CORDOUE. 441
neveux de l'arbre majestueux auquel Addu-r-Rhaman adressait la
stance que voici :
Dans les airs élancé sur ta tige puissante,
Ici tu m'apparais et charme ce séjour,
Comme un rêve béni de la patrie absente....
Car nos sables brûlants ont gardé mon amour.
Nous ne saurions dire l'effet produit sur nous par ces palmiers si
chétifs , véritables enfants perclus, sans famille, sans tuteurs, n'ayant
d'autres consolations que de s'incliner sur des ruines pour y retrouver
des traces d'une commune origine.
Cordoue est une ville fort ancienne, déjà citée par Strabon sous le
nom de Cordoba et comme devant son origine à Marcellus. Une école
célèbre, académie ou gymnase, y conservait les anciens livres des Tur-
detains, leurs lois écrites en vers, leurs poésies, qui étaient également
leur histoire ; elle faisait des cours pour l'enseignement de la philosophie,
de l'art oratoire, de la morale et du grec. Ce fut là qu'étudièrent le
vieux Sénèque, qui composa un livre sur la manière de persuader;
Lucius An. Sénèque, précepteur de Néron; Gallien, fameux orateur,
oncle de Lucius Sénèque par sa mère; Acilius Lucanus, rhéteur très-
distingué, aïeul maternel du poëte Lucain; Portius Ladro, dont l'élo-
quence brilla dans Rome autant qu'elle avait brillé préalablement dans
Cordoue, mais dont il ne nous reste qu'une seule harangue; Manelus,
le maître du vieux Sénèque; Lucain, auteur de la Pharsale; Sénèque
le tragique; Sénèque l'historien, qui composa l'abrégé d'histoire ro-
maine connu sous le nom de Florus. Dans son plaidoyer pour le poëte
Archia, Cicéron mentionne plusieurs poëtes de Cordoue, alors célèbres,
et qu'il connaissait bien, ayant fait un voyage en Espagne. Parmi ces
poëtes se trouve Sextilius Henna, l'admirateur et l'ami de Cicéron.
Des Romains, Cordoue passa sous la puissance des Goths, qui lui
conservèrent ses monuments, sa religion, son université, et qui la
défendirent avec vaillance contre les Maures, jusqu'à ce qu'un berger
eût furtivement introduit dans son enceinte les soldats du prophète.
Sur la cité romaine s'éleva dès lors une cité nouvelle, et le neuvième
siècle la vit monter à l'apogée de sa gloire, quand Abdérame II en fit la
capitale de son nouveau royaume. Les historiens arabes contempo-
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neveux de l'arbre majestueux auquel Addu-r-Rhaman adressait la
stance que voici :
Dans les airs élancé sur ta tige puissante,
Ici tu m'apparais et charme ce séjour,
Comme un rêve béni de la patrie absente....
Car nos sables brûlants ont gardé mon amour.
Nous ne saurions dire l'effet produit sur nous par ces palmiers si
chétifs , véritables enfants perclus, sans famille, sans tuteurs, n'ayant
d'autres consolations que de s'incliner sur des ruines pour y retrouver
des traces d'une commune origine.
Cordoue est une ville fort ancienne, déjà citée par Strabon sous le
nom de Cordoba et comme devant son origine à Marcellus. Une école
célèbre, académie ou gymnase, y conservait les anciens livres des Tur-
detains, leurs lois écrites en vers, leurs poésies, qui étaient également
leur histoire ; elle faisait des cours pour l'enseignement de la philosophie,
de l'art oratoire, de la morale et du grec. Ce fut là qu'étudièrent le
vieux Sénèque, qui composa un livre sur la manière de persuader;
Lucius An. Sénèque, précepteur de Néron; Gallien, fameux orateur,
oncle de Lucius Sénèque par sa mère; Acilius Lucanus, rhéteur très-
distingué, aïeul maternel du poëte Lucain; Portius Ladro, dont l'élo-
quence brilla dans Rome autant qu'elle avait brillé préalablement dans
Cordoue, mais dont il ne nous reste qu'une seule harangue; Manelus,
le maître du vieux Sénèque; Lucain, auteur de la Pharsale; Sénèque
le tragique; Sénèque l'historien, qui composa l'abrégé d'histoire ro-
maine connu sous le nom de Florus. Dans son plaidoyer pour le poëte
Archia, Cicéron mentionne plusieurs poëtes de Cordoue, alors célèbres,
et qu'il connaissait bien, ayant fait un voyage en Espagne. Parmi ces
poëtes se trouve Sextilius Henna, l'admirateur et l'ami de Cicéron.
Des Romains, Cordoue passa sous la puissance des Goths, qui lui
conservèrent ses monuments, sa religion, son université, et qui la
défendirent avec vaillance contre les Maures, jusqu'à ce qu'un berger
eût furtivement introduit dans son enceinte les soldats du prophète.
Sur la cité romaine s'éleva dès lors une cité nouvelle, et le neuvième
siècle la vit monter à l'apogée de sa gloire, quand Abdérame II en fit la
capitale de son nouveau royaume. Les historiens arabes contempo-
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