Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Audiganne, Armand; Benoist, Philippe [Ill.]
Paris dans sa splendeur: monuments, vues, scènes historiques, descriptions et histoire$ddessins et lithographies par MM. Philippe Benoist [und 17 weitere] ; texte par MM. Audiganne [und 23 weitere] (3ième volume): Histoire de Paris - environs de Paris — Paris: Henri Charpentier, 1861

DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.71015#0106

DWork-Logo
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
68

PARIS DANS SA SPLENDEUR.

entre 1619 et 1639. Corneille, Turenne et Lesueur les précédèrent; Fénelon, La Bruyère, Massillon, Regnard, Villars et
Vendôme les suivirent: c’est encore le talent, quelquefois le génie, mais on sent néanmoins que le siècle baisse.
La Bruyère nous a laissé en quelques traits la physionomie morale de Paris: « Paris, pour l’ordinaire le siège de la cour,
ne sait pas toujours la contrefaire, » et il nous représente les femmes de la cour sachant apprécier un homme de mérite, même
lorsqu’il n’a que du mérite, tandis que la femme de la ville, c’est surtout le bruissement du carrosse s’arrêtant à sa porte, qui la
fait pétiller de goût et de complaisanc.e! C’est \e.bel attelage, ce sont les livrées, ce sont les clous dorés qui l’éblouissent! Quelle
impatience! quelle charmante réception ! Elle tient compte au visiteur des doubles soupentes ; elle l’en estime davantage, elle Ven
aime mieux! . • ' / ' - . ' • •
Quant au luxe et à la dépense, La Bruyère regrette qu’on ne soit pas pénétré de cette maxime, que ce « qui est dans les
grands splendeur, somptuosité, magnificence, est dissipation, folie, ineptie dans le particulier. » On voit que la comédie du
Bourgeois Gentilhomme courait les rues. Jamais on ne se moqua plus des marquis, et jamais il n’y eut plus de marquis-de
contrebande.
Les arts avaient produit Poussin sous Louis XIII; ils produisirent sous Louis XIV Lesueur et Puget, deux génies de premier
ordre: l’un, par la puissance de l’expression, la profondeur de la,pensée et une sensibilité touchante; l’autre, par l’énergie, le
mouvement, la passion qu’il savait prêter au marbre. Ni l’un ni l’autre, toutefois, n’obtint les faveurs persévérantes de la cour
où Lebrun dominait en maître r Lesueur chercha même un asile contre la jalousie de son rival dans le cloître des Chartreux du
Luxembourg, et Puget, plutôt que de se soumettre aux exigences de Lebrun, quitta Paris pour retourner à Marseille.
Lebrun fut donc en France, au XVIIe siècle, le tyran de l’art. Comme peintre, d’ailleurs, la belle et noble ordonnance de ses
compositions ne rachetait qu’à demi ce qu’il y.avait en elles de pompe guindée et monotone. Vander Meulen fut plus heureux
dans ses chasses et ses batailles. Comme tous les peintres flamands, il excelle dans la représentation vraie des scènes pour lesquelles
Lebrun demandait des couleurs factices à l’allégorie. Après eux, l’exagération de Jouvenet, la grâce étudiée de Mignard, la facilité
élégante de La Hire marquèrent un déclin que rendaient plus sensibles encore, les souvenirs de Poussin et de Lesueur. Mais au
même moment l’art dé la gravure produisait Audran, Edelinck et Pierre Drevet, admirables artistes, plus grands même que la
plupart des peintres dont ils popularisèrent les œuvres. ? . .
Quant à l’architecture, elle se distingue surtout alors, comme les peintures de Lebrun, par une certaine pompe convenue et
théâtrale. Ce fut, toutefois, au XVIIe siècle qu’elle introduisit la coupole dans nos édifices religieux, et donna ainsi une expression
artistique à l’élan de l’amour et de la prière. Les plus anciennes coupoles de Paris étaient celles des Petits-Augustins et des Carmes;
venaient ensuite celles de l’Assomption dessinée par Errard; de la Sorbonne, par Lemercier; du collège Mazarin, par Lcvau; du
Val-de-Grâce, haute de 42 mètres et large de 21, par Mansard et Le Muet, et enfin la coupple des Invalides, dont la forme
élégante et les arêtes dorées annoncent si heureusement de loin les monuments de la capitale. > ' .
Pour tout le reste, l’architecture religieuse fut, pendant le XVIIe siècle, froide, correcte et monotone. Saint^Louis de la rue
Saint-Antoine, Saint-Louis en file, Saint-Nicolas-du-Chardonnet, Saint-Jacques-du-Haut-Paa, Saint-Thomas-d’Aquin, -le chœur
et les nefs de Saint-Sulpice et de Saint-Roch donnent une idée complète de cet art qui prétendit être original et prit même le
nom d'art français, tandis qu’il n’était qu’une pâle imitation des monuments de l’Italie ancienne et moderne.
Les arcs de triomphe furent une autre réminiscence antique qui.se présenta d’elle-même à la pensée du siècle héroïque de
Louis-le-Grand. Dans un seul règne, Paris én'eut autant que Rome. La porte Saint-Denis, imposante masse de 34 mètres
carrés, érigée par l’édilité parisienne à la suite de l’occupation de la Hollande, se fit surtout remarquer par le caractère viril
de son dessin et la rare perfection de ses sculptures; la porte Saint-Martin, édifiée peu de jours après, était moins haute et
plus sévère (18 mètres carrés). L’arc de triomphe du Trône, commencé à l’occasion de l’entrée du roi et de la reine
Marie-Thérèse à Paris, en 1660, ne fut achevé qu’en plâtre, et n’a pas survécu à Louis XIV. Il se distinguait moins encore
par ses vastes proportions (48 mètres 66 centimètres sur 60 mètres) que par la richesse de sa composition et de ses
décors, où se révélait la pompeuse imagination de l’auteur de la colonnade du Louvre. Sur la rive gauche de la Seine, la porte
Saint-Bernard, refaite par Blondel, l’illustre architecte de la porte Saint-Denis, offrait l’aspect singulier de deux arcades égales.
Elles étaient surmontées d’images symboliques et de bas-reliefs représentant Louis XIV, d’un côté, répandant l’abondance, de
l’autre, tenant le gouvernail d’un navire et entouré des divinités de la mer; lui-même avait les attributs d’une divinité antique.
L’inscription portait : « Ludovici magni Providentiœ, à la Providence de Louis-le-Grand. »
Ainsi nous voilà en pleine mythologie: Boileau ne parle que des Dieux, Santeuil écrit chaque jour de nouvelles jnvocations
aux Nymphes. On peut les lire encore sur les fontaines publiques qui devenaient d’année en année plus monumentales et plus
nombreuses. Ici, c’est une Naïade qui a brisé son urne; elle pleure, et de ses larmes naît une fontaine: Ex istis fletibus unda
finit. Là (à la fontaine du Ponceau), c’est une Nymphe qui contemple avec admiration Tare de triomphe de la porte Saint-Denis,
et applaudit par le murmure de son onde : Suis garrula plaudü aquis. Il serait difficile de pousser plus loin la coquetterie de
 
Annotationen