9o CEREMONIES, MCEURS ET COUTUMES
le compter parmi les Docteurs de la vraie Eghse. Viclef y tiendra sa place malgré
,ses impiétés, & quoiqu'en assurant qu'on n'est plus ni Roi, ni Seigneur, ni Magistrat,
ni Prêtre , ni Pasteur , dès qu'on est en péché mortel, il ait également renversé l'or-
dre du monde & celui de l'Eglise , & qu'il ait rempli l'un èc l'autre de sédition &
de troubles. Jean Hus aura suivi cette doctrine, & de plus jusqu'à la fin de Tes jours
il aura dit la Mésie &c adoré l'Eucharistie : mais parcequ'en d'autres points il aura com-
batu l'Eglise Romaine, les Réformés le mettront au nombre de leurs Martyrs. En-
fin pourvu qu'on ait murmuré contre quelqu'un de nos dogmes, êc surtout qu'on ait
grondé ou crié contre le Pape, quel qu'on ait été d'ailleurs , & quelque opinion
qu'on ait soutenue , on est compté parmi les PrédécesTeurs des Protestans, & on est
jugé digne d'entretenir la succession de leur Eglise.
Mais de tous ces prédécesseurs que les Protestans veulent se donner, les Vaudois
& les Albigeois sont les mieux traités , du moins par les Calvinistes. Que préten-
dent-ils par-là ? Ce secours est foible. Faire remonter leur antiquité de quelques sïé-
cles, r car les Vaudois, à leur accorder sélon leurs desirs Pierre de Bruis & son dis-
ciple Henri , ne vont pas plus haut que le siécle onzième ) & là tout à coup de-
meurer court sans pouvoir avancer plus loin , c'en: être contraint de s'arrêter trop
au dessous du tems des Apôtres ; c'est tirer son secours de gens aussi foibles & aussi
embarrasfés que vous ; à qui on demande, comme à vous, leurs prédécessèurs -, qui
ne peuvent, non plus que vous, en montrer aucun ; qui par eonséquent sont coupa-
bles du même crime d'innovation dont on vous accule : de sorte que nous les nom-
mer dans ce procès, c'est nommer vos complices, &. non pas des témoins qui puis.
sent légitimement déposer de votre innocence.
Cependant ce secours tel quel est embrassé avec ardeur par les Calvinistes ; & en
voici la raison. Ç'est que les Vaudois & les Albigeois ont formé des Eglises sèpa-
rées de Rome, ce que Bérenger & Viclef n'ont jamais fait. C'est donc en quelque
façon se faire une suite d'Eglise, que de se les donner pour prédécesseurs. Comme
l'origine de ces Eglises, aussi-bien que la créance dont elles faiioient professîon, étoit
encore assez obscure du tems de la Réformation prétendue, on faiioit accroire au
peuple qu'elles étoient d'une très-grande antiquité, & qu'elles venoient des premiers
sïecles du Christianisme -, & Beze n'a pas craint d'avancer {,/) non-seulement «que
" les Vaudois de tems immémorial s'étoient opposés aux abus de l'Eglise Romaine «
mais encore qu'en l'an x 54. r. »> ils Couchèrent par A#e public en bonne forme la
» doctrine à eux enseignée de père en fils depuis l'an 1 2 o. après la Nativité de Je-
» sus-Çhrist, epmme ils l'avoient toujours entendu par leurs anciens & ancêtres «.
Nous examinerons dans la suite la vérité ou la fausteté de ce fait. En attendant,
nous avons crû ce préambule nécesTaire pour faire voir, que si dans les commence-
mçns de la Réforme, le grand bruit qu'elle fît d'abord dans le monde joint à l'a-
mour de la nouveauté 8c a l'envie de se soutenir , porta quelques Sentes déjà sépa-
rées de l'Eglise à souhaiter de se réunir avee elle , les Protestans de leur côté se
trouvèrent très-bien disposés à les recevoir, pareeque quelque obscurs, quelque mé-
prisables ou peu nombreux que fusîënt ces Sectaires , ils avoient l'avantage d'avoir
précédé la Réformation , & pouvoient ainsi servîr par leur réunion à faire remonter
un peu plus haut l'origine de la nouvelle doctrine. Les deux plus remarquables de
ces réunions sont celles des Vaudois & des Bohémiens, tant pareequ'à la naissance
de la Réforme ils formoient déjà des espèces d'Eglises séparées de Rome , que par-
cequ'ils subsistent encore aujourd'hui, quoiqu'en petit nombre, cachés dans quelque
coin de la terre. C'est pourquoi après avoir traité dans cette séconde Partie de la
Religion des Anglicans & des Presbytériens , ou Puritains , nous dirons aussi un
mot de celle de ces Vaudois & de ces Frères de Bohème.
(a) mjt. Ecchjîaft. L,I. O. $V..£ 39,
le compter parmi les Docteurs de la vraie Eghse. Viclef y tiendra sa place malgré
,ses impiétés, & quoiqu'en assurant qu'on n'est plus ni Roi, ni Seigneur, ni Magistrat,
ni Prêtre , ni Pasteur , dès qu'on est en péché mortel, il ait également renversé l'or-
dre du monde & celui de l'Eglise , & qu'il ait rempli l'un èc l'autre de sédition &
de troubles. Jean Hus aura suivi cette doctrine, & de plus jusqu'à la fin de Tes jours
il aura dit la Mésie &c adoré l'Eucharistie : mais parcequ'en d'autres points il aura com-
batu l'Eglise Romaine, les Réformés le mettront au nombre de leurs Martyrs. En-
fin pourvu qu'on ait murmuré contre quelqu'un de nos dogmes, êc surtout qu'on ait
grondé ou crié contre le Pape, quel qu'on ait été d'ailleurs , & quelque opinion
qu'on ait soutenue , on est compté parmi les PrédécesTeurs des Protestans, & on est
jugé digne d'entretenir la succession de leur Eglise.
Mais de tous ces prédécesseurs que les Protestans veulent se donner, les Vaudois
& les Albigeois sont les mieux traités , du moins par les Calvinistes. Que préten-
dent-ils par-là ? Ce secours est foible. Faire remonter leur antiquité de quelques sïé-
cles, r car les Vaudois, à leur accorder sélon leurs desirs Pierre de Bruis & son dis-
ciple Henri , ne vont pas plus haut que le siécle onzième ) & là tout à coup de-
meurer court sans pouvoir avancer plus loin , c'en: être contraint de s'arrêter trop
au dessous du tems des Apôtres ; c'est tirer son secours de gens aussi foibles & aussi
embarrasfés que vous ; à qui on demande, comme à vous, leurs prédécessèurs -, qui
ne peuvent, non plus que vous, en montrer aucun ; qui par eonséquent sont coupa-
bles du même crime d'innovation dont on vous accule : de sorte que nous les nom-
mer dans ce procès, c'est nommer vos complices, &. non pas des témoins qui puis.
sent légitimement déposer de votre innocence.
Cependant ce secours tel quel est embrassé avec ardeur par les Calvinistes ; & en
voici la raison. Ç'est que les Vaudois & les Albigeois ont formé des Eglises sèpa-
rées de Rome, ce que Bérenger & Viclef n'ont jamais fait. C'est donc en quelque
façon se faire une suite d'Eglise, que de se les donner pour prédécesseurs. Comme
l'origine de ces Eglises, aussi-bien que la créance dont elles faiioient professîon, étoit
encore assez obscure du tems de la Réformation prétendue, on faiioit accroire au
peuple qu'elles étoient d'une très-grande antiquité, & qu'elles venoient des premiers
sïecles du Christianisme -, & Beze n'a pas craint d'avancer {,/) non-seulement «que
" les Vaudois de tems immémorial s'étoient opposés aux abus de l'Eglise Romaine «
mais encore qu'en l'an x 54. r. »> ils Couchèrent par A#e public en bonne forme la
» doctrine à eux enseignée de père en fils depuis l'an 1 2 o. après la Nativité de Je-
» sus-Çhrist, epmme ils l'avoient toujours entendu par leurs anciens & ancêtres «.
Nous examinerons dans la suite la vérité ou la fausteté de ce fait. En attendant,
nous avons crû ce préambule nécesTaire pour faire voir, que si dans les commence-
mçns de la Réforme, le grand bruit qu'elle fît d'abord dans le monde joint à l'a-
mour de la nouveauté 8c a l'envie de se soutenir , porta quelques Sentes déjà sépa-
rées de l'Eglise à souhaiter de se réunir avee elle , les Protestans de leur côté se
trouvèrent très-bien disposés à les recevoir, pareeque quelque obscurs, quelque mé-
prisables ou peu nombreux que fusîënt ces Sectaires , ils avoient l'avantage d'avoir
précédé la Réformation , & pouvoient ainsi servîr par leur réunion à faire remonter
un peu plus haut l'origine de la nouvelle doctrine. Les deux plus remarquables de
ces réunions sont celles des Vaudois & des Bohémiens, tant pareequ'à la naissance
de la Réforme ils formoient déjà des espèces d'Eglises séparées de Rome , que par-
cequ'ils subsistent encore aujourd'hui, quoiqu'en petit nombre, cachés dans quelque
coin de la terre. C'est pourquoi après avoir traité dans cette séconde Partie de la
Religion des Anglicans & des Presbytériens , ou Puritains , nous dirons aussi un
mot de celle de ces Vaudois & de ces Frères de Bohème.
(a) mjt. Ecchjîaft. L,I. O. $V..£ 39,