VOYAGE EN ESPAGNE, TOLÈDE. 285
relations que la maison d'Autriche lui donnait avec l'Italie, je reproduis deux portes où mon
ancien collaborateur a écrit de sa main : Saragosse ' (Cf. p. 283 et 284).
Génies comme disent les Italiens), griffons, sphinx, harpies ou sirènes, palmettes
que l'on tâche de diversifier sans trop y réussir ; fleurons qui s'emmanchent du mieux
possible l'un sur l'autre pour occuper l'espace qu'on leur destine ; médaillons de numisma-
tistes ou de bijoutiers pour loger tellement quellement des chiffres, devises, armoiries ou
bustes pseudo-romains; monstres qui flottent entre le moyen âge et l'antiquité; chérubins
alternant avec des nymphes terrestres ou marines; tout cela paraît sortir d'un répertoire
d'ornemaniste où le bronze, l'orfèvrerie, la joaillerie, la peinture plus ou moins antique se
seraient entassés pêle-mêle et où l'on aura puisé pour le besoin de chaque moment. Peu
importait sans doute l'homogénéité des éléments et la matière qui avait servi de modèle ;
on rapportait ses cartons de voyage garnis de souvenirs recueillis au loin, et moins cela
était national ou intelligible, plus c'était beau. Il semblerait entendre ce rhéteur d'autrefois
souriant au g-alimatias de ses élèves et couronnant leurs efforts par ce suffrage : Voilà qui est
bon ! car moi-même je ne viens pas à bout d'y rien comprendre.
Ces deux portes appartiennent-elles à une égiise? J'espère que non, mais ne voudrais pas
en répondre. Il ne s'agissait pas alors de convenances et d'appropriations, et de terminer
par le bon sens; mais de richesses et de singularités nouvelles. Je dis nouvelles pour le pays,
car c'était bien ce qu'on appelle dans le langue de certains fabricants qui font
du drap neuf avec les débris du vieux.
TOLÈDE.
Charles-Quint, en transportant sa cour à Valladolid, pour punir Tolède d'avoir été le centre
des et de l'aide qu'elle avait donnée à la veuve de Juan de Padilla, lui porta un
coup mortel.
Ce ne fut plus la ville royale des Goths, des Maures et de la Castille ; le clergé seul main-
tint encore l'éclat de cette cité. Mais ce dernier fleuron a subi les atteintes des révolutions
modernes, et des restes d'architecture sont l'unique souvenir appréciable d'une g'randeur
passée. Avant même d'y pénétrer, le voyag'eur se promet plus d'une découverte, en aper-
cevant les tours mauresques, les flèches gothiques et les coupoles italiennes qui rappellent
plusieurs siècles de gloire. Lorsqu'on y pénètre, on reconnaît qu'une population nombreuse
devait se presser jadis dans l'enceinte de cette ville trop étroite alors. Aujourd'hui les expro-
priations ne coûteraient sûrement pas bien cher à qui voudrait élargir les rues.
La cathédrale est l'ouvrage d'un digne ami et parent de saint Louis. Mais saint Ferdi-
nand s'est trouvé moins heureusement secondé peut-être que ne le fut son cousin de
France.
Toutefois la cathédrale de Tolède ne craindrait pas le voisinage des plus belles églises
françaises ou anglaises. Les piliers y rappellent ceux de Bourges, la grande rose occi-
). H est trop juste d'avouer qu'un autre exemplaire porte espagnole. Mais que puis-je dire sur des données si discor-
PampeiMHe. En tout cas, c'est au moins de la renaissance dantes? J'y fais mon possible.
relations que la maison d'Autriche lui donnait avec l'Italie, je reproduis deux portes où mon
ancien collaborateur a écrit de sa main : Saragosse ' (Cf. p. 283 et 284).
Génies comme disent les Italiens), griffons, sphinx, harpies ou sirènes, palmettes
que l'on tâche de diversifier sans trop y réussir ; fleurons qui s'emmanchent du mieux
possible l'un sur l'autre pour occuper l'espace qu'on leur destine ; médaillons de numisma-
tistes ou de bijoutiers pour loger tellement quellement des chiffres, devises, armoiries ou
bustes pseudo-romains; monstres qui flottent entre le moyen âge et l'antiquité; chérubins
alternant avec des nymphes terrestres ou marines; tout cela paraît sortir d'un répertoire
d'ornemaniste où le bronze, l'orfèvrerie, la joaillerie, la peinture plus ou moins antique se
seraient entassés pêle-mêle et où l'on aura puisé pour le besoin de chaque moment. Peu
importait sans doute l'homogénéité des éléments et la matière qui avait servi de modèle ;
on rapportait ses cartons de voyage garnis de souvenirs recueillis au loin, et moins cela
était national ou intelligible, plus c'était beau. Il semblerait entendre ce rhéteur d'autrefois
souriant au g-alimatias de ses élèves et couronnant leurs efforts par ce suffrage : Voilà qui est
bon ! car moi-même je ne viens pas à bout d'y rien comprendre.
Ces deux portes appartiennent-elles à une égiise? J'espère que non, mais ne voudrais pas
en répondre. Il ne s'agissait pas alors de convenances et d'appropriations, et de terminer
par le bon sens; mais de richesses et de singularités nouvelles. Je dis nouvelles pour le pays,
car c'était bien ce qu'on appelle dans le langue de certains fabricants qui font
du drap neuf avec les débris du vieux.
TOLÈDE.
Charles-Quint, en transportant sa cour à Valladolid, pour punir Tolède d'avoir été le centre
des et de l'aide qu'elle avait donnée à la veuve de Juan de Padilla, lui porta un
coup mortel.
Ce ne fut plus la ville royale des Goths, des Maures et de la Castille ; le clergé seul main-
tint encore l'éclat de cette cité. Mais ce dernier fleuron a subi les atteintes des révolutions
modernes, et des restes d'architecture sont l'unique souvenir appréciable d'une g'randeur
passée. Avant même d'y pénétrer, le voyag'eur se promet plus d'une découverte, en aper-
cevant les tours mauresques, les flèches gothiques et les coupoles italiennes qui rappellent
plusieurs siècles de gloire. Lorsqu'on y pénètre, on reconnaît qu'une population nombreuse
devait se presser jadis dans l'enceinte de cette ville trop étroite alors. Aujourd'hui les expro-
priations ne coûteraient sûrement pas bien cher à qui voudrait élargir les rues.
La cathédrale est l'ouvrage d'un digne ami et parent de saint Louis. Mais saint Ferdi-
nand s'est trouvé moins heureusement secondé peut-être que ne le fut son cousin de
France.
Toutefois la cathédrale de Tolède ne craindrait pas le voisinage des plus belles églises
françaises ou anglaises. Les piliers y rappellent ceux de Bourges, la grande rose occi-
). H est trop juste d'avouer qu'un autre exemplaire porte espagnole. Mais que puis-je dire sur des données si discor-
PampeiMHe. En tout cas, c'est au moins de la renaissance dantes? J'y fais mon possible.