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Le charivari — 17.1848

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Mars (No. 61-91)
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https://doi.org/10.11588/diglit.17760#0246
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quiconque proposerait de réduire ces cent mille
francs de rentes à cinquante mille.
Deuxième constitution.

Article premier. — Tous les petits français de
l'âge de cinq ans jusqu'à dix-huit seront adoptés par
l'état.

Article second. — L'État les mettra dans des ins-
titutions préparatoires à la tragédie.

Article troisième. — A partir de l'âge de dix-huit
ans révolus, les citoyens seront déclarés majeurs et
émancipés. Ils se consacreront exclusivement à la
tragédie.

Article quatrième. — L'Odéon recevra leurs tra-
gédies avec enthousiasme.

Ainsi les constitutions pleuvent de tous côtés ; on
en a sous les pieds ; on en reçoit sur la tête. Gare
dessous et ouvrez les parapluies !

A parler sérieusement, est-ce là un si grand mal?
Nous ne le pensons pas. Dans un pays libre , il faut
que l'expression des idées de tous soit libre. Dans le
nombre il s'en trouvera d'impertinentes, de folles;
qu'importe! Il s'en rencontrera aussi de bonnes, d'u-
tiles. On profitera de celles-ci et le ridicule fera
prompte justice des autres.

Nous disons-donc : Laissez les faiseurs de consti-
tutions venir à nous. Si leurs plans sont bons, ils
nous servent ; s'ils sont ridicules, ils nous amusent.

Un citoyen a remis aujourd'hui au Gouvernement
provisoire deux volumes manuscrits, reliés en maro-
quin rouge, et trouvés aux Tuileries. Ce sont les Mé-
moires de Louis-Philippe d'Orléans, l'ex-roi.
Ces volumes ont été déposés à la bibliothèque de la
ville. Ils se terminent par une phrase qui fournit un
singulier rapprochement : Louis-Philippe y exprime
l'émotion qu'il éprouva quand les commissaires de
la Convention vinrent proclamer- la République jen
face des armées ennemies.

Le service de la garde nationale se fait à Paris et
dans la banlieue avec une régularité parfaite. De
tous les rapports qui parviennent nuit et jour à l'é-
tat-major général, il résulte que jamais l'ordre et la
sûreté publique n'ont rencontré plus de zèle et de
dévoûment.

Une fraternité complète règne entre les anciens et
les nouveaux gardes nationaux.

La distribution des fusils se fait activement dans
chaque mairie ; plus de vingt mille jeunes citoyens
ont été admis depuis le 24 février.

L'artillerie de la garde nationale s'organise.

Aujourd'hui, à trois heures, les artistes peintres,
sculpteurs et architectes, se sont présentés en corps
à l'Hôtel-de-Ville. Une députation, composée de
MM. Couture, Barye et Diaz, a été introduite auprès
du gouvernement provisoire. M. Couture a lu la pé-
tition suivante :

Au nom de nos confrères les artistes peintres,
sculpteurs, graveurs et architectes, nous avons l'hon-
neur de demander à MM. les membres du gouver-
nement provisoire, que les fonctionnaires qui, par la
nature de leur emploi, exercent une action immé-
diate et directe sur les beaux-arts, soient élus par la
corporation des artistes en assemblée générale.

Les artistes s'empressent de protester de l'absolu
désintéressement qui préside à leur requête et la re-
commandent.

Ils savent qu'ils sont des travailleurs ; ils s'assimi-
lent aux ouvriers, non à des administrateurs.

Ils supplient le gouvernement de,vouloir bien fixer
le jour et le lieu de la réunion générale.

Suivent les signatures.
La députation a -été chargée d'apporter aux artis-

LE CHARIVARI.

tes l'assurance que le gouvernement provisoire pren-
drait à cœur leur pétition, et qu'il regardait le con-
cours des arts comme essentiel à l'action de la pen-
sée démocratique sur la société.

De nombreuses corporations d'ouvriers, portant
des drapeaux et formant une foule d'au moins cinq
ou six mille personnes, se sont présentées aujour-
d'hui, à trois heures, sur la place de l'Hôtel-de-
Ville, pour demander qu'un Ministère du tra-
vail, du progrès, fût institué. Après avoir reçu
quelques députations dans la salle de ses délibéra-
tions, le Gouvernement provisoire, représenté par
MM. Arago, Louis Blanc, Marie, Bethmont, est des-
cendu sur la place de l'Hôtel-de-Ville, au milieu
des ouvriers. M. Arago a pris la parole à diverses re-
prises, de groupe en groupe, excitant partout sur
son passage les plus chaleureuses acclamations. M.
Louis Blanc s'est ensuite adressé au peuple, et lui a
annoncé la formation de la Commission du gou-
vernement pour les travailleurs, laquelle doit
se réunir dès demain, au palais du Luxembourg, et
commencer immédiatement ses travaux, avec le con-
cours de tous les hommes compétens, notamment
d'ouvriers désignés par leurs camarades. M. Louis
Blanc a dit que la force du gouvernement provisoi-
re était dans la confiance du peuple, et la force du
peuple dans sa modéralion ; qu'il fallait à la fois que
sa fermeté imposât aux malveillans, et que son cal-
me laissât au gouvernement provisoire la liberté d'es-
prit nécessaire à ses délibérations.

Les plus vifs applaudissemens ont accueilli les pa-
roles de l'honorable membre.

LES flÉCONTENS,

On ne peut contenter tout le monde et son père,
dit le proverbe.

Depuis que le gouvernement provisoire existe, il
a donné chaque jour de nombreuses preuves de son
dévoûment, de son zèle, de son activité, ce qui n'em-
pêche pas quelques citoyens de le poursuivre d'amè-
res récriminations.

L'ancien gouvernement avait sa cohorte de satis-
faits; celui-ci a déjà ses non-satisfaits. Les deux
troupes se valent ; leur drapeau est le même, celui
de l'égoïsme. Saluez ces grands citoyens !

«Quoi! s'écrie un non-satisfait, le gouvernement
provisoire s'occupe de combler les vides faits dans
l'administration par les derniers événemens! Honte!
infamie ! Il y aura donc encore des gens en place ?
Le gaspillage du budget va donc recommencer? C'en
est fait de la fortune publique. Voici venir les siné-
curistes et les cumulards reconnaissables à l'ampleur
du ventre ! »

En effet, ne devait-on pas se passer de fonction-
naires ? A quoi bon des maires, des chefs de bureau,
des commissaires, des ministres? A quoi bon un
gouvernement? Est-ce que les affaires ne se font
pas toutes seules? Et puis, si l'on tient absolument à
conserver ce vieux préjugé des fonctionnaires, chaque
citoyen ne pourrait-il pas être ministre par exerrv-ie,
ou commissaire de la République, à tour de» i-ôle, par
billet de corvée, un jour de chaque mo>i, à peu près
comme on monte sa garde?

Le reste du temps on reviendrait à sa boutique ou
à sa charrue, commè Cincinlïatus.

Ces doléances peuveht<-se résumer ainsi : « Je n'ai
rien fait encore qui puisse me valoir la contiance
du nouveau gouvernement , ou bien j'ai suf-
fisamment montré que. i'étais incapable, cependant

il me faut une place. Amis, on me la refuse, la Ré-
publique est trahie ! »

Un autre non-satisfait s'approche et vous dit : «Le
gouvernement provisoire parle et n'agit pas; je l'ai
vu se promener les mains dans ses poches ; je l'ai
vu manger des tranches de jambon à l'Hôtel-de-
Ville, sous prétexte qu'il n'avait pas le temps d'aller
dîner au restaurant voisin, et se coucher dans les
bureaux sur des lits de camp, sous prétexte que, vu
l'urgence des affaires, il ne lui était pas permis de
quitter son poste, même la nuit.

« Citoyens, vous laisserez-vous prendre à ces ruses
perfides? Ne touchez-vous pas du doigt l'odieuse
trame qui se cache sous ces reliefs de charcuterie?
Quoi ! le Gouvernement provisoire mange du jambon
depuis huit jours? N'est-ce pas afin de vous faire com-
prendre qve les truffes vous seront désormais inter-
dites? Comme il sait faire semblant de dormir quel-
ques heures à peine chaque nuit, et de se coucher
tout habillé ! Avec quel art profond il affecte de cou-
vrir les murs de proclamations, de publier arrêté sur
arrêté, de nommer des commissions, d'organiser par-
tout la liberté populaire !

« Tant de perfidie crie vengeance. Aux armes, ci-
toyens? »

Heureureusement le bon sens public ne daigne pas
même s'irriter de ces ridicules protestations. En rire,
c'est assez. Passez, passez, égoïstes! passez, tristes
ambitieux qui mettriez le pays en flammes pour or-
ganiser la curée des places! Sous le gouvernement
déchu, vous flattiez la tyrannie et la corruption; au-
jourd'hui vous vous intitulez les défenseurs amis du
peuple, vous ses ennemis éternels. Salut, beau mas-
que, je te connais.

Nous avons parcouru hier les théâtres du boule-
vard et quelle que soit notre confiance dans la popu-
lation, nous avons été surpris de l'ordre parfait qui
régnait partout. Les musiciens seuls peuvent se plain-
dre du gouvernement nouveau, car à peine avaient-
ils joué les dernières mesures, le rideau baissé, qu'ils
reprenaient la Marseillaise qu'accompagnait la ¥g$
du public enthousiaste. Nous ne croyons pourtant
pas, tant ils s'y prêtaient de bonne grâce, que cette
pratique nouvelle fasse regretter la feue monarchie
aux artistes des orchestres.

Monsieur le rédacteur,

' Permettez-moi de réclamer dans votre journal
contre l'affiche de l'Opéra, qui m'attribue à tort les
paroles d'un chant exécuté ce soir à ce théâtre. Je ne
suis point l'auteur de cette composition et j'en dois
laisser l'honneur à qui de droit.
Agréez, etc.,

Félix Pyat.

# Mardi 29 février 1848.

w

Le Comité de la Société des gens de lettres a dé-
cidé qu'une assemblée générale extraordinaire aurait
lieu d'urgence le mercredi 'Ier mars à onze heurà
très précises au foyer du Théâtre de la Nation (Grand
Opéra).

Cette réunion aura pour objet de délibérer sur un
projet d'adhésion au Gouvernement provisoire.

Le Comité compte, pour cette manifestation, sur
l'empressement et le concours des gens de lettres.

Le Gérant, lîiovold pannïer.

Imprimerie Lango Lévy et Comp., 16, rue du Croissant.
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