L’ART FRANÇAIS
NOS ILLUSTRATIONS
La fin d’un rêve est d’autant plus cruelle que le rêve a été beau.
Dans le tableau auquel M. Louis de Schryver a donné précisément ce
titre la Fin d'un rêve, nous voyons une jeune veuve, contemplant son
enfant, et dans ce simple regard maternel nous distinguons nettement
unè douleur profonde, une de ces douleurs « qui ne veulent pas être
consolées »,
Nous avons récemment perdu Berehére, un de nos plus brillants
orientalistes. Il est permis de penser, quelle que soit l’importance de cette
perte, que le pays du soleil ne manquera pas d’explorateurs passionnés.
Voici, par exemple, M. Bompard, dont la manière élégante et le dessin
précis s’affirment chaque année avec plus d’éclat. Aussi sommes-nous
heureux de mettre sous les yeux de nos lecteurs l’un des plus
récents ouvrages du jeune maître : « Une rue dans l’oasis de Chetma, le
soir ».
Vue de S elles-sur-Cher, par M. E. Lessieux. — L’aquarelle que nous
reproduisons hors-texte, est très habilement traitée. Le charme du
paysage y est heureusement rendu, et dans l’impression de calme qui
se dégage de l’ensemble, comme dans la fraîcheur des détails, on
reconnaît nos riantes campagnes du Centre, en même temps qu’un
artiste qui voit juste et qui interprète avec talent.
On sait avec quelle sollicitude Y Art Français s’efforce de mettre en
lumière les travaux des jeunes artistes, et on ne s’étonnera point de
trouver dans ce journal la reproduction d’une des premières oeuvres de
M. Valère Bernard, jeune peintre marseillais de grand avenir. Cette vue
de l’un des quais du vieux Port est d’une rare séduction. Simple étude,
si l’on veut, mais ensoleillée et émue comme une page de Paul Arène.
A LA DIRECTION DES BEAUX-ARTS
Par décret signé la semaine dernière, M. Henry Roujon, chef
de bureau au cabinet du ministre de l’Instruction publique, est
nommé Directeur des Beaux-Arts en remplacement de M. Gus-
tave Larroumet.
Le nouveau directeur est donc, comme on voit, un adminis-
trateur de carrière.
Il est jeune: trente-huit ans. Il a débuté par le journalisme,
qu’il a quitté de bonne heure pour l’administration. A vingt-
trois ans, en 1876, il était admis au concours, dans les bureaux
de la rue de Grenelle que, depuis quinze années, il n’a plus
quittés.
M. Roujon n’avait pas entièrement renoncé au journalisme,
car on a pu lire de lui de charmants articles publiés par la 'Revue
bleue, sous le nom d’Henri Laujol et, tout dernièrement, sous
celui d’Ursus.
Quelles sont les intentions du nouveau Directeur ? quel est son
programme ? Il faut l’attendre à l’action pour en décider. En
tous cas, la carrière s’ouvre belle devant lui, et il aura souvent
l’occasion d’introduire des innovations qui devraient depuis long-
temps être la règle dans son administration, par exemple : répara-
tion de nos édifices nationaux, homogénéité de nos musées,
ouverture du Luxembourg aux jeunes maîtres, remaniement
(pour ne pas dire suppression) de l’Ecole des Beaux-Arts, adop-
tion enfin, d’une façon générale, du programme du regretté Cas-
tagnary et des mille réformes réclamées depuis longtemps,
réformes que le gouvernement précédent — trop personnel — lui
laisse la gloire d’accomplir.
On est en droit d’espérer beaucoup d’un esprit libéral et vrai-
ment artiste comme M. Roujon. Au reste, qu’on nous pardonne,
en finissant, de citer à l’appui quelques lignes écrites en 1874
par le jeune Directeur. Elles sont extraites d'une fantaisie intitulée
Le Monsieur qui ne s'y connaît pas et ne décèlent pas précisément
un rétrograde :
« Le Monsieur qui ne s’y connaît pas n’a point d’âge. Il a existé de
tout temps... C’est lui qui ricanait devant la Marque de Dante et
traitait spirituellement Delacroix de barbouilleur. C’est encore
lui qui a sifflé Tannhauser sous prétexte quil n’y avait pas, dans
tout ça, un air à retenir. Quand Carpeaux a exposé son beau
groupe de la danse, il s’est voilé la face d’horreur et a hurlé de
dégoût.
» Il s’appelle Légion... C’est lui qui décide, en dernier ressort,
de la vie ou de la mort d’un écrivain. Quand il a sifflé tout le
monde siffle.
» Musiciens, romanciers, peintres, poètes, voilà le juge
suprême. Adorez-le ! Evertuez-vous à l’amuser ; soyez Scribe,
Paul de Kock ou Auber : ne soyez ni Balzac, ni Delacroix, ni
Berlioz, parce qu’alors... Du reste, il ne s’y connaît pas, lui-
même en convient ; seulement, vous savez, son gros bon
sens... ! »
P. S. — Nous sommes heureux d’apprendre que M. Henry
Roujon a choisi pour secrétaire notre très distingué confrère
M. Camille Oudinot.
----/H/S/Sz--—---
LES ENVOIS DE ROME
Nous nous contenterons aujourd’hui d’énumérer les œuvres
envoyées par les pensionnaires de la Villa Médicis et exposées à
l’Ecole des Beaux-Arts, nous réservant d’y revenir avec plus
de détail :
Peinture :
M. Lebayle (dernière année). — Les Tusculanes. Entretien de
Cicéron avec ses amis dans sa villa de Tusculum.
M. Danger (3e année). — Copie de Y Annonciation du Musée
des Offices, par Léonard de Vinci.
M. Laurent (3e année). — Le poète qui voit sa jeunesse passer.
M. Thys (ire année). — Etude de baigneuse.
Sculpture :
M. Capellaro (dernière année). — Scène du Déluge (groupe).
M. Boutry (3e année). — Fontaine de Jouvence.
M. Convers (ire année). — La Cigale (statue).
Architecture :
M. Chedanne. — Etudes de décoration.
M. Tournaire. — Détails d’après l’Antique et la Renaissance.
Gravure :
M. Leriche (2e année). — Dortrait, d’après Holbein ; Dessins
d’après Michel-Ange et Ghirlandajo ; Etudes d’après nature.
M. Vernon (3e année). — La Science moderne découvrant l’An-
tiquité (médaille) ; médaillons.
L’Administrateur-Gérant : SILVESTRE
Glyptograpbie SILVESTRE & 97, rue Oberkampf, à Paris.
NOS ILLUSTRATIONS
La fin d’un rêve est d’autant plus cruelle que le rêve a été beau.
Dans le tableau auquel M. Louis de Schryver a donné précisément ce
titre la Fin d'un rêve, nous voyons une jeune veuve, contemplant son
enfant, et dans ce simple regard maternel nous distinguons nettement
unè douleur profonde, une de ces douleurs « qui ne veulent pas être
consolées »,
Nous avons récemment perdu Berehére, un de nos plus brillants
orientalistes. Il est permis de penser, quelle que soit l’importance de cette
perte, que le pays du soleil ne manquera pas d’explorateurs passionnés.
Voici, par exemple, M. Bompard, dont la manière élégante et le dessin
précis s’affirment chaque année avec plus d’éclat. Aussi sommes-nous
heureux de mettre sous les yeux de nos lecteurs l’un des plus
récents ouvrages du jeune maître : « Une rue dans l’oasis de Chetma, le
soir ».
Vue de S elles-sur-Cher, par M. E. Lessieux. — L’aquarelle que nous
reproduisons hors-texte, est très habilement traitée. Le charme du
paysage y est heureusement rendu, et dans l’impression de calme qui
se dégage de l’ensemble, comme dans la fraîcheur des détails, on
reconnaît nos riantes campagnes du Centre, en même temps qu’un
artiste qui voit juste et qui interprète avec talent.
On sait avec quelle sollicitude Y Art Français s’efforce de mettre en
lumière les travaux des jeunes artistes, et on ne s’étonnera point de
trouver dans ce journal la reproduction d’une des premières oeuvres de
M. Valère Bernard, jeune peintre marseillais de grand avenir. Cette vue
de l’un des quais du vieux Port est d’une rare séduction. Simple étude,
si l’on veut, mais ensoleillée et émue comme une page de Paul Arène.
A LA DIRECTION DES BEAUX-ARTS
Par décret signé la semaine dernière, M. Henry Roujon, chef
de bureau au cabinet du ministre de l’Instruction publique, est
nommé Directeur des Beaux-Arts en remplacement de M. Gus-
tave Larroumet.
Le nouveau directeur est donc, comme on voit, un adminis-
trateur de carrière.
Il est jeune: trente-huit ans. Il a débuté par le journalisme,
qu’il a quitté de bonne heure pour l’administration. A vingt-
trois ans, en 1876, il était admis au concours, dans les bureaux
de la rue de Grenelle que, depuis quinze années, il n’a plus
quittés.
M. Roujon n’avait pas entièrement renoncé au journalisme,
car on a pu lire de lui de charmants articles publiés par la 'Revue
bleue, sous le nom d’Henri Laujol et, tout dernièrement, sous
celui d’Ursus.
Quelles sont les intentions du nouveau Directeur ? quel est son
programme ? Il faut l’attendre à l’action pour en décider. En
tous cas, la carrière s’ouvre belle devant lui, et il aura souvent
l’occasion d’introduire des innovations qui devraient depuis long-
temps être la règle dans son administration, par exemple : répara-
tion de nos édifices nationaux, homogénéité de nos musées,
ouverture du Luxembourg aux jeunes maîtres, remaniement
(pour ne pas dire suppression) de l’Ecole des Beaux-Arts, adop-
tion enfin, d’une façon générale, du programme du regretté Cas-
tagnary et des mille réformes réclamées depuis longtemps,
réformes que le gouvernement précédent — trop personnel — lui
laisse la gloire d’accomplir.
On est en droit d’espérer beaucoup d’un esprit libéral et vrai-
ment artiste comme M. Roujon. Au reste, qu’on nous pardonne,
en finissant, de citer à l’appui quelques lignes écrites en 1874
par le jeune Directeur. Elles sont extraites d'une fantaisie intitulée
Le Monsieur qui ne s'y connaît pas et ne décèlent pas précisément
un rétrograde :
« Le Monsieur qui ne s’y connaît pas n’a point d’âge. Il a existé de
tout temps... C’est lui qui ricanait devant la Marque de Dante et
traitait spirituellement Delacroix de barbouilleur. C’est encore
lui qui a sifflé Tannhauser sous prétexte quil n’y avait pas, dans
tout ça, un air à retenir. Quand Carpeaux a exposé son beau
groupe de la danse, il s’est voilé la face d’horreur et a hurlé de
dégoût.
» Il s’appelle Légion... C’est lui qui décide, en dernier ressort,
de la vie ou de la mort d’un écrivain. Quand il a sifflé tout le
monde siffle.
» Musiciens, romanciers, peintres, poètes, voilà le juge
suprême. Adorez-le ! Evertuez-vous à l’amuser ; soyez Scribe,
Paul de Kock ou Auber : ne soyez ni Balzac, ni Delacroix, ni
Berlioz, parce qu’alors... Du reste, il ne s’y connaît pas, lui-
même en convient ; seulement, vous savez, son gros bon
sens... ! »
P. S. — Nous sommes heureux d’apprendre que M. Henry
Roujon a choisi pour secrétaire notre très distingué confrère
M. Camille Oudinot.
----/H/S/Sz--—---
LES ENVOIS DE ROME
Nous nous contenterons aujourd’hui d’énumérer les œuvres
envoyées par les pensionnaires de la Villa Médicis et exposées à
l’Ecole des Beaux-Arts, nous réservant d’y revenir avec plus
de détail :
Peinture :
M. Lebayle (dernière année). — Les Tusculanes. Entretien de
Cicéron avec ses amis dans sa villa de Tusculum.
M. Danger (3e année). — Copie de Y Annonciation du Musée
des Offices, par Léonard de Vinci.
M. Laurent (3e année). — Le poète qui voit sa jeunesse passer.
M. Thys (ire année). — Etude de baigneuse.
Sculpture :
M. Capellaro (dernière année). — Scène du Déluge (groupe).
M. Boutry (3e année). — Fontaine de Jouvence.
M. Convers (ire année). — La Cigale (statue).
Architecture :
M. Chedanne. — Etudes de décoration.
M. Tournaire. — Détails d’après l’Antique et la Renaissance.
Gravure :
M. Leriche (2e année). — Dortrait, d’après Holbein ; Dessins
d’après Michel-Ange et Ghirlandajo ; Etudes d’après nature.
M. Vernon (3e année). — La Science moderne découvrant l’An-
tiquité (médaille) ; médaillons.
L’Administrateur-Gérant : SILVESTRE
Glyptograpbie SILVESTRE & 97, rue Oberkampf, à Paris.