PARIS SOUS LES CAROLINGIENS
* '■ 752-987.
DÉCADENCE DE PARIS SOUS PEPIN ET,.SES SUCCESSEURS.
752-845.
’époqüe carolingienne, comme celle des derniers Mérovingiens, est pour Paris une période de torpeur et
J d’humiliation. Les trois premiers rois de la nouvelle race, et le plus grand d’entr’eux, le nouveau César
jj d’Occident, délaissent entièrement Paris. Comme nous n’écrivons pas une histoire de France, nous ne dirons
jeg r£gnes célèbres de Pépin, de Charlemagne et de Louis-le-Débonnaire que ce qui concerne directement
notre sujet, et cela se réduit à fort peu de chose. Paris n’étant plus le siège du pouvoir et le séjour du souverain,
f retomba à l’état de ville de province, et les villes de province alors, par suite du penchant des populations à les quitter
pour se mettre dans la dépendance des seigneurs laïcs et ecclésiastiques, principalement des grandes abbayes, diminuaient
chaque jour en habitants et en importance. Il faudra attendre la fin du Xe siècle, et surtout le grand réveil du XIIe, pour
voir renaître à Lutèce une véritable capitale.
- . ' ’ • . * **
Une institution cependant mérite d’être indiquée dès maintenant; c’est celle des Comtes de Paris. Les comtes,
gouverneurs de provinces nommés par les rois, apparaissent à Paris au commencement du VIIIe siècle, faibles, révocables
à volonté, presque inaperçus. Bientôt ils vont grandir, se rendre héréditaires, et se fortifiant à mesure que les Carolingiens
/dégénèrent, jouer contre eux le rôle des maires du palais contre les rois fainéants, enfin les évincer du trône et inaugurer
à leur place une troisième dynastie. En attendant, ils sont bien humbles: le premier qui apparaisse (sous Thierry III) est
Garin, qui usurpa certains péages perçus sur la foire de Saint-Denis, alors transférée à Paris entre les églises de Saint-Laurent
)
et de Saint-Martin; puis, au temps de Thierry IV, vient Gairefried. Nous retrouvons plus loin leurs successeurs.
Les évêques de la fin du VIIIe siècle sont : Deodefrid, qui assista vraisemblablement au concile tenu à Gentilly (767) au sujet
du culte des images et de l’addition au Symbole du mot Filioque; ce fut sans doute aussi sous son pontificat que Pepin-le-Bref vint
mourir à Saint-Denis (768); ensuite Erkenrad Ier, qui eut avec l’abbaye de Saint-Denis un différend terminé par Charlemagne en
776. On eut recours pour vider la querelle au jugement de Dieu par la croix, et le comte de Paris, qui se nommait alors Gérard,
assista à cette épreuve. Sous Erkenrad un incendie consuma les titres et les chartes de l’Église de Paris. L’évêque s’adressa alors
à l’empereur qui confirma par un diplôme l’Église dans la possession de tous les biens et de tous les serfs qu’elle avait
antérieurement à la destruction des actes : cette perte, fait observer Félibien, nous prive de lumières précieuses sur les origines
et les possessions primitives des évêques de Paris. On rapporte aussi à Erkenrad l’établissement des chanoines dans sa cathédrale ;
ils avaient été institués, dès 760, par l’évêque de Metz Chrodegand, mais ils n’apparaissent officiellement à Paris qu’en 829.
Si nous ne disons rien ici de la Fondation de l’Université de Paris en l’an 800 par le glorieux Charlemagne, c’est que cette
prétendue fondation est une pure invention du trop érudit Egasse-Duboulay, et qu’elle est formellement contredite par toutes
les sources. Paris avait eu dès les premiers temps qui suivirent la Conquête une école épiscopale florissante, l’école du Parvis,
la première peut-être des Gaules après celle de Poitiers; nous en avons parlé à l’occasion de saint Germain. Les églises de
Sainte-Geneviève et, de Saint-Germain-l’Auxerrois en eurent également par la suite, comme succursales de celle de la cathédrale,
et le quai de l’École rappelle ce fait; beaucoup plus tard, les grandes abbayes, Saint-Germain-des-Prés et Saint-Denis, eurent
les leurs : celle de Saint-Germain fut fondée en 790 par l’abbé Robert Ier, et c’est ce qui a probablement donné lieu à l’erreur
que nous venons de signaler. Ce fut, en effet, en suite de la circulaire adressée en 787 par Charlemagne à tous les évêques et
abbéS’pour les engager à créer des écoles, que l’abbé Robert institua la sienne : elle produisit Usuard, Aimoin, Abbon. On sait
quelle était alors lanature de l’enseignement, et le Capitulaire de 787 le dit clairement; la théologie, la science des Écritures,
le chant d’église en étaient presque les seuls objets; quant à l’enseignement public, c’est seulement à la fin du IXe siècle qu’on
en trouve une première trace, lorsque Rémi de Reims vint à Paris donner des leçons-sur la grammaire et la dialectique; enfin,
l’école Palatine, où Alcuin enseignait, suivait l’empereur dans tous ses voyages et n’a jamais eu Paris pour théâtre.
* '■ 752-987.
DÉCADENCE DE PARIS SOUS PEPIN ET,.SES SUCCESSEURS.
752-845.
’époqüe carolingienne, comme celle des derniers Mérovingiens, est pour Paris une période de torpeur et
J d’humiliation. Les trois premiers rois de la nouvelle race, et le plus grand d’entr’eux, le nouveau César
jj d’Occident, délaissent entièrement Paris. Comme nous n’écrivons pas une histoire de France, nous ne dirons
jeg r£gnes célèbres de Pépin, de Charlemagne et de Louis-le-Débonnaire que ce qui concerne directement
notre sujet, et cela se réduit à fort peu de chose. Paris n’étant plus le siège du pouvoir et le séjour du souverain,
f retomba à l’état de ville de province, et les villes de province alors, par suite du penchant des populations à les quitter
pour se mettre dans la dépendance des seigneurs laïcs et ecclésiastiques, principalement des grandes abbayes, diminuaient
chaque jour en habitants et en importance. Il faudra attendre la fin du Xe siècle, et surtout le grand réveil du XIIe, pour
voir renaître à Lutèce une véritable capitale.
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Une institution cependant mérite d’être indiquée dès maintenant; c’est celle des Comtes de Paris. Les comtes,
gouverneurs de provinces nommés par les rois, apparaissent à Paris au commencement du VIIIe siècle, faibles, révocables
à volonté, presque inaperçus. Bientôt ils vont grandir, se rendre héréditaires, et se fortifiant à mesure que les Carolingiens
/dégénèrent, jouer contre eux le rôle des maires du palais contre les rois fainéants, enfin les évincer du trône et inaugurer
à leur place une troisième dynastie. En attendant, ils sont bien humbles: le premier qui apparaisse (sous Thierry III) est
Garin, qui usurpa certains péages perçus sur la foire de Saint-Denis, alors transférée à Paris entre les églises de Saint-Laurent
)
et de Saint-Martin; puis, au temps de Thierry IV, vient Gairefried. Nous retrouvons plus loin leurs successeurs.
Les évêques de la fin du VIIIe siècle sont : Deodefrid, qui assista vraisemblablement au concile tenu à Gentilly (767) au sujet
du culte des images et de l’addition au Symbole du mot Filioque; ce fut sans doute aussi sous son pontificat que Pepin-le-Bref vint
mourir à Saint-Denis (768); ensuite Erkenrad Ier, qui eut avec l’abbaye de Saint-Denis un différend terminé par Charlemagne en
776. On eut recours pour vider la querelle au jugement de Dieu par la croix, et le comte de Paris, qui se nommait alors Gérard,
assista à cette épreuve. Sous Erkenrad un incendie consuma les titres et les chartes de l’Église de Paris. L’évêque s’adressa alors
à l’empereur qui confirma par un diplôme l’Église dans la possession de tous les biens et de tous les serfs qu’elle avait
antérieurement à la destruction des actes : cette perte, fait observer Félibien, nous prive de lumières précieuses sur les origines
et les possessions primitives des évêques de Paris. On rapporte aussi à Erkenrad l’établissement des chanoines dans sa cathédrale ;
ils avaient été institués, dès 760, par l’évêque de Metz Chrodegand, mais ils n’apparaissent officiellement à Paris qu’en 829.
Si nous ne disons rien ici de la Fondation de l’Université de Paris en l’an 800 par le glorieux Charlemagne, c’est que cette
prétendue fondation est une pure invention du trop érudit Egasse-Duboulay, et qu’elle est formellement contredite par toutes
les sources. Paris avait eu dès les premiers temps qui suivirent la Conquête une école épiscopale florissante, l’école du Parvis,
la première peut-être des Gaules après celle de Poitiers; nous en avons parlé à l’occasion de saint Germain. Les églises de
Sainte-Geneviève et, de Saint-Germain-l’Auxerrois en eurent également par la suite, comme succursales de celle de la cathédrale,
et le quai de l’École rappelle ce fait; beaucoup plus tard, les grandes abbayes, Saint-Germain-des-Prés et Saint-Denis, eurent
les leurs : celle de Saint-Germain fut fondée en 790 par l’abbé Robert Ier, et c’est ce qui a probablement donné lieu à l’erreur
que nous venons de signaler. Ce fut, en effet, en suite de la circulaire adressée en 787 par Charlemagne à tous les évêques et
abbéS’pour les engager à créer des écoles, que l’abbé Robert institua la sienne : elle produisit Usuard, Aimoin, Abbon. On sait
quelle était alors lanature de l’enseignement, et le Capitulaire de 787 le dit clairement; la théologie, la science des Écritures,
le chant d’église en étaient presque les seuls objets; quant à l’enseignement public, c’est seulement à la fin du IXe siècle qu’on
en trouve une première trace, lorsque Rémi de Reims vint à Paris donner des leçons-sur la grammaire et la dialectique; enfin,
l’école Palatine, où Alcuin enseignait, suivait l’empereur dans tous ses voyages et n’a jamais eu Paris pour théâtre.