Cinquième année, — 247.
LE NUMÉRO : 25 CENTIMES
SAMEDI 16 JANVIER 1892
L'ART FRANÇAIS
Directeur littéraire :
FIRMIN JAVEL
Revue Artistique Hebdomadaire
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
Directeurs artistiques :
SILVESTRE & O
ABONNEMENTS. — Paris & Départements : un an, 12 francs; six mois, 7 francs. — Union Postale : un an, 15 francs; six mois, 8 francs.
NOS ILLUSTRATIONS
SALON DE 1891 {Champs-Élysées)
Buste de Mlle Darlaud, par
M. Lucien Pallez. — Aussi bien
par l’exécution que par l’attrait
exquis du modèle, le buste de
Mlle Darlaud a été l’un des mor-
ceaux les plus goûtés du dernier
Salon des Champs-Elysées.
Il n’est personne à Paris qui
ne connaisse la délicieuse artiste
dont les multiples créations au
théâtre du Gymnase ont été au-
tant de succès. Il est vrai de
dire que la grâce de la femme y
eut autant de part que le réel
talent de l’actrice et c’est cette
grâce surtout qu’il est intéressant
de retrouver ici.
Peut-être M. Pallez a-t-il mo-
delé un peu rudement la tête
dont le charme est atténué par
quelque raideur, mais il a très
heureusement moulé le buste et
l’a entouré d’une draperie légère
et capricieuse du plus séduisant
effet.
Les Huns, — ^Attila, par M,
Checa, — Après la Course de
chars romains, exposée avec tant
de succès en 1890, M. Checa
nous donne encore une compo-
sition fougueuse mais au cadre
plus sauvage.
Certes, il y a de Félan, de la
furie même dans cette horde qui
se précipite, mais l’on constate
une fois de plus quelques inex-
périences de dessin et de com-
position. Il nous semble certain
que ie temps fera disparaître ces
petites taches et que les prochai-
nes expositions nous montreront
dans M, Checa un peintre d’his-
toire ou de batailles fort remar-
quable.
Lucien Pallez.
Le Devoir, par M. Sergent — La belle composition de M. Sergent
t digne à tous égards de retenir l’attention par son réalisme de bon
-.1 Yenv poignante, et ses recherches curieuses de couleur.
Ces soldats de la grande armée attendant l’ennçmi sur la route
d’Essling sont très purement
dessinés dans des poses très
naturelles et très étudiées à la
fois. Le tout est largement peint
dans un bel éclairage et avec une
grande sobriété de détails.
G. DE B.
La Veillée, par M. E. Noir.
Peintre du bon chemin ! Tous
ces petits réduits de fumée, aux
âtres noirs,aux branlantes chaises,
aux lits d’étoffes à pois, ces ma-
lins terriens et ces bonnes vieilles
endormies à la douceur des
tisons, l’artiste en a saisi la soli-
taire tristesse, et depuis cinq ans,
malgré les coups de fleuret qui
s’entremêlent à ses coups de
pinceaux, il nous les a montrés
dans quelques œuvres qui ont
eu, en ces derniers Salons, les
premières caresses du succès :
L’Agonie, Un frère, En route, et
surtout l'Onglée, un vieux mi-
transi qui souffle dans scs doigts
mauves au milieu des neiges de
la forêt. Cette toile promet au
peintre, s’il continue à se livrer
à l’air libre, au bon rêve de la
campagne, un avenir de pure et
vraie gloire.
Qu’il continue à lancer les
contres et les giffles en gants de
crin, mais qu’il n’oublie pas trop
les « vieilles bonnes petites
femmes » des veillées, la chère
neige des clairières, les champs
d'or, les gueux de grande route,
cette peinture de pitié à travers
laquelle nous devinons sa belle
âme, — et il grandira, quoi-
qu’il soit de Paris, et non de
Pampelune.
M. Ernest Noir est un grand
brun de vingt-six ans qui écrit
des vers, tire au pistolet, boxe,
fait des armes, saute à cheval
comme un cowboy, — n’a que des /unis —- et peint surtout mieux
qu’il ne tire, ne versifie, ne ferraille, ne boxe et ne galope.
Ubai.d Lacaze
N. B. — Un accident survenu â l'un de nos cliché'-., a entrainé une
Buste de M,le Darlaud.
LE NUMÉRO : 25 CENTIMES
SAMEDI 16 JANVIER 1892
L'ART FRANÇAIS
Directeur littéraire :
FIRMIN JAVEL
Revue Artistique Hebdomadaire
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
Directeurs artistiques :
SILVESTRE & O
ABONNEMENTS. — Paris & Départements : un an, 12 francs; six mois, 7 francs. — Union Postale : un an, 15 francs; six mois, 8 francs.
NOS ILLUSTRATIONS
SALON DE 1891 {Champs-Élysées)
Buste de Mlle Darlaud, par
M. Lucien Pallez. — Aussi bien
par l’exécution que par l’attrait
exquis du modèle, le buste de
Mlle Darlaud a été l’un des mor-
ceaux les plus goûtés du dernier
Salon des Champs-Elysées.
Il n’est personne à Paris qui
ne connaisse la délicieuse artiste
dont les multiples créations au
théâtre du Gymnase ont été au-
tant de succès. Il est vrai de
dire que la grâce de la femme y
eut autant de part que le réel
talent de l’actrice et c’est cette
grâce surtout qu’il est intéressant
de retrouver ici.
Peut-être M. Pallez a-t-il mo-
delé un peu rudement la tête
dont le charme est atténué par
quelque raideur, mais il a très
heureusement moulé le buste et
l’a entouré d’une draperie légère
et capricieuse du plus séduisant
effet.
Les Huns, — ^Attila, par M,
Checa, — Après la Course de
chars romains, exposée avec tant
de succès en 1890, M. Checa
nous donne encore une compo-
sition fougueuse mais au cadre
plus sauvage.
Certes, il y a de Félan, de la
furie même dans cette horde qui
se précipite, mais l’on constate
une fois de plus quelques inex-
périences de dessin et de com-
position. Il nous semble certain
que ie temps fera disparaître ces
petites taches et que les prochai-
nes expositions nous montreront
dans M, Checa un peintre d’his-
toire ou de batailles fort remar-
quable.
Lucien Pallez.
Le Devoir, par M. Sergent — La belle composition de M. Sergent
t digne à tous égards de retenir l’attention par son réalisme de bon
-.1 Yenv poignante, et ses recherches curieuses de couleur.
Ces soldats de la grande armée attendant l’ennçmi sur la route
d’Essling sont très purement
dessinés dans des poses très
naturelles et très étudiées à la
fois. Le tout est largement peint
dans un bel éclairage et avec une
grande sobriété de détails.
G. DE B.
La Veillée, par M. E. Noir.
Peintre du bon chemin ! Tous
ces petits réduits de fumée, aux
âtres noirs,aux branlantes chaises,
aux lits d’étoffes à pois, ces ma-
lins terriens et ces bonnes vieilles
endormies à la douceur des
tisons, l’artiste en a saisi la soli-
taire tristesse, et depuis cinq ans,
malgré les coups de fleuret qui
s’entremêlent à ses coups de
pinceaux, il nous les a montrés
dans quelques œuvres qui ont
eu, en ces derniers Salons, les
premières caresses du succès :
L’Agonie, Un frère, En route, et
surtout l'Onglée, un vieux mi-
transi qui souffle dans scs doigts
mauves au milieu des neiges de
la forêt. Cette toile promet au
peintre, s’il continue à se livrer
à l’air libre, au bon rêve de la
campagne, un avenir de pure et
vraie gloire.
Qu’il continue à lancer les
contres et les giffles en gants de
crin, mais qu’il n’oublie pas trop
les « vieilles bonnes petites
femmes » des veillées, la chère
neige des clairières, les champs
d'or, les gueux de grande route,
cette peinture de pitié à travers
laquelle nous devinons sa belle
âme, — et il grandira, quoi-
qu’il soit de Paris, et non de
Pampelune.
M. Ernest Noir est un grand
brun de vingt-six ans qui écrit
des vers, tire au pistolet, boxe,
fait des armes, saute à cheval
comme un cowboy, — n’a que des /unis —- et peint surtout mieux
qu’il ne tire, ne versifie, ne ferraille, ne boxe et ne galope.
Ubai.d Lacaze
N. B. — Un accident survenu â l'un de nos cliché'-., a entrainé une
Buste de M,le Darlaud.