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La caricature: revue morale, judiciaire, littéraire, artistique, fashionable et scénique — 1830 (Nr. 1-9)

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https://doi.org/10.11588/diglit.13563#0030
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T7T



CARICATURES

MORALES, RELIGIEUSES, POLITIQUES, LITTÉRAIRES, SCÉNIQUES, etc.

I>E GARÇON RE BUREAU.

( La scène est au Ministère des Finances. )

PERSONNAGES : Deux vieux garçons. •—Ils sont petits, trapus, à figures en forme d’é-
cumoires. — Ils conservent encore l’ancienne livrée du gouvernement-parjure. *— On
voit que ce sont de vieux domestiques qui ont été'garçons de recette, valets de chambre,
heiduques, et qui sont au Ministère depuis trente ans. — Le plus ancien aoffertà l’autre
une prise de tabac. — Us ont tous deux déployé leurs mouchoirs à carreaux bleus et
rouges. — Ils se regardent avant de se moucher. — Ils ont l’air de se défier l’un c.e
l’autre ; mais ils guignent de l’œil en même temps, et aloi-s :

L’ancien : —Hein P...

L’autre : — Çava-t-il ?...

L’ancien:—Hé, hé!...

L’autre: ■— Que tu dis?....

L’ancien : — Rient...

( Ils regardent autour d’eux. )

L’autre: —Ça fait pitié...

L’ancien : (en lui tapant dans la main) —A la bonne heure !... N’est-
ce pas?....

L’autre : .— Figure-toi que ces nouveaux, ça ne sait rien de rien!... Le
mien, ce petit jeune homme qu’ils ont mis directeur du budget... direc-
teur du budget, dis donc ?... Et l’on dit qu’il travaillait dans le Constitu-
tionnel!. ..Hé ben,., ça n’a aucun usage des bureaux!... J’ai beau lui dire,
tous les matins, où se met le papier blanc , la poudre, où sont les let-
tres, les ustensiles de bureau !... Bah ! c’est comme si que je lui disais

rien_ Ça joue avec tout!... Et puis , — il ne s’accoutume pas à moi,..

ni moi à lui.... Autrefois, je les formais en quinze jours, je les stylais à
déposer leurs parapluies dans le coin , à s’accoutumer de prendre leur
bois à côté d’eux.... (// fait-un gestededoute et hoche la tête.) Pour celui-
là?... j’en désespère. Ça n’a pas de capacité. Faut toujours lui dire les
mêmes choses... Et exigeant?... faut voir!., i’ me fait faire ses commis-
sions... Je les fais... Mais, je compte bien lui dire que je suis l’employé du
gouvernement. Tiens,., que ça me fait ?... j’ai acquis ma retraite,... j’ai
droit à six cents francs,... hein? pas vrai... Et le tien?.... comment va-
t-il?...

L’ancien (faisant une moue très-lippue) : — C’est pas encore un fa-
meux!... (tout bas) i’ reconduit les solliciteurs jusqu’à la seconde
porte... Moi je vous les traite!... tu sais... Tiens, faut tenir sa dignité!.,
si le gouvernement n’en a pas, est-ce une raison?.... Figure-toi? ils
disent : j’ai l’honneur.... au premier venu, //«serrent la main à des
gens auxquels tu n’olfrirais pas seulement une prise de tabac... Ils crot-
tent leurs tapis... que c’est une pitié!... Ils viennent matin... Mais ça
ne durera pas... Çan’a point de formes... i’ n’me dirait pas comme l’au-
tre : — Père Moreau , une bûche?... i’ m’ dit d’un air constitutionnel :
« — Monsieur Moreau !.... ou bien Moreau tout court.... Quand les em-
ployés sont venus lui tirer leurs révérences, il les a appelés scs amis1-....
Je t’en casse des amis !... il veut les réduire....

L’autre: — Hein ! quel règne se prépare !...

L’ancien : — Oui, ils vous parlent de désintéressement et de patrio-
tisme, et ils vendent.... (On sonne l’ancien. ) — Tiens, v’ià la scie qui
v a commencer.... (// regarde à sa montre.) Il s’en manque pourtant
de dix minutes, qu’il soit huit heures.

( On sonne l’autre. )

L’autre : —V’ià le mien qui recommence son train... C’est flambé, mon
vieux!.. Avec les autres nous étions plus tranquilles... Et puis, soyons j ustes,
quand t’ nous employaient chez eux à leux soirées, on avait de l’agré-
ment. On attrapait du punch,... des gâteaux. En ai-je-t’i rapporté à
mon petit Poljtc. {On sonne et ils se séparent ; mais ils reviennent- )
— Et bien , ce petit mioche qu’a du bon sens,., il a ben vu que tout était
changé...

L’ancien : — Que t’es bête ! Jusqu’à ce gros agent de change... et ben,
i’ descendait l’escalier.... hier. — Il a dit avec un F, oui avec un F, que
sous monsieur le comte de Villèlc... il y avait de l’argent à gagner,., au
lieur que... ( On sonne.)

L’autre : —Histoire du désintéressement...

L’ancien : — Je t’en casse du désintéressement !... Ils vendent tout,
qu’on dit ! Et i’-z ont donné des mille et des cents de pension à c’tc

dame que tu vois venir ici en équipage!... Çà parle des fonds... F nous
ne laisseront que des fonds de culotte...

( Ils se séparent en souriant du calembourg et rentrent dans leurs ap -
parternens respectifs, en affectant de l’empressement et en agitant leurs
plumeaux. )

Alfred Coudreux.

FANTAISIES.

XA DERNIÈRE REVUE RE NAPOLÉON.

Ce jour était un dimanche, mais c’était le treizième dimanche de
1 année i8i3. Le surlendemain Napoléon partait pour cette fatale cam-
pagne , pendant laquelle il devait perdre successivement Bessières et
Duroc, gagner les mémorables batailles de Lutzen et Bautzen, se voir
trahi par l’Autriche, la Saxe, la Bavière et Bernadottc. 11 semblait qu’un
triste pressentiment eût amené là une brillante et curieuse population.
Chacun paraissait deviner l’avenir, dont les événemens devaient prêter,
par la suite, un intérêt de plus au tableau qu’on se montrait si avide de
contempler. L’imagination pressentait, peut-être, que, plus d’une fois, elle
aurait à retracer le mystérieux souvenir de celte scène, quand ces temps
héroïques de la France auraient pris des teintes fabuleuses.

La magnifique parade que l’empereur Napoléon allait commander,
devait être la dernière de celles qui excitèrent si long-temps l’admiration
des Parisiens et des étrangers. C’était la dernière fois que la vieille garde
exécuterait les savantes manceuvres dont la pompe et la précision éton -
liaient ce géant lui-même , qui s’apprêtait alors à un duel avec l’Europe.

— Allons donc plus vite, mon père! disait, avec un air de lutinerie,
une jeune fille en entraînant un vieillard; j’entends les tambours.

•— Ce sont les troupes qui viennent, répondit-il.

— Ou qui défilent.... Tout le monde revient ! répliqua-t-elle avec une
amertume enfantine qui fit sourire son compagnon.

— La parade ne commence qu’à midi et demi !.. . dit le père qui mar-
chait presqu’en arrière de la petite personne impatiente.

A voir le mouvement que la jeune fille imprimait à son bras droit, on
eût dit qu’elle s’en aidait pour courir ; et sa petite main, couverte d’un
gant jaune et tenant on blanc mouchoir à demi déplié, ressemblait à la
rame- d’une barque qui fend les ondes.

Alors , bientôt, Julie aperçut avec étonnement une foule immense qui
so pressait, le long du palais, dans le petit espace compris entre ses mu-
railles grises et ces bornes, réunies par des chaînes, qui dessinent de
grands carrés sablés au milieu de la cour des Tuileries. Cette bordure de
tètes d’hommes et de femmes ressemblait à une plate-bande émaillée de
fleurs. Le cordon de seritinelles, établi pour laisser un passage libre à
l’empereur et à son état-major, avait beaucoup de peine à ne pas être
débordé par celte foule empressée, qui bourdonnait comme les essaims
d’une ruche.

La jeune fille fut placée, par protection , auprès d’un superbe cheval
blanc, harnaché d’une selle en velours vert et or, que le Mamcluck de
Napoléon tenait par la bride, presque sous l’arcade, à dix pas en arrière
de tous les chevaux qui attendaient les grands officiers dont l’empereur
devait être accompagné.

— Que c’est beau !... dit Julie à voix basse, en pressant la main de
son -père.

L’aspect pittoresque et grandiose que présentait en ce moment le
Carrousel , faisait prononcer cette exclamation par des milliers de spec-
tateurs dont toutes les figures étaient béantes d’admiration.

Une autre rangée de monde , tout aussi pressée que celle dont le vieil—
lard et sa fille faisaient partie, occupait, sur une ligne parallèle au château,
l’espace étroit et pavé qui longe la grille du Carrousel. Cette foule ache-
vait de dessiner fortement, par la variété des couleurs de toutes les toi-
lettes féminines, l’immense carré long que forment les bâtimens des Tui-
leries , au moyen de cette grille alors nouvellement construite.

C’était dans ce vaste carré que sc tenaient les régimens de la vieille
garde qui allaient être passés en rovue. Ils présentaient en face du palais
d’imposantes lignes bleues de vingt rangs de profondeur. Au-deià de
l’enceinte , et dans le Carrousel, se trouvaient, sur d’autres lignes paral-
lèles , plusieurs régimens d’infanterie et de cavalerie prêts , au moindre
signal, à manœuvrer pour passer sous l’arc triomphal qui orne le milieu
de la grille, et sur le haut duquel se voyaient, à cette époque, les magni -
fiques chevaux de Venise. La musique des régimens avait été se placer
de chaque côté des galeries du Louvre, et ces deux bataillons harmonieux
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