoquée et que nous
aurons grande joie à retrouver, Tan prochain, lorsque
ce plâtre fragile aura été transformé en un marbre
durable.
SALON DES CHAMPS-ELYSÉES
M. Berne-Bellecour est l’un de nos premiers pein-
tres militaires, et, quelque soit son œuve déjà considé-
rable, il n’a, je crois, jamais rien donné de plus ner-
veux et à la fois de plus concis que son tableau de
cette année.
Aux Armes ! Cet appel a fait surgir de partout les
petits soldats endiablés, qui accourent, le fusil au poing,
les yeux pleins de lueurs, dans une hâte qui n’est pas le
désordre. On devine, au contraire, un profond respect
de la discipline, une entière soumission aux ordres des
chefs. Tout à l’heure, les balles vont faire entendre
leur sifflement lugubre, et, de ces braves petits sol-
dats, plus d’un tombera pour ne plus sc relever.
Tout cela est nettement retracé, avec quelque chose
d’ému qui vous persuade et vous lait regretter de
n’avoir pas, vous aussi, la giberne à la ceinture, et le
fusil au poing !
Combien différent est l’idéal de M. Truphème ? La
Main chaude continue la série ininterrompue de ces
aimables scènes enfantines qui complètent, pour ainsi
dire, l’œuvre de M. Geoffroy. Chacun de ces deux
artistes a son tempérament distinct. M. Geoffroy s’in-
téresse peut-être plus aux misères des petits, et
M. Truphème à leurs joies.
SALON DE 1891 (Champ-de-Mart)
J. Hugues. — Indolence
LE NUMÉRO : 25 CENTIMES
SAMEDI 4 JUILLET 1891
L'ART FRANÇAIS
Revue Artistique Hebdomadaire
Directeur littéraire: Directeurs artistiques:
FIRMIN JAVEL
Bureaux : 91 , rue Oberkampf, à Paris
SILVESTRE & Cie
ABONNEMENTS. — Pauis N Départements : un an, 12 francs; six mois, 7 francs. — Union Postale:
un an, 15 francs; six mois, 8 francs
SALON DU CHAMP-DE-MARS
Dans le nombre relativement restreint des ouvrages
de sculpture exposés au Champ-de-Mars, ceux de
M. Jean Hugues se distinguent par un sentiment et un
charme pénétrants : une ‘Romaine du Borgo, buste,
marbre; un Tireur, statuette, bronze; Jean-Louis, sta-
tuette, bronze; %ieuse, buste, bronze; Buste de
'M. Ernest Reyer, terre cuite; Femme jouant avec son-
enfant, groupe, marbre ; Y Immortalité, statue, bronze,
et enfin cette statuette de plâtre que le jeune maître a
intitulée Indolence, alors que le mot « grâce » eût tout
aussi bien caractérisé la ravissante figure, — tels sont
les envois de M. Hugues.
Cette Indolence est, à notre avis, parmi les oeuvres
sensationnelles du Salon National. Elle exprime réelle-
ment la séduction indescriptible d’une belle jeune
femme qui s’abandonne à une lassitude naissante, qui
cède à un caprice de doux far ni ente. Elle est modelée
avec un goût qui exclut tout effort laborieux. Aucun
détail, aucun accident n’arrête le regard qui, du pre-
mier coup, enveloppe l’oeuvre toute entière. C’est une
apparition, c’est une belle figure, radieuse de poésie et
de jeunesse, que le statuaire a évoquée et que nous
aurons grande joie à retrouver, Tan prochain, lorsque
ce plâtre fragile aura été transformé en un marbre
durable.
SALON DES CHAMPS-ELYSÉES
M. Berne-Bellecour est l’un de nos premiers pein-
tres militaires, et, quelque soit son œuve déjà considé-
rable, il n’a, je crois, jamais rien donné de plus ner-
veux et à la fois de plus concis que son tableau de
cette année.
Aux Armes ! Cet appel a fait surgir de partout les
petits soldats endiablés, qui accourent, le fusil au poing,
les yeux pleins de lueurs, dans une hâte qui n’est pas le
désordre. On devine, au contraire, un profond respect
de la discipline, une entière soumission aux ordres des
chefs. Tout à l’heure, les balles vont faire entendre
leur sifflement lugubre, et, de ces braves petits sol-
dats, plus d’un tombera pour ne plus sc relever.
Tout cela est nettement retracé, avec quelque chose
d’ému qui vous persuade et vous lait regretter de
n’avoir pas, vous aussi, la giberne à la ceinture, et le
fusil au poing !
Combien différent est l’idéal de M. Truphème ? La
Main chaude continue la série ininterrompue de ces
aimables scènes enfantines qui complètent, pour ainsi
dire, l’œuvre de M. Geoffroy. Chacun de ces deux
artistes a son tempérament distinct. M. Geoffroy s’in-
téresse peut-être plus aux misères des petits, et
M. Truphème à leurs joies.
SALON DE 1891 (Champ-de-Mart)
J. Hugues. — Indolence