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Audiganne, Armand; Benoist, Philippe [Ill.]
Paris dans sa splendeur: monuments, vues, scènes historiques, descriptions et histoire$ddessins et lithographies par MM. Philippe Benoist [und 17 weitere] ; texte par MM. Audiganne [und 23 weitere] (3ième volume): Histoire de Paris - environs de Paris — Paris: Henri Charpentier, 1861

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https://doi.org/10.11588/diglit.71015#0054

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PARIS DANS SA SPLENDEUR.

Saint-Victor, Saint-Jacques, Monsieur-le-Prince, Saint-Germain-des-Prés, et rue de Nesle ou rue Mazarine. Les portes principales
étaient celles de Bucy, Gibard ou d’Enfer, Saint-Jacques et Saint-Victor. La Tournelle à l’Est, et la fameuse tour de Nesle, alors
nommée tour Philippe-Hamelin, à l’Ouest, terminaient ces murailles aux deux points où elles rejoignaient la Seine : l’ensemble
des constructions comprenait, en 1211, une surface de 262 hectares 86 ares.
Pendant ce long travail, Philippe-Auguste était allé à la Croisade, pour laquelle l’assemblée de Paris de 1188 avait ordonné
la dîme saladine; il avait à son départ établi six prud’hommes pour l’administration de la prévôté de Paris et confié son trésor à
la garde des bourgeois de la ville, trait caractéristique de la politique anti-féodale des rois, rappelé les Juifs moyennant finance,
et répudié Isemburge de Danemark pour Agnès de Méranie. Le pieux évêque Eudes, de l’ancienne maison de Sully, qui s’était
signalé en 1198 par ses efforts pour l’abolition de la fête des Fous, se soumit fidèlement à l’interdit lancé à cette occasion par
Innocent III; aussi fut-il dépouillé et chassé de son manoir par les soldats du roi, mais l’année suivante Philippe lui fit amende
honorable (1199-1200). Jean-sans-Terre vint à Paris en 1201 et y fut reçu avec magnificence.
C’est en 1204 qu’apparaît pour la première fois le nom devenu si célèbre du Louvre, Lupara, dont l’étymologie est incertaine
et dont l’origine remonte plus haut que Philippe-Auguste. Celui-ci voulut avoir, en ce temps de féodalité^rigoureuse, son donjon
particulier, centre et siège de sa suzeraineté royale. Commençant donc par affranchir de toute rente et redevance le sol sur lequel
il voulait asseoir le château, il fit élever, sur le bord de la Seine, ;une tour énorme, large de 14 4 pieds à sa base, destinée à
devenir à la fois forteresse, palais et prison. En même temps s’élevaient de nombreuses églises: sur la rive droite, Saint-Honoré,
Saint-Thomas et Saint-Nicolas-du-Louvre, l’abbaye Saint-Antoine-des-Champs, Saint-Jean-en-Grève, les hôpitaux de la Trinité
et de la Madeleine; sur la rive gauche, Saint-Étienne-du-Mont, Saint-André-des-Arcs, Saint-Côme et Saint-Damien, Saint-Pierre,
Saint-Souplice ou Sulpice. Ces noms témoignent de l’agrandissement territorial, vraiment considérable, qu’avait déjà atteint la
capitale de la France.
Le développement commercial n’était pas moindre; le bruit et le mouvement remplissaient déjà les rues étroites et sales qui
serpentaient à travers les quartiers de la Cité, d’Ontre-Grand-Pont et d’Outre-Pçtit-Pont. Les cris des marchands de vins, des
oubloiers, des èstuvéeurs et de mille autres industries de carrefour, tels que nous les a transmis le trouvère Guillaume de Villeneuve,
les plaintes monotones des mendiants et des frères quêteurs de tous les ordres, assourdissaient les bourgeois et les étudiants
jusqu’au moment où la grande voix du couvre-feu venait éteindre tous ces bruits et plonger la ville dans l’obscurité.
L’histoire religieuse de Paris à cette époque est aussi féconde que celle des monuments et des institutions : trois conciles s’y
tinrent (1201-1212); l’un d’eux ordonna contre des hérétiques les premiers supplices pour cause de religion qu’on ait vus à
Paris; un autre s’occupa de la réforme du clergé. L’évêque d’alors était Pierre de Nemours, qui mourut au siège de Damiette
en 1219, dans la Croisade du roi de Jérusalem, Jean de Brienne, et eut pour successeur Guillaume de Scignclay, mort en 1223.
C’est à lui qu’il faut faire remonter tout au moins la fondation du For-FÉvêque, Forum Episcopi, tribunal où s’exercait la justice
séculière de l’évêque, et qui finit par être transformé en prison; on trouve, en effet, en 1222, un accord passé entre Philippe-Auguste
et Guillaume de Seignelay, au sujet des droits respectifs des deux juridictions royale et épiscopale. Le bâtiment du For-FÉvêque,
situé rue Saint-Germain-l’Auxerrois, a été démoli en 1780.
Après le triomphe de Bouvines (1214), le puissant comte de Flandre, Ferrand, le plus implacable ennemi du roi de France,
traversa Paris dans une litière, au milieu des huées populaires, et fut enfermé dans la Tour-Neuve du Louvre, où il resta jusqu’à
saint Louis. La tourbe des captifs vulgaires fut répartie entre le Grand et le Petit-Châtelet, aux têtes des ponts de la Cité. Sept
jours et sept nuits de fêtes célébrèrent à Paris le vainqueur national. « Qui pourrait s’imaginer, s’écrie le poète historiographe
Guillaume Le Breton, les hymnes de victoire, les danses continuelles du peuple, le doux chant des clercs; les rues, les maisons, les
chemins tout tendus de courtines et de tapisseries de soie, couverts d'herbes, de fleurs et de branches d’arbres verdoyantes, etc.? »
Les écoliers surtout, dont la foule s’élevait à près de vingt mille, les écoliers, ces bien-aimés du pouvoir royal, ces ennemis
irréconciliables des vrais Parisiens auxquels ils livraient sans cesse des luttes sanglantes, firent éclater leur allégresse; l’üniversité,
la fille aînée des rois, quand elle massacrait les bourgeois au Pré aux Clercs, savait bien que le roi était pour elle et que ses
privilèges la mettaient à l’abri de la justice laïque; aussi ne s’en faisait-elle faute et bravait-elle impunément les hommes d’armes
de l’abbé de Saint-Germain-des-Prés aussi bien que les sergents du prévôt de Paris.
Deux conciles tenus en 1224 et 1226, une procession ordonnée par la reine Blanche, le tout relatif à la guerre des Albigeois,
et la fondation du couvent des Filles-Dieu, sont les seuls événements du règne de Louis VIII qui se rattachent à l’histoire de
Paris. Au milieu de la faiblesse générale des rois, saint Louis peut s’asseoir sur le trône de France : l’avenir est à lui.
Eugène Carissan.
 
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