FONTS BAPTISMAUX DE LIÈGE.
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professées contre les Cathares ', qui le regardaient comme un envoyé du mauvais esprit, ou
du moins comme un homme dont l'inspiration était lort équivoque. Ce leur était un prétexte
de plus pour repousser le baptême usité dans l'Église; aussi prétendaient-ils le remplacer par
une cérémonie toute différente, bien que parfois on lui donnât le même nom dans leur langage
insidieux *. La représentation de saint Jean-Baptiste, répétée jusqu'à trois fois, peut donc être
regardée comme une protestation catholique. On y voit la grandeur de Jean attestée par
1 humiliation du Sauveur devant lui; la matière du sacrement préparée, pour ainsi dire,
par le Précurseur, puis publiquement approuvée par le Fils de Dieu et par toute la Trinité,
après avoir été montrée dès l'origine dans les œuvres de la Création enfin, la préconisation
de la justice du cœur, et non pas de ces dehors affectés que les Manichéens aimaient à
prendre C'est, je pense, dans cette dernière intention que l'on a montré les puhlicains et
les gens de guerre, dont les devoirs sont tracés d'une manière si simple et si indulgente par
saint Jean-Baptiste, dans l'évangile de saint Luc.
Le baptême du centurion Corneille par saint Pierre ^ ne figure pas ici uniquement parce
qu'il représente le prince des apôtres^ et la première admission des Gentils dans l'Eglise?;
le concile d'Arras nous en indique un autre motif qui a dû guider l'artiste dinantais lœs
* Gf. Bonacurs. Jfam'/èsf. /:acrc& caf/mr.^ ap. d'Achcry,
Npicûey. t. XIII, p. 6à, 69. — Moneta, samma acàj.
cafAar. fibr. III, cap. 1. (ed. Ricchini,p. 228).—Rener.,
ap. Martène, TAcsaar. aaccdot. t. Y. p. 1769, 1773. —
Photius, ac/ Arsca. n" 5 (Galiand, XIII, 66A). — Harme-
nopul. et Theodoret. ap. Toll, Lmya. âfacr. à a/.,
p. 108, 116.—Euthym. Paaop/. , tit. XXII, n° 16 (ed.
Gieseler, p. 25,sq.).—Etc:, etc.
^ Moneta, 1. IV, cap. 1; et Ricchini, fa A. G (p. 276,
sq. ;et291,sq.).—Ekbert, serai. VIII (GaHand,XIV, A6A,
sqq.). —Etc.
^ Npic:/. ,Gc. ,p. 5-9. «Talis et tantusDeiFilius.sicut nar-
rât Evangeiista, venitin Galiiaeamin Jordanem adJohannem
ut baptizaretur abeo. Gui quum, ex infirmitatis propriae
conscientia, ministerium recusaret, ait Dominus (Matth.
lit, 15) : Aia<? modo, sic oaiat decct aosoaiaeaijaslâiaai
ùaplerc. Quidenim? In quo erattotiuspienitudojustitiae,
et [qui] immutabilité!' et incomparabiliter justus et justiH-
eans omnia erat ; numquid ei aliquid a perfccta justitia
deerat ut, ad implendam justitiam, materiaiis aquae tluentis
et baptizantis ministerio indigcret?.Cur ergo dicebat :
sicdccet aos oaiaoai laip^crcjastitiaai? qui nec baptizari
indigebat, necjustitiaquapienusredundabat quo supple-
retur per baptismum habebat. Indigebat ccrte non sibi
sed nobis. Etc., etc.
« Quod autem per materiafem aquam baptismum datur,
hæc ratio est. Voiuit enim Deus ut res iiia invisibilis, per
eongruentem sed profecto tractabiiem rem et visibilc im-
penderetur elementum, super quod Spiritus Sanctus fere-
batur in principio. Nam sicutper aquam purgatur exterius
corpus, ita latenter ejus mysterio puriûcatur et animus.
Invocato enim Dco descendit Spiritus Sanctus de cæiis ;
et medicatis aquis sanctificat eas de semetipso ; et acci-
piunt vim purgationis ut in eis caro et anima delictis in-
quinata mundetur. Manus impositio ideo Ht ut per
benedictionem advocatus invitetur Spiritus Sanctus. Tune
enim Paraclitus post mundata corpora iibens a Pâtre des-
cendit, et quasi super baptismi aquam velut super pristi-
nam sedem recognoscens quiescit. Etc. x
Gf. Ricchini, fa Monet. G'Ar. III, c. 1 ; et ââr. IV ,
cap. 1 (p. 227-231, 277-279).—Moneta, l'Aid.^ 292.
* Matth. ni, 2, 8-11.—Luc. ni, 7-là. Les prétentions
à Pair mortiHé caractérisaient si bien ies Cathares, que
les hommes à visage paie couraient grand risque iorsque
ie peuple était animé contre fa nouvefie secte. Gf. Ansefm.
leodiens., G cû.
s M. A. Le Prévost, dans ses notes sur Orderic Vital
(t. I, 209), a fait observer que son historien , comme
notre artiste , attribue à saint Pierre le baptême de Cor-
neille , quoique les Actes des apôtres disent seulement :
Ja.ssd cos GapazarG Mais tout au plus le langage ordinaire
des écrivains du moyen âge semble-t-il supposer que saint
Pierre, se réservant le baptême du centurion romain,
remit à d'autres le soin d'instruire et d'admettre dans
l'Eglise le reste des membres de la famille, qui n'avaient
point reçu de Dieu les mêmes lumières.
^ Gf. Spicileg. G cà., p. 35, 60.
Je n'y cherche pas non plus un témoignage contre la
distinction établie par les Manichéens, entre les aliments.
Cf. Moneta, û'Ar. II, cap. 5 (p. 139).
? Act. x, 1-A8; XI. 1-19.
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professées contre les Cathares ', qui le regardaient comme un envoyé du mauvais esprit, ou
du moins comme un homme dont l'inspiration était lort équivoque. Ce leur était un prétexte
de plus pour repousser le baptême usité dans l'Église; aussi prétendaient-ils le remplacer par
une cérémonie toute différente, bien que parfois on lui donnât le même nom dans leur langage
insidieux *. La représentation de saint Jean-Baptiste, répétée jusqu'à trois fois, peut donc être
regardée comme une protestation catholique. On y voit la grandeur de Jean attestée par
1 humiliation du Sauveur devant lui; la matière du sacrement préparée, pour ainsi dire,
par le Précurseur, puis publiquement approuvée par le Fils de Dieu et par toute la Trinité,
après avoir été montrée dès l'origine dans les œuvres de la Création enfin, la préconisation
de la justice du cœur, et non pas de ces dehors affectés que les Manichéens aimaient à
prendre C'est, je pense, dans cette dernière intention que l'on a montré les puhlicains et
les gens de guerre, dont les devoirs sont tracés d'une manière si simple et si indulgente par
saint Jean-Baptiste, dans l'évangile de saint Luc.
Le baptême du centurion Corneille par saint Pierre ^ ne figure pas ici uniquement parce
qu'il représente le prince des apôtres^ et la première admission des Gentils dans l'Eglise?;
le concile d'Arras nous en indique un autre motif qui a dû guider l'artiste dinantais lœs
* Gf. Bonacurs. Jfam'/èsf. /:acrc& caf/mr.^ ap. d'Achcry,
Npicûey. t. XIII, p. 6à, 69. — Moneta, samma acàj.
cafAar. fibr. III, cap. 1. (ed. Ricchini,p. 228).—Rener.,
ap. Martène, TAcsaar. aaccdot. t. Y. p. 1769, 1773. —
Photius, ac/ Arsca. n" 5 (Galiand, XIII, 66A). — Harme-
nopul. et Theodoret. ap. Toll, Lmya. âfacr. à a/.,
p. 108, 116.—Euthym. Paaop/. , tit. XXII, n° 16 (ed.
Gieseler, p. 25,sq.).—Etc:, etc.
^ Moneta, 1. IV, cap. 1; et Ricchini, fa A. G (p. 276,
sq. ;et291,sq.).—Ekbert, serai. VIII (GaHand,XIV, A6A,
sqq.). —Etc.
^ Npic:/. ,Gc. ,p. 5-9. «Talis et tantusDeiFilius.sicut nar-
rât Evangeiista, venitin Galiiaeamin Jordanem adJohannem
ut baptizaretur abeo. Gui quum, ex infirmitatis propriae
conscientia, ministerium recusaret, ait Dominus (Matth.
lit, 15) : Aia<? modo, sic oaiat decct aosoaiaeaijaslâiaai
ùaplerc. Quidenim? In quo erattotiuspienitudojustitiae,
et [qui] immutabilité!' et incomparabiliter justus et justiH-
eans omnia erat ; numquid ei aliquid a perfccta justitia
deerat ut, ad implendam justitiam, materiaiis aquae tluentis
et baptizantis ministerio indigcret?.Cur ergo dicebat :
sicdccet aos oaiaoai laip^crcjastitiaai? qui nec baptizari
indigebat, necjustitiaquapienusredundabat quo supple-
retur per baptismum habebat. Indigebat ccrte non sibi
sed nobis. Etc., etc.
« Quod autem per materiafem aquam baptismum datur,
hæc ratio est. Voiuit enim Deus ut res iiia invisibilis, per
eongruentem sed profecto tractabiiem rem et visibilc im-
penderetur elementum, super quod Spiritus Sanctus fere-
batur in principio. Nam sicutper aquam purgatur exterius
corpus, ita latenter ejus mysterio puriûcatur et animus.
Invocato enim Dco descendit Spiritus Sanctus de cæiis ;
et medicatis aquis sanctificat eas de semetipso ; et acci-
piunt vim purgationis ut in eis caro et anima delictis in-
quinata mundetur. Manus impositio ideo Ht ut per
benedictionem advocatus invitetur Spiritus Sanctus. Tune
enim Paraclitus post mundata corpora iibens a Pâtre des-
cendit, et quasi super baptismi aquam velut super pristi-
nam sedem recognoscens quiescit. Etc. x
Gf. Ricchini, fa Monet. G'Ar. III, c. 1 ; et ââr. IV ,
cap. 1 (p. 227-231, 277-279).—Moneta, l'Aid.^ 292.
* Matth. ni, 2, 8-11.—Luc. ni, 7-là. Les prétentions
à Pair mortiHé caractérisaient si bien ies Cathares, que
les hommes à visage paie couraient grand risque iorsque
ie peuple était animé contre fa nouvefie secte. Gf. Ansefm.
leodiens., G cû.
s M. A. Le Prévost, dans ses notes sur Orderic Vital
(t. I, 209), a fait observer que son historien , comme
notre artiste , attribue à saint Pierre le baptême de Cor-
neille , quoique les Actes des apôtres disent seulement :
Ja.ssd cos GapazarG Mais tout au plus le langage ordinaire
des écrivains du moyen âge semble-t-il supposer que saint
Pierre, se réservant le baptême du centurion romain,
remit à d'autres le soin d'instruire et d'admettre dans
l'Eglise le reste des membres de la famille, qui n'avaient
point reçu de Dieu les mêmes lumières.
^ Gf. Spicileg. G cà., p. 35, 60.
Je n'y cherche pas non plus un témoignage contre la
distinction établie par les Manichéens, entre les aliments.
Cf. Moneta, û'Ar. II, cap. 5 (p. 139).
? Act. x, 1-A8; XI. 1-19.