ET DE LA CURIOSITE
211
pour la fondation, à Ptome, d’une Académie
américaine des Beaux-Arts. On cite notam-
ment parmi les souscripteurs, fondateurs de
l’Académie, MM. Pierpont Morgan, William
Vanderbilt et Henry Frick.
*** Le Musée métropolitain de New-York
vient d’acquérir une oeuvre capita'e de la
peinture espagnole : l’autel de saint André,
attribué au peintre catalan Luis Borassâ
(1390-1421). Cet important retable se compose
de cinq grands panneaux et de sept petits
placés au-dessous. Saint Antoine assis, tenant
une croix, en occupe le centre.
Au Musée du Louvre
Le Departement des pointures, au musée du
Louvre, vient d’avoir la bonne fortune de pouvoir
faire, avant l’ouverture de l’exposition G hardi n-
Fragonard, inaugurée mardi dernier, rue de Sèze,
une acquisition de première importance, digne
d’être accueillie et célébrée avec joie. Il s’agit de
deux peintures de Chardin, qui comptent parmi
les plus exceptionnelles et les plus rares de
l’exposition, si elles n’en sont même les deux
grands chefs-d’œuvre. Ce sont les portraits en
pendant des fils du banquier et joaillier Godefroy,
collectionneur et homme de goût sous Louis XV,
qui paraît avoir été ami ou protecteur de Chardin
à ses débuts : le plus âgé, prêt à jouer du violon,
assis devant une table où est posé sur un pupitre
un recueil de menuets; le plus jeune rendu dans
toute la grâce insouciante de son âge, écolier flâ-
neur, abandonnant travail et livre pour s’amuser
à regarder tourner une toupie. Malgré la célébrité
plus grande de l'Enfant au toton, seul exposé par
Chardin au Salon de 1738, presque aussitôt gravé
par Lépicié (1742) et reproduit par le maître lui-
même (une de ces répliques figure à l’exposition),
les deux œuvres sont d’égale importance et d’égale
valeur. Avec des mérites différents appropriés à
l’âge même des modèles, elles rivalisent d’éclat,
de fraîcheur, de délicatesse exquise. C’est la
nature et la vie même prise sur le vif ; et le Jeune
homme au violon, maintenant qu’il est définiti-
vement sorti de l’ombre, égalera bientôt son frère
en célébrité.
Ces deux admirables pendants proviennent, en
transmission directe, du dernier des frères survi-
vant, le charmant modèle du Toton, Auguste-Ga-
briel Godefroy, écuyer, contrôleur général de la
Marine, raffiné collectionneur comme son père
(il posséda, entre autres, Y Indifférent et la Finette
de Watteau), mort très âgé en 1813. On se rappelle
encore l’émotion qu’ils excitèrent, lorsqu’ils appa-
rurent pour la première fois en public, à l’Expo-
sition des Portraits de femmes et d’enfants, en
1897, à l'École des Beaux-Arts (1). La joie de les
revoir se double aujourd’hui de la certitude déli-
cieuse qu’on a désormais de ne plus les perdre
et de les voir entrer, après l’Exposition, dans la
demeure dont ils étaient dignes. Le Louvre, qui, en
dehors des merveilleux pastels du maître, ne pos-
(1) Voir l'article de M. Maurice Tourneux [Ga-
zette des Beaux-Arts, 1897, t. T, p. 402),
sédait rien encore de Chardin portraitiste {Le
Château de cartes, simple figure d’expression,
comptant à peine dans la série), vient de conquérir
d'emblée en ce genre, avec autant de clairvoyance
que d’énergie, deux pièces capitales et maîtresses,
destinées à occuper une place d’élite parmi les
chefs-d’œuvre de l’art français.
Les Récompenses des Salons
PRIX NATIONAL ET BOURSES DE VOYAGE
Le ronseil supérieur des Beaux-Arts s’est réuni
jeudi dernier au Grand Palais, sous la présidence
de M. Dujardin-Beaumetz, pour procéder à l’attri-
bution du prix du Salon ou prix National, et des
bourses de voyage.
Au premier tour de scrutin, le prix National a
été décerné, par 30 voix sur 49 votants, à M. Mar-
quet, sculpteur, qui a exposé au Salon des Artistes
français une statue d’enfant en marbre: Il n'est
pas de rose...
Les trois bourses de voyage disponibles pour la
peinture ont été attribuées à MM. Jonas, auteur
des deux toiles : Scène de grève et Les Marguilliers
(Salon des Artistes français) ; Humbert, auteur de
l'Aède (Salon des Artistes français), et Carrera,
auteur de Au jardin (Salon des Artistes français).
M. Jonas étant encore à l'École des Beaux-Arts,
où il travaille en loge pour le concours de peinture
du prix de Borne, il a été décidé, à l’unanimité,
que si M. Jonas obtenait le prix de Rome, la
bourse de voyage qui lui a été attribuée serait
reversée sur celui des candidats qui aurait obtenu
le plus de voix sur la liste. Elle écherrait dans ces
conditions à M. Jarnois.
Les bourses de la sculpture ont été attribuées à
MM. Ilalou (Société Nationale), Àlliot (Société des
Artistes français), et Maurice Favre (Société des
Artistes français).
Pour la gravure, la bourse de voyage a été attri-
buée à M. Cabaud (de la Société des Artistes fran-
çais), auteur d’une gravure au burin d’après un
Primitif flamand.
La bourse de voyage pour l’art décoratif a été
attribuée à M. Decœur (de la Société des Artistes
français).
PRIX DIVERS
Prix Henner. — Ce prix, d’une valeur de 3.000
francs, réservé à un artiste français, peintre
de figure, âgé de plus de trente ans, a été décerné
pour la première fois cette année. La Société des
Artistes français a procédé à son attribution par
les seins d’un jury composé des peintres de la
Société membres de l’Académie des Beaux-Arts et
ti'ulaires de la médaille d’honneur de peinture.
Le prix a été attribué, au troisième tour de scru
tin, par 8 voix, à M. Guinier, né à Paris, élève de
Benjamin-Constant et de M. Jules Lefebvre, qui a
exposé cette année Femme pensive et Jeune fille et
Pavots.
Des voix se sont portées à ces trois tours de
scrutin sur les noms de M. Dupny, Pierre, Muller
et Fouqueray.
Prix de la Société d'encouragement à l’Art et
à VIndustrie. — Le jury spécial constitué par
la Société des Artistes français et par la Société
211
pour la fondation, à Ptome, d’une Académie
américaine des Beaux-Arts. On cite notam-
ment parmi les souscripteurs, fondateurs de
l’Académie, MM. Pierpont Morgan, William
Vanderbilt et Henry Frick.
*** Le Musée métropolitain de New-York
vient d’acquérir une oeuvre capita'e de la
peinture espagnole : l’autel de saint André,
attribué au peintre catalan Luis Borassâ
(1390-1421). Cet important retable se compose
de cinq grands panneaux et de sept petits
placés au-dessous. Saint Antoine assis, tenant
une croix, en occupe le centre.
Au Musée du Louvre
Le Departement des pointures, au musée du
Louvre, vient d’avoir la bonne fortune de pouvoir
faire, avant l’ouverture de l’exposition G hardi n-
Fragonard, inaugurée mardi dernier, rue de Sèze,
une acquisition de première importance, digne
d’être accueillie et célébrée avec joie. Il s’agit de
deux peintures de Chardin, qui comptent parmi
les plus exceptionnelles et les plus rares de
l’exposition, si elles n’en sont même les deux
grands chefs-d’œuvre. Ce sont les portraits en
pendant des fils du banquier et joaillier Godefroy,
collectionneur et homme de goût sous Louis XV,
qui paraît avoir été ami ou protecteur de Chardin
à ses débuts : le plus âgé, prêt à jouer du violon,
assis devant une table où est posé sur un pupitre
un recueil de menuets; le plus jeune rendu dans
toute la grâce insouciante de son âge, écolier flâ-
neur, abandonnant travail et livre pour s’amuser
à regarder tourner une toupie. Malgré la célébrité
plus grande de l'Enfant au toton, seul exposé par
Chardin au Salon de 1738, presque aussitôt gravé
par Lépicié (1742) et reproduit par le maître lui-
même (une de ces répliques figure à l’exposition),
les deux œuvres sont d’égale importance et d’égale
valeur. Avec des mérites différents appropriés à
l’âge même des modèles, elles rivalisent d’éclat,
de fraîcheur, de délicatesse exquise. C’est la
nature et la vie même prise sur le vif ; et le Jeune
homme au violon, maintenant qu’il est définiti-
vement sorti de l’ombre, égalera bientôt son frère
en célébrité.
Ces deux admirables pendants proviennent, en
transmission directe, du dernier des frères survi-
vant, le charmant modèle du Toton, Auguste-Ga-
briel Godefroy, écuyer, contrôleur général de la
Marine, raffiné collectionneur comme son père
(il posséda, entre autres, Y Indifférent et la Finette
de Watteau), mort très âgé en 1813. On se rappelle
encore l’émotion qu’ils excitèrent, lorsqu’ils appa-
rurent pour la première fois en public, à l’Expo-
sition des Portraits de femmes et d’enfants, en
1897, à l'École des Beaux-Arts (1). La joie de les
revoir se double aujourd’hui de la certitude déli-
cieuse qu’on a désormais de ne plus les perdre
et de les voir entrer, après l’Exposition, dans la
demeure dont ils étaient dignes. Le Louvre, qui, en
dehors des merveilleux pastels du maître, ne pos-
(1) Voir l'article de M. Maurice Tourneux [Ga-
zette des Beaux-Arts, 1897, t. T, p. 402),
sédait rien encore de Chardin portraitiste {Le
Château de cartes, simple figure d’expression,
comptant à peine dans la série), vient de conquérir
d'emblée en ce genre, avec autant de clairvoyance
que d’énergie, deux pièces capitales et maîtresses,
destinées à occuper une place d’élite parmi les
chefs-d’œuvre de l’art français.
Les Récompenses des Salons
PRIX NATIONAL ET BOURSES DE VOYAGE
Le ronseil supérieur des Beaux-Arts s’est réuni
jeudi dernier au Grand Palais, sous la présidence
de M. Dujardin-Beaumetz, pour procéder à l’attri-
bution du prix du Salon ou prix National, et des
bourses de voyage.
Au premier tour de scrutin, le prix National a
été décerné, par 30 voix sur 49 votants, à M. Mar-
quet, sculpteur, qui a exposé au Salon des Artistes
français une statue d’enfant en marbre: Il n'est
pas de rose...
Les trois bourses de voyage disponibles pour la
peinture ont été attribuées à MM. Jonas, auteur
des deux toiles : Scène de grève et Les Marguilliers
(Salon des Artistes français) ; Humbert, auteur de
l'Aède (Salon des Artistes français), et Carrera,
auteur de Au jardin (Salon des Artistes français).
M. Jonas étant encore à l'École des Beaux-Arts,
où il travaille en loge pour le concours de peinture
du prix de Borne, il a été décidé, à l’unanimité,
que si M. Jonas obtenait le prix de Rome, la
bourse de voyage qui lui a été attribuée serait
reversée sur celui des candidats qui aurait obtenu
le plus de voix sur la liste. Elle écherrait dans ces
conditions à M. Jarnois.
Les bourses de la sculpture ont été attribuées à
MM. Ilalou (Société Nationale), Àlliot (Société des
Artistes français), et Maurice Favre (Société des
Artistes français).
Pour la gravure, la bourse de voyage a été attri-
buée à M. Cabaud (de la Société des Artistes fran-
çais), auteur d’une gravure au burin d’après un
Primitif flamand.
La bourse de voyage pour l’art décoratif a été
attribuée à M. Decœur (de la Société des Artistes
français).
PRIX DIVERS
Prix Henner. — Ce prix, d’une valeur de 3.000
francs, réservé à un artiste français, peintre
de figure, âgé de plus de trente ans, a été décerné
pour la première fois cette année. La Société des
Artistes français a procédé à son attribution par
les seins d’un jury composé des peintres de la
Société membres de l’Académie des Beaux-Arts et
ti'ulaires de la médaille d’honneur de peinture.
Le prix a été attribué, au troisième tour de scru
tin, par 8 voix, à M. Guinier, né à Paris, élève de
Benjamin-Constant et de M. Jules Lefebvre, qui a
exposé cette année Femme pensive et Jeune fille et
Pavots.
Des voix se sont portées à ces trois tours de
scrutin sur les noms de M. Dupny, Pierre, Muller
et Fouqueray.
Prix de la Société d'encouragement à l’Art et
à VIndustrie. — Le jury spécial constitué par
la Société des Artistes français et par la Société