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Audiganne, Armand; Benoist, Philippe [Ill.]
Paris dans sa splendeur: monuments, vues, scènes historiques, descriptions et histoire$ddessins et lithographies par MM. Philippe Benoist [und 17 weitere] ; texte par MM. Audiganne [und 23 weitere] (3ième volume): Histoire de Paris - environs de Paris — Paris: Henri Charpentier, 1861

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https://doi.org/10.11588/diglit.71015#0166

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PARIS DANS SA SPLENDEUR.

maîtres. Le maréchal duc de Trévise, six généraux, deux colonels, neuf officiers ou grenadiers de la garde nationale, et un grand
nombre de simples spectateurs de tout âge et de tout sexe étaient étendus sans vie ou dans les convulsions de l’agonie. Le roi
lui-même eut le front effleuré par un projectile, mais ses fils ne furent pas atteints, et, après une halle donnée aux émotions les
plus douloureuses, le prince et la famille royale continuèrent la revue. Le crime qui venait d’ensanglanter Paris, était l’œuvre
d’un sicaire corse, nommé Fieschi, et de plusieurs agents des sociétés secrètes, tels que Pépin et Morey; la plupart de leurs
complices, s’ils en eurent un grand nombre, réussirent à échapper aux poursuites de la justice : pour eux, ils furent arrêtés, jugés,
et payèrent de leur vie le sang de tant de victimes sacrifiées à une combinaison régicide. Quant à ceux qui avaient péri victimes
d’un si lâche attentat, leurs corps furent pieusement déposés à l’église Saint-Paul, dans une chapelle ardente, et, le b août,
les uns et les autres, sans distinction de rang, ni d’âge, ni de sexe, furent solennellement inhumés aux Invalides. Le convoi suivit
les boulevards, la rue Royale, la place et le pont de la Concorde et le quai d’Orsay; sur cette immense ligne étaient rangés les
régiments et les légions, déployant leurs drapeaux garnis de crêpes, et obéissant au signal de tambours voilés. Le premier cercueil
qui ouvrait la marche, était celui d’une jeune fille de seize ans; le dernier était celui de Mortier, duc de Trévise, l’un des douze
pairs du nouveau Charlemagne, échappé aux luttes gigantesques de la République et de l’Empire pour venir mourir à Paris, en
pleine paix, sous les coups d’un assassin. Le roi, les princes et les princesses de sa famille assistaient au service funèbre qui fut
célébré par Mgr de Quélen, archevêque de Paris. Peu de jours après, les Chambres ayant été convoquées, s’ouvrit la session qui
enfanta les « lois de septembre, » et donna au Gouvernement des armes légales dont il sut à peine se servir, et qui ne devaient
pas, quand le jour serait venu, empêcher sa chute.
En cette même année, de sinistre souvenir, on vit encore à Paris le scandale du procès de Lacenaire et de ses complices;
(
pendant plusieurs jours, un assassin, homme de goût et poète, fut admis à dérouler en public la liste de ses crimes, à prendre
à parti Tordre social et à glacer d’horreur les curieux qu’émerveillaient ses bonnes manières et sa présence d’esprit. Les théâtres
donnèrent un grand nombre de pièces nouvelles, parmi lesquelles il s’en trouva fort peu dignes d’être sauvées de l’oubli. Citons
néanmoins la Juive, de M. Halévy, et le Don Juan d’Autriche, de M. Casimir Delavigne. Au salon de peinture, on remarqua les
Funérailles de Marceau, belle toile de M. Bouchot; le Léonard de Vinci, de M. Gigoux; le Dante et Virgile-, de M. Ary Scheffer;
le Christ au Tombeau, de M. Signol.
En 1836, la période des régicides fut continuée par Alibaud, agent des sociétés secrètes : le 26 juin, au moment où le roi des
Français sortait des Tuileries, cet assassin s’embusqua sous le guichet du Pont-Royal et fit feu sur Louis-Philippe. Personne ne
fut blessé, et l’auteur du crime, mis en arrestation, fut traduit devant la Cour des Pairs, condamné à mort et exécuté. Son supplice
n’intimida point la déplorable race des meurtriers politiques. Le 27 décembre 1836, le jour même où le roi se rendait au
Palais-Législatif pour ouvrir la session, un sicaire de bas étage, nommé Meunier, tira sur lui, presque à bout portant, un coup
de pistolet. Cette odieuse tentative échoua comme l’autre. Dieu qui réservait Louis-Philippe aux humiliations de la défaite et de
l’exil, ne permettait pas que sa destinée s’accomplît par la main d’un régicide.
En cette même année, le 29 juillet, eut lieu solennellement à Paris l’inauguration de l’arc de triomphe de l’Étoile. De bonne
heure la foule avait envahi tous les abords de ce gigantesque monument. A sept heures du matin, en présence du président du
conseil et du ministre de l’intérieur, on enleva les toiles qui voilaient les sculptures, et la population put contempler à loisir tous
les détails de l’édifice consacré à la gloire de la patrie. Sous les voûtes et sur les parois de l’arc de triomphe, étaient inscrits les
noms de trois cent quatre-vingts glorieux faits d’armes, ceux de cent vingt-six officiers généraux, ceux de trente corps d’armée.
L’arc de triomphe résume à lui seul toute l’histoire militaire de la France de 1792 à 1816. Il n’existe dans le monde aucun
monument de ce genre ayant des proportions aussi colossales : de la base au sommet il a 60 mètres. Avec sa riche et sévère
décoration, il attire les yeux, saisit les esprits, fait battre les cœurs et est pour tous un objet d’intarissable admiration et de
réflexions profondes.
Un autre monument ajouta à la splendeur de Paris, en cette même année 1836; nous voulons parler de l’obélisque de Luxor,
jadis élevé par le grand Sésostris, et dont le vice-roi d’Égypte avait fait don au roi des Français. Embarqué, le 16 avril 1831,
sur le Nil, remorqué jusqu’à Rosette, il ne fut transporté en France que le 10 mai 1833, et le 23 décembre de la même année,
le vaisseau étroit et allongé qui en était chargé vint s’amarrer près du pont de la Concorde. Ce jour-là donc, l’obélisque où
Rhamsès II (Sésostris) avait fait graver ses victoires sur des matériaux plus durs que le bronze, enlevé à l’Egypte ruinée, était
dans la capitale de la France, foyer et centre splendide d’une civilisation plus merveilleuse encore que celle dont s’était enorgueillie
Thèbes aux cent portes. Restait à l’élever et à le placer sur le haut piédestal érigé pour le recevoir au milieu de la place de la
Concorde. Cette opération, dirigée par M. Lebas, eut lieu le 26 octobre 1836 , en présence du roi des Français, du roi des
Belges, des princes de leur famille et d’un concours immense de peuple. La science eut besoin de surmonter beaucoup de difficultés
pour amener sur sa base étroite ce monolithe dont le poids dépasse 260,000 kilogrammes. Commencée à onze heures du matin,
l’opération fut terminée à trois heures, au bruit des acclamations de la foule, et Paris compta une magnificence de plus.
 
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