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Audiganne, Armand; Benoist, Philippe [Ill.]
Paris dans sa splendeur: monuments, vues, scènes historiques, descriptions et histoire$ddessins et lithographies par MM. Philippe Benoist [und 17 weitere] ; texte par MM. Audiganne [und 23 weitere] (3ième volume): Histoire de Paris - environs de Paris — Paris: Henri Charpentier, 1861

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https://doi.org/10.11588/diglit.71015#0182

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PARIS DANS SA SPLENDEUR.

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les gardes nationales de la Normandie, de l’Artois, de la Flandre, de la Bretagne, de l’Anjou, de l’Orléanais aecourant au secours
de Paris, traversaient la ville, enseignes déployées et au bruit du tambour, et les habitants de la capitale applaudissaient du haut
des fenêtres en les voyant aller au combat.
Dans la journée du 2b juin (le dimanche dans l’octave de la Fête-Dieu), une victime, illustre entre toutes, tomba à son tour.
Mgr Denis Affre, archevêque de Paris, après avoir obtenu l’assentiment du général Cavaignac, se dirigea vers le théâtre de
l’insurrection, et, à huit heures du soir, se présenta sur la place de la Bastille pour porter des paroles de paix aux insurgés. Il
était seul, à pied, accompagné de ses deux grands vicaires, et s’entretenait avec eux en prononçant ces paroles saintes: Le
bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. Précédé d’un parlementaire qui portait une branche verte en signe de réconciliation,
il monta sur une barricade et fut écouté avec respect. Comme il parlait encore, un coup de feu se fit entendre et donna l’alarme;
aussitôt la fusillade s’engagea de nouveau, et frappé par une balle dirigée contre lui d’une fenêtre, l’archevêque martyr tomba
blessé mortellement. Les insurgés, au pouvoir desquels il se trouvait alors, le transportèrent chez M. le curé des Quinze-Vingts,
et l’un d’eux, qui était médecin, mit un appareil sur la blessure; le lendemain, des négociations ayant été ouvertes, on rapporta
Mgr Affre à l’archevêché, où tous les soins de l’art lui furent prodigués, mais ce fut en vain. Après deux jours de cruelles
souffrances, le vénérable prélat rendit le dernier soupir. « Demandez à Dieu, écrivit le général Cavaignac au clergé, que ce sang
soit le dernier versé. » Ce vœu, qui avait été le dernier exprimé par Mgr Affre, fut exaucé, et les insurgés, accablés sous le double
sentiment du remords et de l’impuissance, se déterminèrent enfin à poser les armes. Telles furent les sanglantes journées de juin
dont le souvenir douloureux ne s’effacera jamais du cœur des citoyens de Paris.
Au milieu de ces redoutables circonstances, f Assemblée Nationale Constituante garda une attitude digne et courageuse. Plusieurs
de ses membres périrent noblement pour la cause de l’ordre. Les autres, continuant de siéger dans l’enceinte législative, reçurent
la démission du pouvoir exécutif, mirent Paris en état de siège, et confièrent l’administration politique et militaire au général
Cavaignac, alors investi du commandement de l’armée, et qui, sous le titre modeste de président du conseil, prit en main le
gouvernement de la France.

PARIS SOUS LE GÉNÉRAL GAVAIGNAC. — ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.
25 JUIN — 20 DÉCEMBRE 1848.
es partis enterrèrent leurs morts; on vit sous la république ce qui n’avait été vu à aucune époque de notre
histoire, les accusés confondus en masse avec les coupables, et la bataille se prolonger longtemps après la victoire.
Durant le combat, on avait arrêté plusieurs milliers d’hommes, la plupart dans les rangs de l’émeute, un assez
ggr gran(i nombre sur de simples indices grossis par la peur, sur la foi de dénonciations vagues, parmi les curieux obstinés à
se rapprocher du théâtre delà lutte. Il était impossible de procéder au jugement de ces multitudes. L’Assemblée Constituante
prit une détermination inouïe qui rappelait les votes de la Convention; elle décréta la transportation en masse de tous ceux qui
avaient été arrêtés les armes à la main, et ce décret fut appliqué à une foule d’hommes soupçonnés ou suspects. En attendant
l’heure de leur départ, on les entassa dans les prisons et jusque dans le souterrain de la terrasse du bord de l’eau. Les premiers
jours de leur détention furent très-douloureux; la plupart d’entr’eux manquaient d’air et de pain; c’étaient là les tristes conséquences
de la guerre civile. Cependant, l’état de siège fut maintenu jusqu’au retour complet de la sécurité publique, et, durant ce régime
de transition, la police et faction judiciaire appartinrent à l’épée; différents journaux furent supprimés ou suspendus; on ferma
les clubs; on mit l’insurrection au ban de la France, et la population paisible espéra un meilleur avenir.
Quand cessa le régime militaire, plusieurs lois, décrétées par fAssemblée Nationale, avaient entouré l’ordre de garanties et
confié des moyens de répression au gouvernement régulier. L’administration de Paris organisa des cérémonies funèbres
très-imposantes en mémoire de ceux qui avaient péri pour la cause des lois, et un service fut célébré sur la place de la Concorde.
Longtemps encore on maintint à Paris des masses considérables de troupes, on les fit camper sous des tentes ou sous des abris
élevés à la hâte. Paris présenta l’aspect d’une immense place en état de guerre. Cette situation se prolongea jusqu’au mois
de septembre.
Cependant, l’Assemblée Nationale mettait à profit le repos qui lui était donné pour rédiger une constitution. Il n’entre pas dans
notre mission de raconter les longues et incohérentes séances qui furent consacrées à ce travail. L’émeute se taisait dans les
carrefours; elle prenait sa revanche au Palais-Bourbon; là, chaque système, chaque théorie plus ou moins révolutionnaire, plus
ou moins incompatible avec l’ordre social, se produisait audacieusement au grand jour de la tribune et obtenait les honneurs de
la discussion. Ces idées subversives, ainsi proclamées par les chefs des écoles, descendaient dans les masses, et, sans ajouter un
 
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