Cinquième année. — N° 223.
LE NUMÉRO : 25 CENTIMES
SAMEDI 1er AOUT 1891
L’ART FRANÇAIS
Revue Artistique Hebdomadaire
Directeur littéraire : __ Directeurs artistiques :
FIRMIN JAVEL
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
SILVESTRE & O
ABONNEMENTS. — Paris & Départements : un an, 12 francs; six mois,'7 francs. — Union Postale : un an, 15 francs; six mois, 8 francs
NOS ILLUSTRATIONS
Dominique, le petit musicien, par M1Ie Jeanne Ravier,
est une intéressante étude de pifFeraro. Dans la physio-
nomie de ce petit Italien, on devine comme un regret
de la patrie absente, et il nous faudrait un scepticisme
cruel pour ne nous point attendrir devant cette tou-
chante misère.
Mlle Jeanne Ravier ne s’était fait connaître, jusqu’ici,
que par des portraits au pastel. Du moins nous n’avions
pas encore vu de « tableau » signé de cette artiste. Si,
réellement, Dominique le petit musicien est un début,
on doit convenir que l’œuvre ne manque ni de simpli-
cité, ni d’émotion.
Soir d’été, tel est le titre de la composition, très
simple aussi, et d’une poésie pénétrante, que M. Emile
Adan exposait au Salon en même temps qu’une autre
page remarquable : les Derniers rayons. Comme tou-
jours, M. Adan a traduit un « effet » dans ce récit d’un
Soir d'été. Il s’est fait l’interprète de la grande accalmie
vespérale. Il a exprimé le silence, la paix infinie des
solitudes agrestes et jusqu’au léger bruissement des
feuillages, dont les belles masses forment tout le fond
de cette scène. Quant aux figures qui l’animent, le
jeune maître leur a donné un caractère et des attitudes
si vraisemblables, qu’elles font réellement partie du
tableau. Sans elles, ce ne serait pas la solitude, ce serait
le vide. f. j.
Portrait de S. Em. le Cardinal Foulon, par M. Duez.
Jamais peut-être M. Duez n’avait réuni à la fois un
aussi grand nombre d’œuvres intéressantes qu’au Salon
de cette année au Champ-de-Mars. C’est une consé-
cration nouvelle à une renommée déjà ancienne
et justement méritée.
Peu d’artistes ont su, comme lui, aborder des genres
très divers et y réussir avec autant de maîtrise.
A vrai dire, il n’est point ici question de genres, car
le peintre, sans s’attarder à nous montrer des scènes
intimes ou sévères et à brosser de simples portraits,
s’applique avant tout à y enfermer une idée. Il cherche
au-delà des gens et des choses l’âme des uns et des
autres et s’ingénie à la faire transparaître, sans la
sacrifier jamais au cadre.
Presque tout serait à citer dans l’œuvre de M. Duez.
Qui ne connaît son grand tryptique du Luxem-
bourg et n’a admiré la simplicité naïve comme la
mélancolique grandeur de la Légende qu’il y a retracée?
Plus récemment, en 1890, il se laissait voir sous
un'autre jour en peignant des sujets plus familiers, entre
autres, le Café sur la terrasse, que Y,Art Français a repro-
duit. Toujours c’était la même facture large et la
même vérité dans le détail, mais le plein air reprenait
LE NUMÉRO : 25 CENTIMES
SAMEDI 1er AOUT 1891
L’ART FRANÇAIS
Revue Artistique Hebdomadaire
Directeur littéraire : __ Directeurs artistiques :
FIRMIN JAVEL
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
SILVESTRE & O
ABONNEMENTS. — Paris & Départements : un an, 12 francs; six mois,'7 francs. — Union Postale : un an, 15 francs; six mois, 8 francs
NOS ILLUSTRATIONS
Dominique, le petit musicien, par M1Ie Jeanne Ravier,
est une intéressante étude de pifFeraro. Dans la physio-
nomie de ce petit Italien, on devine comme un regret
de la patrie absente, et il nous faudrait un scepticisme
cruel pour ne nous point attendrir devant cette tou-
chante misère.
Mlle Jeanne Ravier ne s’était fait connaître, jusqu’ici,
que par des portraits au pastel. Du moins nous n’avions
pas encore vu de « tableau » signé de cette artiste. Si,
réellement, Dominique le petit musicien est un début,
on doit convenir que l’œuvre ne manque ni de simpli-
cité, ni d’émotion.
Soir d’été, tel est le titre de la composition, très
simple aussi, et d’une poésie pénétrante, que M. Emile
Adan exposait au Salon en même temps qu’une autre
page remarquable : les Derniers rayons. Comme tou-
jours, M. Adan a traduit un « effet » dans ce récit d’un
Soir d'été. Il s’est fait l’interprète de la grande accalmie
vespérale. Il a exprimé le silence, la paix infinie des
solitudes agrestes et jusqu’au léger bruissement des
feuillages, dont les belles masses forment tout le fond
de cette scène. Quant aux figures qui l’animent, le
jeune maître leur a donné un caractère et des attitudes
si vraisemblables, qu’elles font réellement partie du
tableau. Sans elles, ce ne serait pas la solitude, ce serait
le vide. f. j.
Portrait de S. Em. le Cardinal Foulon, par M. Duez.
Jamais peut-être M. Duez n’avait réuni à la fois un
aussi grand nombre d’œuvres intéressantes qu’au Salon
de cette année au Champ-de-Mars. C’est une consé-
cration nouvelle à une renommée déjà ancienne
et justement méritée.
Peu d’artistes ont su, comme lui, aborder des genres
très divers et y réussir avec autant de maîtrise.
A vrai dire, il n’est point ici question de genres, car
le peintre, sans s’attarder à nous montrer des scènes
intimes ou sévères et à brosser de simples portraits,
s’applique avant tout à y enfermer une idée. Il cherche
au-delà des gens et des choses l’âme des uns et des
autres et s’ingénie à la faire transparaître, sans la
sacrifier jamais au cadre.
Presque tout serait à citer dans l’œuvre de M. Duez.
Qui ne connaît son grand tryptique du Luxem-
bourg et n’a admiré la simplicité naïve comme la
mélancolique grandeur de la Légende qu’il y a retracée?
Plus récemment, en 1890, il se laissait voir sous
un'autre jour en peignant des sujets plus familiers, entre
autres, le Café sur la terrasse, que Y,Art Français a repro-
duit. Toujours c’était la même facture large et la
même vérité dans le détail, mais le plein air reprenait