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Cahier, Charles; Martin, Arthur
Mélanges d'archéologie, d'histoire et de littérature (Band 3,4): Nouveaux mélanges ... sur l'moyen âge. Bibliothèques — Paris, 1877

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https://doi.org/10.11588/diglit.33623#0088
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MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.

insi ne nous étonnons pas lorsque çà et là se rencontrent les
lamentations des pauvres copistes, qui n'estiment point
que leur profession soit très-enviable. Un d'eux, moine de
Saint-Aigman d'Orléans sous les Carlovingiens (ap. L. De-
iisle, /e t. II, p- 400, sv.) dit: K Oh! la
rude tâche que d'écrire ! On se voûte l'échine, les yeux
s'y voilent, le ventre et les côtes s'y défoncent, etc. H
L'autre, à Saint-Maur-des-Fossés (aTw/., p. 74, sv.),se plaint
du froid et de l'onglée, peut-être, que sa besogme lui a fait
souffrir durant les mois de novembre, décembre et janvier.
Warembert de Corbie (p. 121) déclare que, qui n'a pas fait le métier de copiste, n'en
soupçonne pas les tribulations. « Le port n'est pas salué plus joyeusement par un naviga-
teur, que la dernière ligne d'un manuscrit par l'écrivain. On s'imagine que trois doigts sont
tout ce qu'il faut pour guider la plume, mais tout le corps y peine, o Donnons les propres
paroles d'un quatrième p. 112), quoiqu'elles ressemblent un peu à ce que nous ve-
nons de traduire; mais peut-être conservent-elles un ancien dicton de .ycnjo/oràn??, reçu
chez les malheureux tâcherons qui s'étiraient les membres au terme de leur labeur as-
sommant :


H Nauta rudis pelagi ut sævis ereptus ab undis
In portum veniens, pectora læta tenct ;
Sic scriptor fessus, calamum sub line laboris
Deponens, habeat pectora læta quidem.
111e Deo dicat grates pro sospite vita,
Proque laboris agat iste sui requie; etc. B

Un autre (ap. Girardot, y/m. & /a n" 188, p. 110) estime
qu'un si dur métier peut bien prétendre au ciel :

« Deutur scriptori, pro pccna, gaudia cæli. a

On n'avait même pas la mince consolation d'agir à sa fantaisie pour le choix de cette
corvée. Certain moine de Cologne (àSaint-Pantaléon) avait cru faire merveille en écrivant
très-bien un missel pour la communauté. Mais, son beau travail étant exécuté sans permis-
sion, l'abbé fit brûler ce volume comme objet volé à l'obéissance religieuse*.
Hors de l'antiquité, avant l'imprimerie, les collections partictüières ne devaient être que
d'assez faible importance, ou, si elles pouvaient être quelque chose de mieux, ce n'était que
bien rarement. Des collections publiques pourraient paraître seules avoir été en état de faire
face alors, par la durée de leur existence et par les dépenses de leur approvisionnement, aux
difficultés énormes qui entravaient en ce temps la formation de bibliothèques considérables.
Or, que les princes du moyen âge s'occupassent d'un pareil projet, il n'y fallait presque pas
song'erL Et d'ailleurs, l'eussent-ils voulu, il leur était, pour le moins, malaisé d'y réussir. Le

1. Lanigan, ÆcciesMsh'catiTM'sfory... (1822), t. III, p. 412.
2. Et quand un d'eux l'aurait prétendu, quelle continua-
tion eût trouvée son œuvre de ia part de ses successeurs ?
La bibliothèque de Charlemagne ne fut-ebe pas dispersée
à sa mort? Ceiie de Chartes ie Chauve, je crois, et celle de
saint Louis furent données à des religieux (cf. Gauffrid de
Belloloco, ap. du Boulay, Lh'st. MMivers. PctWsit'ens., t. lit,
p. 638), tant le pouvoir lui-même sentait sa propre incapa-

cité à fonder en ce genre rien de durable ! M. Léopold Dolisle,
dans sonrécentouvragesurleCuMwetdesmss. deûtÆîûh'ot/tg-
MMpcrhde (t. 1, p. 3, svv. ; 6, 8, 10, sv.; 17, svv. ; 72),
montre la dispersion des livres de nos princes comme chose
habituellejusqu'aurègnedeCharlesV. Or le zèle decedernicr
roi n'assura même pas le maintien de la bibliothèque placée
par lui au Louvre ; car on le voit se dessaisir de nombreux
mss. dès son vivant. Puis le tout fut vendu à vil prix en 1424.
 
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