HISTOIRE. - PARIS ANCIEN.
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Saint-Gervais, et que les citoyens de Paris avaient en grande vénération, fut indignement mutilée par des Luthériens; le peuple
protesta en masse, par des cérémonies expiatoires, contre cet attentat sacrilège, et François Ier remplaça l’image détruite, par une
statue d’argent. Depuis lors, chaque année du règne de ce roi fut marquée', à Paris, par le supplice de quelques sectaires; mais
François Ier, en laissant s’accomplir les décisions de la justice contre les Luthériens, ne s’y déterminait qu’à regret, et comme
contraint par l’opinion des masses qu’il n’osait heurter de front.
Détournons nos souvenirs sur de moins douloureuses images. François Ier qui, dans le cours de ses guerres, avait vu et admiré
la splendeur artistique de l’Italie, attira à sa cour les savants, les peintres, les sculpteurs, les artistes de tout genre, et convia
leur génie à illustrer Paris et la France, en multipliant les chefs-d’œuvre. En 1313, sous son règne, on fonda le collège de la
Merci, situé rue des Sept-Voies, et où s’établirent les religieux de Notre-Dame de la Rédemption; peu d’années après, le collège
du Mans fut construit, rue de Reims, sur l’emplacement de l’ancien hôtel des évêques du Mans. Vers le même temps (1320), on
reconstruisit l’église paroissiale de Saint-Merry, qui tombait en ruine; et, bien que la mode de l’architecture grecque commençât
à prédominer, les artistes qui élevèrent ce monument demeurèrent fidèles aux traditions de l’art catholique. Au Marais, dans la rue
Porte-Foin, et près du Temple, on bâtit, en 1336, l’hospice des Enfants-Dieu, nom que François Ier voulut donner aux enfants
trouvés; mais le peuple, à cause de la couleur des vêtements de ces orphelins, désigna la nouvelle maison sous le nom d’hospice
des Enfants-Rouges. En 1318, François Ier acheta de Villeroi, secrétaire des finances, un hôtel situé hors de Paris, entre cour
et jardin, et qu’on appelait les Tuileries; plus tard, sur l’emplacement de ce domaine, on éleva l’immense palais qui servit de
résidence aux derniers Valois et aux Bourbons. Sous le même règne, on répara ou l’on reconstruisit les églises de Saint-Victor,
de Saint-Étienne-du-Mont, de Saint-Gervais, de Saint-Eustache, de Saint-Jacques-la-Boucherie, de Saint-Jean-en-Grève et de
Saint-Germain-le-Vieux.
L’enceinte, construite à Paris sous Charles V, commencée par Étienne Marcel et terminée sous Charles VI, en 1383, subsistait
encore. Nous en avons déterminé plus haut l’étendue et le parcours, et nous avons constaté que, commençant, sur la rive droite,
à F Arsenal, elle se prolongeait en demi-cercle, en suivant une ligne assez peu distante de nos boulevards du Nord, et qui,
arrivée à la porte Saint-Honoré, descendait brusquement le long de la rue Saint-Nicaise, et venait aboutir à la Seine, à la
Porte-Neuve, à peu près vers le lieu où s’ouvre aujourd’hui le guichet établi à l’extrémité de la grille du Carrousel. Mais, de
Charles VI à François Ier, si l’on n’avait point donné à la Ville proprement dite (aux quartiers de la rive droite) un développement
plus vaste, du moins avait-on couvert de rues, d’hôtels, de maisons et d’églises les grands espaces vides compris dans l’enceinte
du XIVe siècle, et qui, au temps d’Étienne Marcel, n’étaient encore que des plaines cultivées (des cultures) ou des vignobles.
Des différentes îles de la Seine, à Paris, la Cité, le vieux berceau de la ville, était seule peuplée d’habitations et d’édifices; les
autres n’offraient aux regards que des prairies. Les quartiers de la rive gauche, qu’on appelait V Université, étaient enfermés dans
une enceinte de tours, depuis la Tournelle jusqu’à la tour de Nesle, points qui correspondent, dans le Paris moderne, l’un à la
Halle aux Vins, l’autre à l’institut. Cette partie de l’enceinte embrassait la montagne Sainte-Geneviève. Sur les bords de la Seine
existaient des quais fort irréguliers, fort inégaux et fréquemment interrompus par des constructions particulières.
Du côté du Nord, les points culminants de la ville étaient les portes Saint-Martin et Saint-Denis; an Midi, la porte Papale,
située non loin de l’emplacement actuel du Panthéon. Aux deux extrémités de Paris, le long de la rivière, s’élevaient les
quatre tours qui en gardaient l’entrée: d’un côté, la Tournelle et la tour de Nesle (rive gauche); de l’autre, la tour de Billy et
l’ancienne tour du Bois, plus tard appelée la Tour-Neuve. La Cité communiquait aux deux rives par cinq ponts, les seuls que
possédât alors Paris : trois à droite, sur le grand bras de la Seine, le pont Notre-Dame, le Pont-au-Change et le Pont-aux-Meuniers;
deux à gauche, sur le petit bras, le Petit-Pont et le pont Saint-Michel. Tous ces ponts étaient chargés de maisons. L’Université
avait six portes s’ouvrant sur la campagne, ou, pour mieux dire, sur les immenses amas de vilaines maisons et de ruelles boueuses
qui formaient alors les faubourgs Saint-Victor, Saint-Jacques et Saint-Marcel: c’étaient les portes Saint-Victor. Saint-Marcel,
Saint-Jacques, Saint-Michel, Saint-Germain et la porte de Nesle. La Ville, quoique d’une étendue quatre fois plus grande, n’avàit
également que six portes, appelées portes Saint-Antoine, du Temple, Saint-Martin, Saint-Denis, Montmartre et Saint-Honoré.
De ce côté, les faubourgs étaient vastes, mieux bâtis, et commençaient à former un nouveau Paris qui attendait son enceinte,
bâtie plus tard par Louis XIII. Tout autour des murailles flanquées de tours, courait un fossé large et profond, en partie rempli
d’eau et doublé sur la rive droite d’un arrière-fossé. Vus à vol d’oiseau, ces trois immenses fragments d’un même ensemble, la
Cité, l’Université, la Ville, formaient un inextricable labyrinthe de rues, de toits et de pignons; et comme aucune idée générale
n’avait présidé à la direction première de ces constructions, il était impossible de se rendre compte de leurs communications
et de leurs rapports. On voyait néanmoins, dans les quartiers du Nord et du Midi, deux grandes rues parallèles traverser l’ensemble
de Paris presqu’en ligne droite et perpendiculairement à la Seine : l’une, sous plusieurs noms différents, allait de la porte
Saint-Martin à la porte Saint-Jacques; l’autre, de la porte Saint-Denis à la porte Saint-Michel. Deux autres longues rues,
irrégulières dans leur parcours, mais parallèles à la Seine, traversaient les quartiers de la rive droite et ceux de la rive gauche:
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Saint-Gervais, et que les citoyens de Paris avaient en grande vénération, fut indignement mutilée par des Luthériens; le peuple
protesta en masse, par des cérémonies expiatoires, contre cet attentat sacrilège, et François Ier remplaça l’image détruite, par une
statue d’argent. Depuis lors, chaque année du règne de ce roi fut marquée', à Paris, par le supplice de quelques sectaires; mais
François Ier, en laissant s’accomplir les décisions de la justice contre les Luthériens, ne s’y déterminait qu’à regret, et comme
contraint par l’opinion des masses qu’il n’osait heurter de front.
Détournons nos souvenirs sur de moins douloureuses images. François Ier qui, dans le cours de ses guerres, avait vu et admiré
la splendeur artistique de l’Italie, attira à sa cour les savants, les peintres, les sculpteurs, les artistes de tout genre, et convia
leur génie à illustrer Paris et la France, en multipliant les chefs-d’œuvre. En 1313, sous son règne, on fonda le collège de la
Merci, situé rue des Sept-Voies, et où s’établirent les religieux de Notre-Dame de la Rédemption; peu d’années après, le collège
du Mans fut construit, rue de Reims, sur l’emplacement de l’ancien hôtel des évêques du Mans. Vers le même temps (1320), on
reconstruisit l’église paroissiale de Saint-Merry, qui tombait en ruine; et, bien que la mode de l’architecture grecque commençât
à prédominer, les artistes qui élevèrent ce monument demeurèrent fidèles aux traditions de l’art catholique. Au Marais, dans la rue
Porte-Foin, et près du Temple, on bâtit, en 1336, l’hospice des Enfants-Dieu, nom que François Ier voulut donner aux enfants
trouvés; mais le peuple, à cause de la couleur des vêtements de ces orphelins, désigna la nouvelle maison sous le nom d’hospice
des Enfants-Rouges. En 1318, François Ier acheta de Villeroi, secrétaire des finances, un hôtel situé hors de Paris, entre cour
et jardin, et qu’on appelait les Tuileries; plus tard, sur l’emplacement de ce domaine, on éleva l’immense palais qui servit de
résidence aux derniers Valois et aux Bourbons. Sous le même règne, on répara ou l’on reconstruisit les églises de Saint-Victor,
de Saint-Étienne-du-Mont, de Saint-Gervais, de Saint-Eustache, de Saint-Jacques-la-Boucherie, de Saint-Jean-en-Grève et de
Saint-Germain-le-Vieux.
L’enceinte, construite à Paris sous Charles V, commencée par Étienne Marcel et terminée sous Charles VI, en 1383, subsistait
encore. Nous en avons déterminé plus haut l’étendue et le parcours, et nous avons constaté que, commençant, sur la rive droite,
à F Arsenal, elle se prolongeait en demi-cercle, en suivant une ligne assez peu distante de nos boulevards du Nord, et qui,
arrivée à la porte Saint-Honoré, descendait brusquement le long de la rue Saint-Nicaise, et venait aboutir à la Seine, à la
Porte-Neuve, à peu près vers le lieu où s’ouvre aujourd’hui le guichet établi à l’extrémité de la grille du Carrousel. Mais, de
Charles VI à François Ier, si l’on n’avait point donné à la Ville proprement dite (aux quartiers de la rive droite) un développement
plus vaste, du moins avait-on couvert de rues, d’hôtels, de maisons et d’églises les grands espaces vides compris dans l’enceinte
du XIVe siècle, et qui, au temps d’Étienne Marcel, n’étaient encore que des plaines cultivées (des cultures) ou des vignobles.
Des différentes îles de la Seine, à Paris, la Cité, le vieux berceau de la ville, était seule peuplée d’habitations et d’édifices; les
autres n’offraient aux regards que des prairies. Les quartiers de la rive gauche, qu’on appelait V Université, étaient enfermés dans
une enceinte de tours, depuis la Tournelle jusqu’à la tour de Nesle, points qui correspondent, dans le Paris moderne, l’un à la
Halle aux Vins, l’autre à l’institut. Cette partie de l’enceinte embrassait la montagne Sainte-Geneviève. Sur les bords de la Seine
existaient des quais fort irréguliers, fort inégaux et fréquemment interrompus par des constructions particulières.
Du côté du Nord, les points culminants de la ville étaient les portes Saint-Martin et Saint-Denis; an Midi, la porte Papale,
située non loin de l’emplacement actuel du Panthéon. Aux deux extrémités de Paris, le long de la rivière, s’élevaient les
quatre tours qui en gardaient l’entrée: d’un côté, la Tournelle et la tour de Nesle (rive gauche); de l’autre, la tour de Billy et
l’ancienne tour du Bois, plus tard appelée la Tour-Neuve. La Cité communiquait aux deux rives par cinq ponts, les seuls que
possédât alors Paris : trois à droite, sur le grand bras de la Seine, le pont Notre-Dame, le Pont-au-Change et le Pont-aux-Meuniers;
deux à gauche, sur le petit bras, le Petit-Pont et le pont Saint-Michel. Tous ces ponts étaient chargés de maisons. L’Université
avait six portes s’ouvrant sur la campagne, ou, pour mieux dire, sur les immenses amas de vilaines maisons et de ruelles boueuses
qui formaient alors les faubourgs Saint-Victor, Saint-Jacques et Saint-Marcel: c’étaient les portes Saint-Victor. Saint-Marcel,
Saint-Jacques, Saint-Michel, Saint-Germain et la porte de Nesle. La Ville, quoique d’une étendue quatre fois plus grande, n’avàit
également que six portes, appelées portes Saint-Antoine, du Temple, Saint-Martin, Saint-Denis, Montmartre et Saint-Honoré.
De ce côté, les faubourgs étaient vastes, mieux bâtis, et commençaient à former un nouveau Paris qui attendait son enceinte,
bâtie plus tard par Louis XIII. Tout autour des murailles flanquées de tours, courait un fossé large et profond, en partie rempli
d’eau et doublé sur la rive droite d’un arrière-fossé. Vus à vol d’oiseau, ces trois immenses fragments d’un même ensemble, la
Cité, l’Université, la Ville, formaient un inextricable labyrinthe de rues, de toits et de pignons; et comme aucune idée générale
n’avait présidé à la direction première de ces constructions, il était impossible de se rendre compte de leurs communications
et de leurs rapports. On voyait néanmoins, dans les quartiers du Nord et du Midi, deux grandes rues parallèles traverser l’ensemble
de Paris presqu’en ligne droite et perpendiculairement à la Seine : l’une, sous plusieurs noms différents, allait de la porte
Saint-Martin à la porte Saint-Jacques; l’autre, de la porte Saint-Denis à la porte Saint-Michel. Deux autres longues rues,
irrégulières dans leur parcours, mais parallèles à la Seine, traversaient les quartiers de la rive droite et ceux de la rive gauche: