ENVIRONS DE PARIS.
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aller étudier sur nature le débardeur, F équarrisseur et le chiffonnier. C’est ainsi que tous les types se rencontrent dans ce grand
pandœmonium parisien, et que les environs de la grande ville présentent des échantillons de toutes les populations qui se pressent
dans son vaste sein. ...
Gentiely. — La Maison-Blanche et la Glacière donnent à Gentilly, auquel on les joint, une véritable importance. La
Maison-Blanche est, à elle seule, un gros village qui commence à la barrière de Fontainebleau. Ses deux rangées de maisons
auxquelles se mêlent trop de cabarets, bordent cette magnifique route d’Italie, conduite à travers la France et la Suisse, et
par-dessus le Simplon, de Paris à Milan, où elle aboutit à l’arc-de-triomphe de la Paix, construit sous Napoléon. — La Glacière
doit son nom aux glaces que l’on recueille en hiver dans les prairies arrosées par la Bièvre. Les amateurs de traîneaux et de
patins l’ont abandonnée depuis que les lacs et les rivières du bois de Boulogne ont si victorieusement attiré, de l’autre côté de
l’Étoile, toute l’élégance,- toute la fashion et tout le sport de la capitale.
Le Petit-Montrouge est situé dans un paysage assez triste, et ses deux monuments, l’hospice de La Rochefoucauld et la -
mairie — une grosse bâtisse qui coûte un million — n’auraient pas la vertu d’amener le touriste dans son sein, si l’entrée des
Catacombes ne se trouvait à sa barrière, dans le bâtiment de l’Octroi. Il faut obtenir l’autorisation des ingénieurs de la ville de
Paris, et armé de philosophie, descendre dans cette cité des morts, où l’on marche sur la poussière qui fut homme, entre de
longues murailles d’ossements. ' .-
Vaugirard, qu’il ne faut pas prendre pour Rome, à l’exemple du singe de La Fontaine, est aujourd’hui une grande localité
insignifiante. Ce fut d’abord une étable à bœufs, nommée Valboistron. (Les étymologistes retrouveront aisément dans cette
appellation les trois mots bos, cales et stare.) — Au XIIIe siècle, Gérard de Moret, abbé de Saint-Germain, y fit bâtir une
maison pour les moines convalescents de sa communauté. Valboistron s’appela depuis Valgérard — puis Vaulgirard — puis
Vaugirard. C’est à Vaugirard que les huguenots tramèrent, en 1560, la conjuration d’Amboise. — Deux siècles plus tard, Babœuf
et ses complices y préparèrent le renversement du Directoire, qui fut plus fort et plus habile qu’eux.
Mais Vaugirard a des souvenirs plus pacifiques : c’est à Vaugirard que l’abbé Olier, au milieu du XVIIe siècle, fonda cet
illustre séminaire de Saint-Sulpice, une des gloires de l’Église de France. Il faut citer encore le beau collège connu sous le nom
d’institution Poiloux, dirigé aujourd’hui par les jésuites, et très-aristocratiquement fréquenté.
Grenelle n’a pas l’antiquité de Vaugirard; mais la population s’y accroît dans une proportion des plus rapides. A la fin du
FORTIFICATIONS.
XVIIIe siècle, il n’y avait sur son emplacement que quelques maisons disséminées; ce fut plus tard une ville de près de quinze
mille âmes. Sa poudrière qui a sauté (31 août 1794), l’échauffourée du 10 septembre 1796, dans laquelle un certain nombre
de jacobins tentèrent de renverser le Directoire, qui les fit prendre, déporter et fusiller, voilà toute l’histoire de Grenelle.
— Ajoutons que. sa plaine est le théâtre ordinaire des exécutions militaires. — Mallet et ses complices, Labédoyère et bien
d’autres, y sont tombés sous la balle des soldats. Ni la mairie, ni le théâtre ne sont-de bien remarquables monuments; mais
l’église, malgré les styles hybrides que l’on y rencontre, attire et retient le regard: son clocher a un aspect étrange, et son
porche à trois arcades ne manque pas de caractère.
En dedans et tout près des fortications, sur la rive droite de Batignolles à Ivry, circule le chemin de fer de ceinture. Cette
voie, destinée aux voyageurs, mais surtout aux marchandises, est établie partie à Ciel ouvert et partie sous terre. Elle relie
entr’elles les grandes lignes ferrées du Havre, du Nord, de l’Est, de Lyon et d’Orléans, et communique même avec la ligne de
l’OuesC au moyen du chemin de fer de Versailles, rive droite, qui rejoint celui de la rive gauche, à Chaville et Viroflay.
insi que nous le disions tout-à-l’heure, ce que l’on pressentait depuis si longtemps vient de s’accomplir. La banlieue
parisienne n’existe plus que dans le souvenir de ses habitants. Toutes les localités que nous venons de parcourir
vont être réunies'à Paris, dont les fortifications seront alors la limite naturelle, et qui va compter désormais
vingt arrondissements. • -.
^2* Aux différentes époques de notre histoire, on a tenté de fortifier Paris. Plus d’une fois la capitale de la France a été entourée
d’une ceinture‘de murailles; plus d’une fois aussi c’est à ses murailles qu’elle a dû son salut. Est-il besoin de citer des époques
et des noms présents à tous les souvenirs: les Normands arrêtés devant nos fortifications, en 885, le roi d’Angleterre, en 1359,
le comte de Charolais, en 1464, le duc de Bourgogne, en 1472? — Henri III, tenu en échec devant ses portes, et Henri IV,
obligé d’en faire le siège? A chaque nouvel agrandissement, les fortifications de Paris étaient détruites, puis rebâties plus loin.
Mais, à partir de Louis XIV, leur construction parut une œuvre si coûteuse, qu’on n’osa point l’entreprendre. Sans doute il valait
2">> p. — Ap. " 4
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aller étudier sur nature le débardeur, F équarrisseur et le chiffonnier. C’est ainsi que tous les types se rencontrent dans ce grand
pandœmonium parisien, et que les environs de la grande ville présentent des échantillons de toutes les populations qui se pressent
dans son vaste sein. ...
Gentiely. — La Maison-Blanche et la Glacière donnent à Gentilly, auquel on les joint, une véritable importance. La
Maison-Blanche est, à elle seule, un gros village qui commence à la barrière de Fontainebleau. Ses deux rangées de maisons
auxquelles se mêlent trop de cabarets, bordent cette magnifique route d’Italie, conduite à travers la France et la Suisse, et
par-dessus le Simplon, de Paris à Milan, où elle aboutit à l’arc-de-triomphe de la Paix, construit sous Napoléon. — La Glacière
doit son nom aux glaces que l’on recueille en hiver dans les prairies arrosées par la Bièvre. Les amateurs de traîneaux et de
patins l’ont abandonnée depuis que les lacs et les rivières du bois de Boulogne ont si victorieusement attiré, de l’autre côté de
l’Étoile, toute l’élégance,- toute la fashion et tout le sport de la capitale.
Le Petit-Montrouge est situé dans un paysage assez triste, et ses deux monuments, l’hospice de La Rochefoucauld et la -
mairie — une grosse bâtisse qui coûte un million — n’auraient pas la vertu d’amener le touriste dans son sein, si l’entrée des
Catacombes ne se trouvait à sa barrière, dans le bâtiment de l’Octroi. Il faut obtenir l’autorisation des ingénieurs de la ville de
Paris, et armé de philosophie, descendre dans cette cité des morts, où l’on marche sur la poussière qui fut homme, entre de
longues murailles d’ossements. ' .-
Vaugirard, qu’il ne faut pas prendre pour Rome, à l’exemple du singe de La Fontaine, est aujourd’hui une grande localité
insignifiante. Ce fut d’abord une étable à bœufs, nommée Valboistron. (Les étymologistes retrouveront aisément dans cette
appellation les trois mots bos, cales et stare.) — Au XIIIe siècle, Gérard de Moret, abbé de Saint-Germain, y fit bâtir une
maison pour les moines convalescents de sa communauté. Valboistron s’appela depuis Valgérard — puis Vaulgirard — puis
Vaugirard. C’est à Vaugirard que les huguenots tramèrent, en 1560, la conjuration d’Amboise. — Deux siècles plus tard, Babœuf
et ses complices y préparèrent le renversement du Directoire, qui fut plus fort et plus habile qu’eux.
Mais Vaugirard a des souvenirs plus pacifiques : c’est à Vaugirard que l’abbé Olier, au milieu du XVIIe siècle, fonda cet
illustre séminaire de Saint-Sulpice, une des gloires de l’Église de France. Il faut citer encore le beau collège connu sous le nom
d’institution Poiloux, dirigé aujourd’hui par les jésuites, et très-aristocratiquement fréquenté.
Grenelle n’a pas l’antiquité de Vaugirard; mais la population s’y accroît dans une proportion des plus rapides. A la fin du
FORTIFICATIONS.
XVIIIe siècle, il n’y avait sur son emplacement que quelques maisons disséminées; ce fut plus tard une ville de près de quinze
mille âmes. Sa poudrière qui a sauté (31 août 1794), l’échauffourée du 10 septembre 1796, dans laquelle un certain nombre
de jacobins tentèrent de renverser le Directoire, qui les fit prendre, déporter et fusiller, voilà toute l’histoire de Grenelle.
— Ajoutons que. sa plaine est le théâtre ordinaire des exécutions militaires. — Mallet et ses complices, Labédoyère et bien
d’autres, y sont tombés sous la balle des soldats. Ni la mairie, ni le théâtre ne sont-de bien remarquables monuments; mais
l’église, malgré les styles hybrides que l’on y rencontre, attire et retient le regard: son clocher a un aspect étrange, et son
porche à trois arcades ne manque pas de caractère.
En dedans et tout près des fortications, sur la rive droite de Batignolles à Ivry, circule le chemin de fer de ceinture. Cette
voie, destinée aux voyageurs, mais surtout aux marchandises, est établie partie à Ciel ouvert et partie sous terre. Elle relie
entr’elles les grandes lignes ferrées du Havre, du Nord, de l’Est, de Lyon et d’Orléans, et communique même avec la ligne de
l’OuesC au moyen du chemin de fer de Versailles, rive droite, qui rejoint celui de la rive gauche, à Chaville et Viroflay.
insi que nous le disions tout-à-l’heure, ce que l’on pressentait depuis si longtemps vient de s’accomplir. La banlieue
parisienne n’existe plus que dans le souvenir de ses habitants. Toutes les localités que nous venons de parcourir
vont être réunies'à Paris, dont les fortifications seront alors la limite naturelle, et qui va compter désormais
vingt arrondissements. • -.
^2* Aux différentes époques de notre histoire, on a tenté de fortifier Paris. Plus d’une fois la capitale de la France a été entourée
d’une ceinture‘de murailles; plus d’une fois aussi c’est à ses murailles qu’elle a dû son salut. Est-il besoin de citer des époques
et des noms présents à tous les souvenirs: les Normands arrêtés devant nos fortifications, en 885, le roi d’Angleterre, en 1359,
le comte de Charolais, en 1464, le duc de Bourgogne, en 1472? — Henri III, tenu en échec devant ses portes, et Henri IV,
obligé d’en faire le siège? A chaque nouvel agrandissement, les fortifications de Paris étaient détruites, puis rebâties plus loin.
Mais, à partir de Louis XIV, leur construction parut une œuvre si coûteuse, qu’on n’osa point l’entreprendre. Sans doute il valait
2">> p. — Ap. " 4