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Cahier, Charles; Martin, Arthur
Mélanges d'archéologie, d'histoire et de littérature (Band 3,1): Nouveaux mélanges ... sur le moyen âge : curiosités mysterieuses ; 1 — Paris, 1874

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https://doi.org/10.11588/diglit.33620#0123
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RELIQUAIRE DE TONGRES (PL. VIIl).
parlant aux Romains, pour lesquels le pont Milvius était à peu près ce que serait
pour nous le Pont-Neuf, n’imagina pas qu’on pût se méprendre sur la chute du
vaincu dans les eaux du Tibre (liberina in stagna). Mais les écoles de la Germanie,
beaucoup plus au fait du texte de Prudence que de la topographie romaine, semblent
avoir conclu que Constantin gagnait ce jour-là une sorte de bataille navale b II ne faut
pourtant pas trop nous émouvoir de cette naïveté, nous verrons mieux encore.
Héraclius donnant la mort à Chosroès ne doit être pris que comme un souvenir
de ce que l’Église appelle exaltation de la sainte croix, c’est-à-dire restitution du bois
de la vraie croix après la retraite des Perses, qui l’avaient emportée chez eux. Voici
ce que l’histoire nous en apprend. Chosroès II, qui avait des obligations à l’empereur
Maurice, trouva généreux et utile de se porter vengeur du prince grec mis à mort par
Phocas. En conséquence, il précipita sur l’empire ses armées, qui ravagèrent l’Asie
Mineure, la Syrie, l’Egypte et jusqu’à T Afrique. Dans ces courses, Jérusalem fut
dépouillée de la vraie croix en 612. La chute de Phocas et le couronnement d’Héraclius
ne firent point poser les armes aux Perses, qui se gorgeaient de sang et de pillage sous
le beau prétexte de reconnaître les services rendus par Maurice à leur souverain.
Héraclius, à qui on refusait la paix, sut la conquérir. De 622 à 626, il fit reculer ces
dévastateurs jusqu’au delà de leurs anciennes limites. Au milieu de ses désastres,
Chosroès, malade et voyant ses peuples mécontents, imagina d’apaiser la révolte en
cédant le trône à Médarrès, l’un de ses fils. Mais l’aîné, Siroès, se vengea de ce passe-
droit en s’emparant de son compétiteur, qu’il mit à mort, et de son père, qui mourut
de faim ou de désespoir en 628. Siroès, pour être tranquille du côté des Romains, fit
la paix avec Héraclius; et rendit, entre autres proies, la sainte croix, qui avait été
quatorze ans entre les mains des infidèles.
Le moyen âge jugea plus chevaleresque de mettre Héraclius aux prises avec Chosroès
en personne, et d’attribuer la mort du prince sassanide au prosélytisme de l’empereur2.

1. C’est ce qui paraît guider l’auteur d’un prolongement
ajouté à la prose Laudes crucis attollamus, où sont groupés
les types prophétiques delà croix (Vitraux de Bourges, note
de la page 107). Quelques missels du xvie siècle (ceux de
Salzbourg, d’Utrecht, etc.) la terminent par ces strophes :
« In scripturis, sub figuris
Ista lalent ; sed jara patent
Crucis bénéficia.
Reges credunt, hostes cedunt ;
Sola cruce Christo (Christi ?) duce
Pauci fugant millia.
Roma naves universas
In profundum vidit mersas
Una cum Maxentio.
Fusi Tbraces, cæsi Persæ ;
Cedit (sed et?) partis dux adversæ
Victus ab Beraclio.
Ista suos fortiores
Semper facit, et victores. Etc. »
La victoire sur les Thraces doit être du règne de Con-
stantin. Théophane en parle comme d’une ou deux grandes
batailles livrées près du Danube, et qui arrêtèrent les
Goths unis aux Sarmates. Mais il faut tenir compte des lé-

gendaires grecs du moyen âge, chez lesquels nos hymno-
graphes auront puisé.
Cf. Falcon., Ad tabulas capponianas commentarius, p. 7.
2. Ce récit fut longtemps en faveur dans l’Occident,
mais la Légende dorée le corrige fort bien. Quant à Vincent
de Beauvais, et à l’auteur d’une homélie publiée sous le
nom de Raban-Maur (Opp. t. V, 625), ils s’accordent à mettre
aux prises les adversaires sur un pont du Danube d’abord,
et à faire tuer Chosroès sur son trône, de la main d’Héra-
clius (devenu Gruchus dans l’édition de Colvener). Pour la
curiosité, je citerai ce qu’en dit Ilonorius d’Autun (fol. ISA )
précisément sur la fête de la sainte croix :
« Quæ autem sit hodierna festivitas,
Scire débet vestra fraternitas.
Cosdras (sic), rex Persarum, Judæam despoliavit,
Crucem sanctam ab Hierosolymis in terrain suam asportavit ;
Ibique argenteam turrim pro cælo construxit,
In quo similitudinem solis et lunæ, stellarumque fixi
Quæ turris quodam artificio movebaiur,
Et mugitum tonitruorum imitabatur.
Aqua quoque per fistulas occultas ascendebat,
Et per quasdam cavernulas pro pluvia descendebat.
In hac turri crucem pro Filio fixerat,
 
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